L’ADEME qui se présente comme « l’Agence de la transition écologique »
La nouvelle étude de l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, Ministère de l’Écologie), intègre les questions économiques mais pas la question sociale.
« Le parti pris dans cet exercice est de rester strictement sur une logique d’optimisation économique : il s’agit d’évaluer les trajectoires qui coûteront le moins cher pour la collectivité. En effet, l’aspect économique, s’il n’est qu’un des nombreux enjeux de la transition énergétique (…) joue un rôle particulier, car les choix politiques ne peuvent faire l’impasse sur l’évaluation de leur efficience d’un point de vue coût/bénéfice. Il est donc incontournable d’évaluer le coût des futurs énergétiques que nous envisageons. »
À partir de cette démarche, l’ADEME vient de publier un rapport (Transition(s)- 2050 – Choisir maintenant, agir pour le climat ), avec quatre scénarios :
scénario 1- Génération frugale ;
scénario 2- Coopération territoriales ;
scénario 3- Technologies vertes ;
scénario 4- Pari réparateur.
Elle précise : « C’est à l’heure où des décisions doivent être prises pour réduire drastiquement les émissions de GES que l’ADEME publie ses travaux en amont des délibérations collectives sur la future Stratégie Française Énergie-Climat (SFEC) et à la veille des débats de l’élection présidentielle de 2022. »
L’ADEME place ses scénarios dans les processus de transformation de la société avec des hypothèses différentes pour chacun d’entre eux. Il convient donc d’en examiner succinctement les contenus.
Scénario 1 – « Génération frugale »
« La transition est conduite principalement grâce à la frugalité par la contrainte et par la sobriété. » Elle implique : la sanctuarisation de la nature, la limitation drastique de constructions neuves et une rénovation rapide des bâtiments avec une transformation d’ampleur des modes de vie, transformation des résidences secondaires en résidences principales, 30 % de réduction des surfaces moyennes individuelles neuves et densification des logements, division par trois de la consommation d’électricité pour les usages spécifiques (électroménager, électronique, numérique, éclairage…) ; une production industrielle contractée et un marché réorienté vers le « made in France » avec une diminution des produits et des services, une économie de la fonctionnalité et de la réparation, privilégier les produits locaux, une relocalisation de certaines productions (70 % de l’acier, de l’aluminium, du verre, du papier carton, du plastique viennent du recyclage), une profonde transformation des habitudes alimentaires, diminution par trois de la consommation de viande, une agriculture plus extensive avec peu d’intrants de synthèse, une mobilisation raisonnée de la ressource forestière puits de carbone ; une mobilité réduite avec moins 26% de km parcourus (favoriser les modes actifs de déplacement, marche, vélo…) et 45 % de moins de trafics de marchandises. Ces mesures doivent aboutir à une division par deux de la demande énergétique globale.
Il n’est pas dit qui doit diminuer par trois sa consommation de viande ou d’électricité, ni comment en zone rurale on parcourt 20 ou 30 km pour se rendre au travail ou faire ses courses ; l’essentiel de « l’effort » est réparti sur les populations sans distinction riches ou pauvres, les modes de production ni les processus de travail ne sont pas interrogés, bref la question sociale est passée sous silence encore une fois. Il s’agit de mesures générales dans lesquelles riche et pauvres sont traités de la même manière.
Or pour ne s’en tenir qu’aux rejets de CO2, donc à l’utilisation de l’énergie, d’après Thomas Piketty (Le Monde du dimanche 14-lundi 15 novembre 2021), « En France, 50 % les plus pauvres ont une empreinte carbone d’à peine 5 tonnes par habitant, contre 25 tonnes pour les 10 % les plus riches et 79 tonnes pour les 1 % les plus riches » ; autrement dit les 1 % les plus riches – soit 670 000 personnes – ont une empreinte carbone seize fois plus forte que les plus pauvres, soit l’équivalent de 670 000 x16 = 10 720 000 pauvres.
T. Piketty souligne que « les solutions consistant à ratiboiser tout le monde au même taux, à l’image de la taxe carbone du début du quinquennat, n’ont pas de sens et ne pourront jamais être acceptées ». C’est pourtant ce qui est fait par ce scénario.
