Commençons par une bonne nouvelle : le mariage pour tous est passé ! Mais nous avons vu ce dont était capable la réaction : la connivence droite-extrême droite, la complaisance avec la violence des milices d’extrême droite, notamment religieuses. Ne nous y trompons pas : l’opposition au mariage pour tous est une première étape du rassemblement réactionnaire dans un pays où la gauche est minoritaire. Nous rappelons notre analyse du premier tour de la présidentielle de 2012 qui montre la gauche largement minoritaire et comment la victoire de François Hollande n’a été possible que parce la gauche s’est rassemblée et que les droites sont restés divisées.
Malheureusement, François Hollande n’a pas eu la stratégie voulue pour maintenir et développer le rassemblement de la gauche qui s’était réalisé au deuxième tour de la présidentielle. Pire, il a décidé un virage à droite en appliquant la politique du Medef, qui n’en demandait pas tant. Appliquant à la lettre la stratégie du club Terra Nova d’abandon des couches populaires ouvriers et employés (53 % de la population), il parie sur le fait que ces couches continueront à s’abstenir massivement (l’abstention est le premier choix de ces couches sociales loin devant les choix – dans l’ordre -FN, PS, UMP et Front de gauche en 5e position). Il parie sur la sur-mobilisation des couches moyennes intermédiaires (24 % de la population) et des cadres salariés (15 %). Mais cette stratégie présidentielle produit la désespérance et favorise la droite et l’extrême droite comme l’a montré l’élection partielle de l’Oise en mars 2013 (1)Nous l’avons écrit précédemment : Alors que la candidate socialiste a presque fait jeu égal en juin 2012 en perdant que de 63 voix au deuxième tour, elle a subi le syndrome jospinien de 2002 : elle est éliminée dès le premier tour au profit du Front national. Mais cette fois-ci ce dernier fait presque jeu égal avec la droite au deuxième tour malgré le soutien du PS au candidat UMP. Le candidat du Front de Gauche perd des voix tout en augmentant légèrement en pourcentage (+1,4 % pour finir à 6,4 %). .
François Hollande décide même de malmener la gauche de gauche. Il a donné 5 mois à la réaction pour mobiliser contre le mariage pour tous mais seulement trois semaines à la gauche de gauche pour déployer sa mobilisation tant sur le traité budgétaire que sur la « loi Medef » sur la sécurisation des licenciements. Celle-ci est donc obligé de se rebiffer. L’aile gauche du PS renâcle et Gérard Filoche, qui s’est bien battu contre la loi Medef sur la sécurisation des licenciements, a même été demandé comme conférencier par des assemblées citoyennes du Front de gauche ! Le Front de gauche décide de manifester le 5 mai pour la VIe République pour exprimer son ras le bol de la stratégie de François Hollande. Il sera rejoint par une minorité de militants d’EELV-les Verts.
Car sur le plan économique et social, c’est de pire en pire. Le numéro de 117 de Respublica a montré l’attaque en règle de la protection sociale par l’ordolibéralisme au pouvoir.
L’oligarchie capitaliste a d’abord tenté de régler la crise du capitalisme (baisse du taux de profit dans l’économie réelle) par le développement de la spéculation internationale. Puis, elle a réussi à enrayer l’écroulement bancaire et financier privé en faisant appel à l’argent public contrôlé par les amis des oligarques à la tête des États. La dette publique, déjà mise à mal par les cadeaux fiscaux aux rentiers et aux revenus des couches aisées et riches, s’est alourdie en venant sauver les institutions bancaires et financières internationales. Alors, pour financer la dette publique, les oligarques ont décidé que ce sont les salariés des couches populaires et des couches moyennes intermédiaires qui paieront la note via les politiques d’austérité. Ces politiques d’austérité basées sur la baisse des dépenses publiques ont comme conséquence de diminuer les recettes fiscales des États d’un montant supérieur à la baisse des dépenses publiques. L’effet multiplicateur joue à fond et oblige les oligarques à redoubler d’intégrisme dogmatique en demandant un nouveau tour de vis austéritaire.
