Rappel du message reçu par la rédaction:
« Bonjour,
Suite à l’article sur l’attitude de la CGT lors de la manifestation du 1er mai je souhaiterais faire quelques remarques :
Nous ne devions pas être au même endroit que le chroniqueur. Lors de la charge latérale rue Vavin une autre charge policière frontale avait lieu, faisant refluer des centaines de manifestants vers le cortège initial de la manifestation. Les membres du service d’ordre de la CGT ont su, même dispersés, éviter un mouvement de panique qui pouvait faire craindre une multitude de blessés.
Il est vrai que des milliers de personnes se trouvaient devant la « corde » du cortège et que les charges de police se sont succédées. Là aussi le SO a fait le boulot et protégé les manifestants surpris par la violence.
Un point oublié par le chroniqueur est la violente charge policière que le SO a subit alors que son identification est connue des forces de police. Gaz, grenades de désencerclement, canon à eau, matraquage. Sifflé,hué par minorité de manifestants présents sur les trottoirs, l’attitude organisée du SO, son repli puis sa réorganisation ont été applaudis par les mêmes. Par la suite les responsables du SO ont réussi à sécuriser la manifestation jusqu’à son terme place d’Italie, malgré de nombreux gazages.
Votre chroniqueur a aussi manqué l’attaque en règle des véhicules de la CGT, les insultes, les agressions physiques, les coups de cutter contre les membres du SO en toute fin de manifestation.
Les images sont disponibles sur la toile.
André membre du SO; Mais ce n’est pas une surprise. »
La réponse d’Evariste :
Bonjour et un grand merci pour votre courrier.
Nous sommes très heureux de dialoguer avec un membre du SO de la CGT. Outre le fait de mettre en lumière le rôle du service d’ordre et de ses militants qui « mouillent la chemise » en se dévouant au service des autres, votre mail nous permet de revenir encore une fois sur cet épisode du 1er mai et d’en tirer des leçons politiques. Car la sécurité d’une manifestation est bien sûr un problème éminemment politique.
Tout d’abord, nous prenons acte de votre témoignage sur les incidents à l’ultime moment de la manifestation. Vous avez effectivement raison sur un point : notre chroniqueur n’est pas resté jusqu’à la toute fin de la manifestation place d’Italie car il est parti au moment de l’arrivée des ballons CGT à la hauteur de la mairie du 13ème.
En revanche, lorsque vous écrivez que « Par la suite les responsables du SO ont réussi à sécuriser la manifestation jusqu’à son terme place d’Italie », il doit s’agir de la partie proprement syndicale du cortège et non du cortège de tête, représentant les trois quarts de la manifestation. L’épisode des violences à la hauteur de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière montre bien l’absence de tout SO à ce moment.
À propos des charges policières au niveau du métro Vavin, nous partageons votre point de vue sur leur violence. Notez bien que notre article ne critiquait pas le SO mais bien la décision d’évacuer le secrétaire général Martinez et le fait que certains dispositifs syndicaux se soient retirés (totalement pour la FSU, partiellement pour la CGT et si nous avons bien vu des militants de FO, leur confédération a totalement disparu !).
Mais passons au problème de fond qui est celui de la protection des manifestations syndicales dans la conjoncture de violence systématique…et systémique de l’État. Car il s’agit bien d’une nouvelle conception du maintien de l’ordre qui a été mise en place, en particulier depuis le renvoi fracassant du Préfet de Police de Paris, Delpuech.
Il est clair que la police ne respecte plus aujourd’hui les règlements sur l’emploi de la force. Pour s’en convaincre, nous renvoyons nos lecteurs à l’excellent dossier du journal Le Monde en collaboration avec l’Association chrétienne pour l’abolition de la torture (https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/video/2019/05/16/violences-policieres-les-images-decryptees_5463052_4355770.html). Force est de constater également que l’IGPN (la « police des polices ») ne remplit plus son rôle, et qu’à notre connaissance, la justice n’a sanctionné aucun policier depuis le 17 novembre pour une éventuelle bavure. Bref, le concept même de « Police Républicaine » a-t-elle encore un sens depuis la « brutalisation » du mouvement social par la Macronie à laquelle nous assistons depuis 5 mois ?
Dans ce « moment politique », quel doit être le rôle du SO ? Il doit bien sûr éviter les provocations d’éventuels « casseurs » mais aussi, et c’est une grande nouveauté, se donner les moyens de protéger les manifestants contre la violence d’État. Cette attitude du SO nous ramènerait d’ailleurs à sa fonction d’origine dans la première partie du 20è siècle. Faut-il encore que les directions des centrales syndicales soient prêtes à assumer politiquement cette conjoncture et ce nouveau défi de l’État répressif. Cela exigerait deux qualités de ces directions : la détermination et le courage.
Bien à vous.
Evariste