Aussi l’ADEME précise : « Mais les mesures contraignantes et la capacité à obtenir une implication de tous restent incertaines et font courir le risque de clivages forts voire violents au sein de la société. Par conséquent, les mesures sont autant que possible adoptées en priorisant une vision égalitaire de la transition. Les normes et valeurs évoluent vers une économie du lien plus que du bien, très ancrée sur les territoires et leurs ressources. La nature est sanctuarisée, ce qui conduit à une exploitation raisonnée. », mais nous avons du mal à voir où est la « priorisation d’une vision égalitaire de la transition ».
Par ailleurs, il n’est pas inintéressant de savoir que l’ADEME a participé début 2021 à l’élaboration d’une proposition par les Assises du climat, initiées par des «personnalités» autour de la Fondation pour le progrès de l’homme (FPH) avec des représentants des institutions européennes (Parlement, Commission) et d’institutions nationales comme l’ADEME. La proposition consiste à mettre en place des quotas individuels de carbone, avec réduction de 5 à 6 % par an pendant 30 ans, avec une «bourse carbone» pour échanger des parts de carbone, créant ainsi «une deuxième monnaie carbone», afin de passer de 11 000 tonnes de carbone émises par chaque Français en 2019 à 2 000 tonnes en 2050 pour obtenir la neutralité carbone, objectif fixé arbitrairement par les instances communautaires. Les restrictions de la demande se feraient automatiquement chaque année «sous la responsabilité des citoyens, la seule possible face aux urgences sur le climat» mais avec une « gouvernance » technocratique européenne, afin d’éviter que les alternances politiques puissent remettre en cause le processus. La neutralité carbone atteinte, les restrictions et les quotas devront subsister pour que les rejets ne repartent pas à la hausse.
Les questions de la sobriété en général et de la sobriété énergétique méritent donc un débat approfondi car elles touchent à des intérêts de classe, et ne peuvent se satisfaire de propositions à la cantonade sans préciser ce que cela implique notamment pour les classes populaires qui en supporteraient l’essentiel, la bourgeoisie continuant sur ses modes de vie prédateur. Nous pouvons donc nous demander si ces propositions de sobriété sans plus d’approfondissement ne sont pas une ruse des capitalistes relayée par leurs « chiens de garde » pour camoufler des politiques d’austérité pour la population afin de conserver leur mode de vie et leur position sociale, les questions climatiques et écologiques n’étant que secondaires et de toutes façons les restrictions à venir ne doivent pas les toucher ou à la marge.
Scénario 2 – « Coopérations territoriales »
« La société se transforme dans le cadre d’une gouvernance partagée et de coopérations territoriales. Organisations non gouvernementales, institutions publiques, secteur privé et société civile trouvent des voies de coopération pragmatique qui permettent de maintenir la cohésion sociale. »…… ; « Les transformations dans l’habitat (logements vacants réinvestis, espaces de partage et de convivialité), les habitudes de travail, l’alimentation, les déplacements ou la consommation sont de fait moins contraints que dans S1 mais marquent une rupture avec l’histoire récente. Nature et biodiversité sont appréhendées pour leur valeur intrinsèque. ». Le « Génie écologique » est mobilisé, l’équilibre entre échelons national et local en découle. « Les techniques de génie écologique sont développées : les services écosystémiques sont intégrés à tous les programmes de construction et de maintenance des infrastructures, les villes sont structurées par leurs trames écologiques. Les citoyens verdissent les espaces publics et privés, créant ainsi des couloirs de biodiversité. Ils se préparent collectivement à faire face aux chocs climatiques. »
En clair, la consommation de viande recule de 50 % par rapport à la consommation actuelle, ce qui permet une extensification des productions et une alimentation animale produite localement. Les pertes et gaspillages sont réduits de moitié. Les circuits de proximité deviennent la principale voie de commercialisation. La planification publique accompagne et finance une politique industrielle bas carbone, la réindustrialisation fait l’objet d’un effort important dans des secteurs ciblés, le recyclage est développé et valorisé. Les biocarburants avancés sont développés, la mobilité s’oriente vers plus de proximité avec, pour les marchandises, réduction des volumes et des distances avec une part plus grande du ferroviaire et du fluvial, moins 17 % de km parcouru par personne. Le mix énergétique est dominé par la biomasse avec une part non négligeable d’hydrogène, l’électricité est essentiellement décarbonée, avec une baisse de consommation de 53 % par rapport à 2015. Le mix de la consommation d’énergie finale est composé de 343 TWh d’électricité, 260 TWh de chaleur, 126 TWh de gaz et 42TWh de combustibles liquides.
