Site icon ReSPUBLICA

A propos de la loi Blanquer

Courrier de M. Prognon

Lecteur régulier de Respublica, enseignant et délégué syndical au sein d’un établissement privé sous contrat à la périphérie de Toulouse, je voudrais vous soumettre quelques remarques relatives à votre article « Loi pour une école de la confiance à l’école Dite « LOI BLANQUER » … Une nouvelle loi aux contours très flous mais potentiellement dévastatrice » et au chapitre « La justice sociale instrumentalisée pour faire des cadeaux au privé ! ». 
Aujourd’hui, si ce ne sont les quelques diocèses conservateurs et nostalgiques de la période pré 1905, l’enseignement privé sous contrat d’association avec l’Etat ne devrai plus faire l’objet de critiques teintées d’un républicanisme laïcard à la Clemenceau. Mais il est à considérer comme une partie active du système éducatif et non une hydre prompte à prospérer sur le dos de l’enseignement public. La loi Debré a été votée en 1959 et en 2019, il lui est encore reprochée de l’avoir été. Quel cynisme. 
L’enseignement privé dont je vous parle est celui des petits établissements démunis de moyens dont la pédagogie active s’appuie sur des initiatives collectives qui n’attendent rien de l’Etat. Alors agiter une nouvelle fois, le chiffon rouge d’un privé qui serait privilégié par un gouvernement néolibéral prêt à privatiser à terme l’éducation nationale est une tartufferie. 
Le point sur lequel je suis en accord avec vous est que : « Les communes sont tenues d’assumer la prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes élémentaires privées sous contrat d’association des élèves domiciliés sur son territoire ». Pour le secondaire, le financement procède de la répartition entre les établissements d’une enveloppe attribuée par le Ministère aux directions diocésaines. Et je peux vous rassurer, celle-ci n’a pas augmenté avec Jean Michel Blanquer bien au contraire.
Alors écrire que « l’abaissement de l’âge de la scolarisation des enfants à 3 ans va permettre aux établissements privés d’ouvrir davantage d’écoles maternelles et ce avec le financement public des municipalités et en particulier dans les territoires déficitaires » est inexact sauf si votre présentation, à laquelle je souscris globalement sauf sur ce point, tend à faire de l’enseignement privé un outil pédago-macroniste responsable des déficits budgétaires des communes et qui « favorise sa propre mise en concurrence et, in fine, la privatisation progressive du service public d’éducation ». 
Etre laïc, ne signifie pas : tirer à boulets rouges sur l’enseignement privé sous contrat ; vouloir réveiller les fantômes de la guerre public-privé ou légitimer des querelles proches d’un Clochemerle postmoderne. Acceptons cette réalité structurelle française sans la diaboliser par ignorance. 

Réponse de Ph. Champigny

Merci d’avoir pris le temps de lire et de répondre à notre article à propos de la loi Blanquer. Nous ne nous attarderons pas sur les propos disqualifiants que vous utilisez à notre encontre : « républicanisme laïcard à la Clemenceau » ; « cynisme » ; « clochemerle » qui n’apportent rien à vos arguments.

Les faits sont têtus. L’école privée sous contrat est massivement financée par l’argent public :

–  Enseignants directement payés par l’État.

–  Frais de scolarité obligatoire financée par les municipalités.

D’ailleurs vous-même, vous dites  « Pour le secondaire, le financement procède de la répartition entre les établissements d’une enveloppe attribuée par le Ministère aux directions diocésaines. »

Concernant la « scolarisation à 3 ans et le privé », nous vous renvoyons à notre article et à : https://www.alternatives-economiques.fr/linstruction-obligatoire-a-trois-ans-va-couter-cher-aux-communes/00088901. (Une évaluation à 150 millions a été avancée par le CNAL et la FCPE.)

Sauf à considérer que les budgets seraient extensibles à volonté, l’argent public qui va à l’école privée ne va pas à l’école publique. Ce qu’il est nécessaire de comprendre , c’est que l’article de loi n’oblige pas la scolarisation à 3 ans mais l’instruction à trois ans ce qui n’est pas la même chose. Deuxièmement , c’est que 97,5 % des enfants sont déjà scolarisés avec une obligation de l’instruction à 6 ans. Donc, l’instruction obligatoire à 3 ans va entraîner l’extension de la loi Debré aux scolarisations existantes déjà de 3 à 6 ans. Et donc l’extension du financement public aux écoles privées confessionnelles et aujourd’hui, il y a plus d’argent par tête d’élève dans le privé (confessionnel à 97%) que dans l’école publique.

Alors oui, nous défendons l’école publique en tant que service public. Et c’est pour cela que nous luttons pour une école publique démocratique qui donne les moyens aux enfants des classes populaires d’accéder au plus haut niveau possible de savoirs et de qualifications.

Faut-il rappeler que l’école privée n’a pas le même recrutement sociologique que l’école publique (Cf. article du CREAL 76) ? Faut-il rappeler que les écoles privées peuvent choisir leurs élèves ? Aujourd’hui le mouvement réformateur néolibéral développe de plus en plus une école à plusieurs vitesses et l’école privée est sur le chemin de devenir petit à petit une école pour enfants des couches moyennes intermédiaires et supérieures et l’école publique, une école pour couches populaires.

Désolés, mais nous ne nous satisfaisons pas du financement public des structures privées. Pour nous l’école publique est la seule école de la République. Si l’école privée se développe, c’est largement à cause du sabotage de l’école publique mené par des ministres (dont leurs enfants sont souvent allés à l’école privée) qui n’ont jamais donné les moyens d’une école publique démocratique.

Donc nous rappelons le  slogan : FONDS PUBLICS, ÉCOLE PUBLIQUE. FONDS PRIVES, ÉCOLE PRIVÉE

 

Quitter la version mobile