Cette évolution touche la majorité des pays de la zone euro puisque nous savons aujourd’hui qu’entre mars 2011et septembre 2012, la dette de la zone euro a augmenté de 86 à 90 % et que les capacités de production baissent dans la plupart des pays européens.
Il est à noter que nous voyons de plus en plus l’intégrisme ordolibéral européen (version extrémisée du néolibéralisme mondial) verser dans la spirale austéritaire alors que les politiques des Etats-Unis, du Japon et des BRICS (pays émergents) sont moins extrémistes.
Il n’en faut pas moins aux économistes dits atterrés néo-keynésiens pour en appeler à une relance globale salariale et budgétaire. (2)Comme l’a analysé Michel Zerbato, le keynésianisme, qui tint le haut du pavé pendant les 30 glorieuses puis fut tant décrié, retrouve du lustre parce que ses mécanismes globaux de base, bien que schématiques, restent fonctionnels : l’austérité pèse sur une demande déjà atone et conduit inéluctablement à la récession puis à la déflation, au chômage et à la misère ; sa généralisation enclenche alors une spirale déflationniste (baisse des prix et hausse du chômage) car l’austérité des uns ferme les débouchés des autres. Comme s’il suffisait de le dire pour le faire ! Pour que cela marche (car une relance simple favoriserait principalement les pays industriels excédentaires), il faudrait allier la relance à une énorme augmentation de la demande des pays excédentaires (tels l’Allemagne), avec un néo-protectionnisme, etc.
Comme si l’Allemagne allait accepter de payer et comme si l’oligarchie allait faire ce cadeau au peuple. Alors pour l’instant, l’austérité ne permet pas de résoudre la crise, soit, mais continue à financer l’oligarchie. C’est tout ce qu’elle demande !
Nos néo-keynésiens oublient le moteur de l’histoire : la lutte des classes. L’oligarchie ne se laissera pas déloger par une stratégie « bisounours », elle n’écoutera pas plus les donneurs de conseils qui n’ont ni le pouvoir ni l’influence.
D’autres plus hardis nous décrivent le bout du chemin auquel ils nous convient mais sans nous dire quel chemin on doit emprunter pour arriver à cet éden ! Désobéissance européenne, réquisition de la banque de France, cotisation économique, soit, mais avec quelle majorité ? Quel soutien populaire ? Avec quelle bataille pour l’hégémonie culturelle ? Et avec quelle pratique sociale pour obtenir ce Graal ? Comment obtenir le soutien des couches populaires ouvriers et employés pour faire alliance avec les couches moyennes intermédiaires ?
Pour nous, le chemin est aussi important que le bout du chemin. Notre chemin, ce sont les luttes sociales des salariés et l’éducation populaire que nous sommes capables de produire dans ce cadre. Le reste, c’est pour la société du spectacle !
N’hésitez pas à demander les conférenciers de Respublica et du Réseau Education Populaire pour en débattre !
Notes de bas de page
↑1 | Nous l’avons écrit précédemment : Alors que la candidate socialiste a presque fait jeu égal en juin 2012 en perdant que de 63 voix au deuxième tour, elle a subi le syndrome jospinien de 2002 : elle est éliminée dès le premier tour au profit du Front national. Mais cette fois-ci ce dernier fait presque jeu égal avec la droite au deuxième tour malgré le soutien du PS au candidat UMP. Le candidat du Front de Gauche perd des voix tout en augmentant légèrement en pourcentage (+1,4 % pour finir à 6,4 %). |
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↑2 | Comme l’a analysé Michel Zerbato, le keynésianisme, qui tint le haut du pavé pendant les 30 glorieuses puis fut tant décrié, retrouve du lustre parce que ses mécanismes globaux de base, bien que schématiques, restent fonctionnels : l’austérité pèse sur une demande déjà atone et conduit inéluctablement à la récession puis à la déflation, au chômage et à la misère ; sa généralisation enclenche alors une spirale déflationniste (baisse des prix et hausse du chômage) car l’austérité des uns ferme les débouchés des autres. |