Ce slogan, repris dans les cortèges du 5 et du 10 décembre, pourrait bien résumer la situation dans le camp de la grève. Certes, l’entame du jeudi 5 a été une réussite grandiose, certes la région francilienne, cœur économique du pays, est en partie paralysée. Constatons également que l’Éducation nationale est à la pointe du combat et que le secteur hospitalier rentre progressivement dans la danse. Toutefois, examinons l’état du rapport de force avec réalisme, tout en restant optimistes : le trafic routier n’est pas touché par des barrages systématiques, les raffineries ne sont pas encore suffisamment perturbées pour imposer un régime sec en essence et gasoil et les transports en commun hors région parisienne sont certes impactés par le mouvement mais sans provoquer pour l’instant une paralysie des métropoles régionales. Bref, nous sommes encore loin d’une grève générale interprofessionnelle. Le mouvement tient aujourd’hui par l’acharnement des personnels de la SNCF et de la RATP. Disons-le clairement, cette conjoncture est dangereuse en soi. Il est essentiel que le « Front de grève » s’élargisse dans les jours prochains. Sinon les grévistes du rail se retrouveront progressivement isolés puis réduits.
Parlons clair : la généralisation de la grève est possible, ce n’est pas une utopie. Pour s’en convaincre, il suffisait de voir les cortèges du mardi 10 décembre. Partout en France, les manifestations ont été massives, offensives, pugnaces et suffisamment autodisciplinées pour éviter de tomber dans les provocations policières pourtant nombreuses.
« En face », dans le camp du capital financier – dans lequel entre parenthèses Delevoye s’est révélé être un pion au service du lobby des assurances –, le dispositif commence à se mettre en place. Après un début de semaine cacophonique et une couverture médiatique pro Macron incomplète, les rangs se sont de nouveau ressoudés ce mercredi. C’est bien sûr parce qu’Édouard Philippe sent que le « front de grève » est tangent qu’il abat quelques cartes de guerre sociale. Il pousse son offensive à tel point que même Laurent Berger de la CFDT rechigne à endosser le costume de Nicole Notat de 1995 ; c’est dire ! Car, ce mercredi, au milieu d’un discours aussi fumeux que d’habitude afin d’avancer masqué comme le veut la tactique adoptée par le pouvoir, le chef du gouvernement a annoncé tout simplement… la retraite à 64 ans ! En dehors de cela, il a tenu des propos lénifiants qui n’engagent pas et le maintien des propositions iniques comme le « point » calculé par un dispositif politique qui peut à tout moment bloquer la hausse indiciaire. Enfin, l’éternelle volonté de diviser, par génération, pour mieux régner est encore une fois à l’œuvre. Le couplet « Cette splendide réforme ne s’appliquera que pour les jeunes nés après 1975 » ne trompe personne. Le pouvoir veut que les quarantenaires et cinquantenaires décrochent de la grève, un point c’est tout !
Nous le répétons : face à ce défi, le « front de grève » doit impérativement s’élargir et se durcir. Les jeunes, premières victimes de la réforme, doivent bloquer les facs et les lycées et venir en renfort des piquets interprofessionnels.
Nous l’avons déjà affirmé et nous persévérons : seule la généralisation de la grève avec occupation des locaux et organisation efficace des piquets de grève peut faire pencher la balance en faveur du peuple, car les temps forts c’est tous les jours !
Seul le verrouillage des ronds-points stratégiques, des raffineries et des entrepôts logistiques peut ralentir suffisamment la production pour devenir dangereux pour la captation des profits capitalistes.
La journée du 12 décembre, qui est dédiée à des initiatives locales et régionales, peut justement servir à étendre le mouvement à la base partout en France, sur les rails mais aussi sur les routes ou encore dans les transports aériens.
Le seul mot d’ordre réaliste et efficace est : « Bloquer, bloquer, bloquer ! »
Vive la grève.