C’est « la ville du quart d’heure» où tout (ou presque) est à proximité. Le partage des bâtiments, de pièces de vie ou d’équipements se généralise. En moyenne, environ 150 000 logements par an sont construits après l’optimisation de l’utilisation des locaux vides.
Ce scénario, à l’instar du précédent, est toujours basé sur la sobriété (mêmes questions : pour qui, comment?). Le scénario à énergie biocarburant est peu crédible. En fait le scénario est très proche du premier, mais au lieu de contrainte on vise la persuasion, par la politique du « nudge », afin que la population accepte la politique d’austérité.
Scénario 3 – « Technologie verte »
« C’est plus le développement technologique qui permet de répondre aux défis environnementaux que les changements de comportement vers plus de sobriété. De fait, les manières d’habiter, de se déplacer ou de travailler ressemblent beaucoup à celles d’aujourd’hui avec cependant quelques différences. Par exemple, l’alimentation est un peu moins carnée et plus équilibrée. La mobilité individuelle est prédominante mais avec des véhicules plus légers et électrifiés. L’industrie produit un peu moins en volume mais est très décarbonée »…. Les métropoles se développent. Les technologies et le numérique, qui permettent l’efficacité énergétique ou matière, sont dans tous les secteurs. Les meilleures technologies sont déployées largement et accessibles de manière généralisée aux populations solvables. » Les non solvables, ma foi…
« La mise en valeur du capital naturel permet de mieux préserver la nature qu’aujourd’hui: c’est en lui donnant un prix que l’on espère trouver les solutions techniques pour la protéger. L’État planificateur met en place des politiques fortes pour favoriser la décarbonation de l’économie, dans un contexte de concurrence internationale et d’échanges mondialisés ». En clair on ne change pas grand-chose.
Concrètement, la reconfiguration des métropoles implique un nouveau cycle de déconstruction (pour ne pas dire démolition) / reconstruction haussmannien, générant une consommation massive de ressources naturelles. L’innovation permet une meilleure efficacité des équipements. La recherche de l’efficacité prime pour la mobilité avec une hausse de 23 % de la demande de transport. Le mix énergétique est plus diversifié pour les marchandises, avec l’électricité pour les utilitaires et sur les axes d’autoroutes électriques, mais aussi le biogaz, l’hydrogène et les biocarburants. Les émissions directes de GES du secteur des mobilités baissent ainsi de 94% .
La nature est vue comme un ensemble de ressources à développer, utiliser et optimiser pour le bénéfice des humains, dans une relation de croissance mutuelle entre des écosystèmes naturels et une activité humaine intense dans tous les domaines de l’économie. Dans ce cadre, les technologies sont un moyen de connaissance, de suivi et de régulation des impacts du changement climatique. Les régimes alimentaires évoluent significativement sous l’effet d’un compromis entre des enjeux de santé et d’environnement et la recherche de plaisir individuel : moins 30 % de consommation de viande, plus 30 % de consommation de produits biologiques, hausse de la consommation de produits locaux.
Le mix de la consommation d’énergie finale est composé de 517 TWh d’électricité, 290 TWh de chaleur, 161 TWh de gaz et 36 TWh de combustibles liquides. Recours au captage et au stockage de CO2 sur des unités fonctionnant à la biomasse. La demande en hydrogène décarboné (à hauteur de 94 TWh en 2050) est principalement tirée par les usages industriels.
Très technologique, ce scénario se situe dans le prolongement des pratiques actuelles avec quelques inflexions de « greenwashing ». La publication des hypothèses et données de base annoncée sous forme de feuilleton pour 2022 nous permettra peut-être de mieux saisir la crédibilité de ce scénario pour atteindre la neutralité carbone en 2050.
Scénario 4 – « Pari réparateur »
« Les modes de vie du début du XXIe siècle sont sauvegardés. Les appareils sont très prisés dans la maison pour cuisiner, alerter, régler (lumière, énergies), sécuriser. Les applications sont très développées notamment pour s’alimenter (sainement) ou se déplacer (efficacement). Mais ce foisonnement de biens consomme beaucoup d’énergie et de matières avec des impacts potentiellement forts sur l’environnement. » Ce scénario est la fuite en avant du modèle de société et des modes de vie des plus riches qui sont présentés comme le mode de vie idéal à atteindre pour tous.
