Quelle joie ! Quelle joie que ce 5 décembre ! Quelle joie que ce jour de grève générale réussi ! Près d’un quart de siècle de reculade, de défaite sociale presqu’oublié… L’esprit de juin 36, de mai 68 a de nouveau enivré les cœurs des militantes et des militants. Dans les cortèges combatifs dans toutes les villes du pays, une seule idée en tête : demain on continue ! Bref comme il y a un demi-siècle : « ce n’est qu’un début, continuons le COM-BAT ! ».
Pour le cortège parisien, autour de 80 000 personnes. Contrairement au 1er mai dernier, le service d’ordre de Sud et de la CGT a assumé et permis à la manifestation d’aller jusqu’à la fin programmée de la manifestation, c’est-à-dire la Nation, et ce malgré les violence policières.
Toutes les informations à cette heure indiquent que les grévistes du 5 décembre reconduisent la grève. Nous nous orientons donc vers un mouvement social de première ampleur.
En ce lendemain du 5 décembre, un point est clair : le peuple est uni et en action pour la défense des retraites.
Mais, voyons objectivement la situation du champ de bataille. Ne nous y trompons pas : la lutte qui s’engage sera très dure. Ceux qui se réfèrent au mouvement victorieux de 1995 oublient deux choses : d’une part, l’effet de surprise ne joue pas, car il s’agissait au départ d’une grève spontanée et d’autre part la situation du capitalisme français est différente de cette l’époque. À la fin des années 1990, celui-ci était encore dans une phase « progressive » ; il est aujourd’hui dans une phase « régressive » et cela depuis la crise de 2008. En un mot, les monopoles financiers et Macron se retrouvent dos au mur et donc d’autant plus pugnaces et dangereux. Bref, « en face », ils sont résolus à tenir. Pour cela, le dispositif médiatique est prêt, le dispositif policier aussi, et aucun contre-pouvoir politique réel n’existe face à Macron. Soyons clairs, une soi-disant « grève par délégation », en regardant passivement les salariés des transports s’échiner, ne donnera cette fois-ci aucun résultat.
Alors que faire ?
Le mouvement social doit se souvenir des leçons du passé : une grève générale réussie est une grève qui paralyse le pays ! Prenons mai-juin 68 : contrairement aux idées reçues, la situation politique n’était en fait pas favorable à la grève, la victoire gaulliste aux élections législatives à la fin du mouvement en est la preuve historique. Toutefois, la grève massive, entre 5 et 8 millions de grévistes, était décidée par les assemblées générales avec occupation des locaux et constitution de « piquets de grève ». À partir du 13 mai, une semaine a suffi pour bloquer le France… d’où la victoire sociale (et non politique).
Aujourd’hui, cinquante ans après, nous sommes paradoxalement dans une situation objective plus favorable. Je m’explique : les flux physiques ont une importance démesurée par rapport à l’époque en question car la plupart des entreprises produisent à « flux tendus ». Le blocage des rails, des routes terrestres et aériennes provoquerait quasi immédiatement la paralysie complète de l’économie. Le point central de la bataille est donc là. Le gouvernement ne s’y trompe d’ailleurs pas : hier Castaner a envoyé ses effectifs dégager au plus vite les ronds-points bloqués par les manifestants, gilets jaunes ou non.
Pour nous, le mot d’ordre est simple : il faut imposer une grève générale reconductible avec occupation des locaux et piquets de grève… Sinon rien !
Nous sommes face à nos responsabilités.
Vive la grève !