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Macron baisse en popularité mais accélère la cadence de la destruction des conquis sociaux. Où en est la résistance ?

Toutes les semaines, nous recevons des informations qui vont toutes dans le même sens. Celui de l’accélération de la cadence de la destruction des conquis sociaux mais aussi des prémisses des futures déflagrations, le tout embaumé dans une communication médiatique aux ordres de plus en plus sophistiquée.

Prenons un premier exemple : le président Macron dit clairement qu’il change de paradigme pour la politique de la ville en mettant de la police de proximité plutôt que de créer des MJC. Réprimer plutôt qu’instruire et éduquer. Le Figaro rapporte le propos suivant :  «Mais c’est vrai qu’avec cette réforme il y a un changement de paradigme, reconnaît-on dans l’entourage du chef de l’État. On a décidé d’aider les individus plutôt que d’implanter des MJC dans les quartiers.»

Autre sujet, mais même politique menée : après la pitrerie de la COP 21, voilà que les études de Global Carbon Project (1)https://www.carbonbrief.org/analysis-global-co2-emissions-set-to-rise-2-percent-in-2017-following-three-year-plateau montrent que les émissions de CO2 augmenteront de 2% en 2017 par rapport à 2016. Cherchez l’erreur.

Côté finances, si on lit l’étude trimestrielle de la banque centrale étasunienne (la Fed) (2)https://www.newyorkfed.org/newsevents/news/research/2017/rp171114 et http://libertystreeteconomics.newyorkfed.org/2017/11/just-released-auto-lending-keeps-pace-as-delinquencies-mount-in-auto-finance-sector.html, la dette totale des habitants des États-Unis (immobilier, prêts étudiants, cartes de crédit, prêts auto) a atteint 12 960 milliards de dollars au troisième trimestre 2017 contre 12 675 milliards de dollars en 2008 avant le krach bancaire. Cette montée de la dette des ménages est due à la montée des encours des prêts étudiants, des cartes de crédit et des prêts auto. Si les dirigeants s’estiment encore confiants, c’est que le taux de défaillances sur l’immobilier, qui pèse environ les 2/3 de la dette des ménages, reste encore faible (1,2%).

Mais le fort accroissement des crédits « subprime » (crédit à solvabilité faible) dans les prêts auto (24% sur 23 millions d’américains) inquiète lorsqu’ils sont liés à d’autres faiblesses sur d’autres crédits. En effet, les défaillances sont deux fois plus nombreuses dans le « shadow banking » (réalisé par les fabricants et les concessionnaires automobiles).

Stratégies d’accélération

Après les cinq ordonnances Macron qui contournent les syndicats pour détruire les conquis sociaux du code du travail, est engagée une tentative de nouvelle régression sur l’assurance-chômage, sur les retraites, sur la formation professionnelle. Mais aussi sur les services publics : fermetures de bureaux de poste et accélération de la transformation de la Poste en futur banquier, continuation de la mutation de la Sécurité sociale étatisée en socialisation des pertes sur les secteurs non rentables laissant les futurs profits aux banques et autres assurances privées qui agissent en prédateurs, etc.

Mais il y a accélération dans l’accélération. Le président Macron a lancé le CAP 22. Comprenez Comité d’Action publique 2022. Il s’agit pour la direction macroniste d’appliquer la stratégie de la grenouille chauffée par étapes au lieu d’augmenter fortement la température ce qui ferait réagir la grenouille et lui éviterait la mort.

CAP 22 veut faire ce que Sarkozy n’a pas réussi à faire après son élection de 2007, à savoir l’attaque frontale contre le statut des fonctionnaires et les services publics en tant que tels. Comme après la défaite de Juppé dans son attaque frontale contre les régimes spéciaux de retraite et les retraites des fonctionnaires en 1995, Fillon a réussi ce démantèlement dans la première décennie du 21ème siècle en les attaquant l’un après l’autre mais pas en même temps. Comme Horace contre les Curiaces !

L’attaque contre les services publics est prévue par étapes sur cinq ans. Le rapport du comité CAP 22 est rédigé par 34 personnes se recrutant chez les énarques macronisés, recyclés de l’ancien comité Attali crée par Sarkozy ou de l’Institut Montaigne accompagnés par d’anciens responsables de multinationales privées et quelques parlementaires néolibéraux. Si l’on déchiffre la novlangue d’Édouard Philippe, est sans aucun doute prévu l’affaiblissement des principes sociaux et républicains qui ont fondé la notion de services publics ; c’est une marche forcée vers le nouveau management privé des anciens services publics ainsi que de nouveaux « transferts au secteur privé voir des abandons de mission » comme notés dans sa lettre aux ministres de juillet 2017. Le tout avec une privatisation progressive de la fonction publique elle-même.

S’organiser

L’avantage pour le camp de la résistance et du progrès social est que nous connaissons le plan à l’avance. Mais est-ce suffisant pour que d’une part le peuple soit rapidement informé de tous ces desseins funestes, qu’il puisse développer sa conscientisation et sa puissance d’agir et pour que d’autres part, les organisations syndicales, politiques et associatives soient enfin à la hauteur des enjeux ?

Car disons-le, de ce point de vue, la riposte populaire, syndicale et politique n’a pas été à la hauteur des attaques pourtant incroyables contre le Code du travail. La journée du 16 novembre n’a pas été assez préparée pour que la grève soit réellement effective, ressemblant davantage à une mobilisation symbolique. Elle n’a pu s’inscrire dans  une démarche de grève générale reconductible, qu’il ne suffit pas d’appeler mais de préparer. Cette stratégie montre encore une fois sa limite : elle décourage plus qu’elle ne permet de gagner. Notons également l’initiative du 18 novembre organisée par le Front Social, qui n’a rassemblé que quelques milliers de personnes à Paris : si elle eu le mérite d’appeler à un affrontement plus clair avec le gouvernement, elle ne pourra pas à elle seule peser contre le gouvernement. Seule une véritable campagne unitaire et conséquente, avec des objectifs clairs, permettra de gagner.

Et oui, il va falloir faire plus que la simple distribution de tracts sur les marchés et des simples successions de manifestations saute-moutons sans préparation populaire massive préalable qui épuise et désespère le monde du travail. Oui, il faudra sans doute changer de logiciel de lutte, faire plus de formations des militants, enclencher l’articulation des luttes sociales et des initiatives d’éducation populaire refondée pour retisser les liens avec les masses populaires, et se poser collectivement (et pas dans l’entre soi plus ou moins radicalisé) la question des conditions d’une montée nationale massive sur Paris.

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