Dans ce scénario, la maîtrise technique de la nature par les hommes devient un objectif de « résilience », autrement dit l’exploitation des ressources naturelles s’accentue, l’extractivisme est développé, la consommation d’énergie explose. L’incertitude des événements climatiques contribue à la création d’un gigantesque marché assurantiel de la protection individuelle contre les conséquences du changement climatique, tout est marchandisé.
La principale évolution des régimes alimentaires repose sur l’inclusion, encore faible, de protéines alternatives comme les viandes de synthèse ou les insectes. De fait, l’élevage et les systèmes agricoles intensifs, dominés par les systèmes conventionnels raisonnés (70 % des exploitations), sont majoritaires. L’agriculture utilise toutes les technologies pour optimiser sa production et limiter ses impacts, mais consomme environ 65 % d’eau d’irrigation de plus qu’aujourd’hui. Le paysage sylvicole s’en trouve modifié en profondeur, avec des coupes massives avant 2030 suivies par un reboisement en résineux, soit une dégradation très forte de la biodiversité.
Les grandes villes et l’artificialisation des sols se développent en lien avec la recherche d’un «toujours plus» de confort et de sécurité. La technologie s’invite autant dans l’industrialisation de la rénovation des bâtiments ou l’efficacité énergétique des équipements, que dans la mobilité, les kilomètres parcourus augmentent de 39 % sous l’effet d’une hausse des voyages à longue distance, en particulier aériens et d’une recherche constante de vitesse. La voiture individuelle garde une place centrale.
La décarbonation de l’industrie est focalisée sur le captage et stockage géologique de CO2, dans un univers où consommation et mondialisation s’intensifient. Au bilan, les consommations énergétiques de l’industrie ne se réduisent que de 19 % en 2050, induisant un recul de 54 % des émissions de GES avant captage, avec une forte électrification et recours massif aux importations, mais 45 % de l’acier, mais aussi de l’aluminium, du verre, du papier-carton et des plastiques viennent du recyclage ; les data centers consomment 15 fois plus d’énergie qu’en 2020.
La question sociale
Quand nous parlons de question sociale, nous ne parlons pas « d’acceptabilité sociale », de mesures restrictives ou surenchérissant le coût de la vie avec quelques compensations financières, de plus insuffisantes, pour faire justement accepter aux classes populaires des politiques néolibérales et l’austérité en faisant temporairement la part du feu. Vouloir faire la bifurcation écologique avec l’acceptabilité sociale, c’est vouloir la laisser au marché, c’est-à-dire ne pas la faire réellement.
Lutter contre les dérèglements climatiques et la crise écologique provoqués par un système capitaliste prédateur tourné non vers le bien-être des populations mais vers la réalisation de profits maximum dans le plus court délai possible, avec un système social qui exploite les humains et la nature jusqu’à épuisement, ne peut pas s’effectuer en maintenant ce système ou en le rafistolant. Transition énergétique, bifurcation écologique et question sociale sont le même combat, la même chose, chaque disposition prise doit répondre à ces trois objectifs qui se superposent. Le processus qui consisterait comme le prônent ceux qui parlent d’acceptabilité sociale à prendre une mesure dite écologique et ensuite une mesure sociale souvent dérisoire pour éviter des secousses sociales est voué à l’échec du point de vue écologique et social. Il ne peut avoir comme effet que de maintenir les politiques néolibérales voire accentuer leurs effets les plus délétères pour les populations, afin de préserver les intérêts de la bourgeoisie oligarchique.
Par ailleurs c’est n’avoir rien compris au mouvement des gilets jaunes de fin 2018/2019, non complètement éteint à ce jour, ou aux grèves en Guadeloupe et Martinique de novembre dernier. L’acceptabilité sociale ne peut être un objectif pour la gauche. Les problèmes de salaire, donc de répartition de la plus-value créée uniquement par le travail, entre les travailleurs et les actionnaires, de conditions de travail, de dignité et de liberté, sont des questions écologiques au même titre que les gaz à effet de serre, la biodiversité ou le mix énergétique.
En résumé ce sont des questions qui mettent en jeu des intérêts contradictoires entre classes sociales, qui forment un tout. La lutte de classe n’est pas estompée par les problèmes climatiques ou identitaires, au contraire elle en est exacerbée.
En guise d’étape dans les débats
Toutes ces études examinées conjointement, nous donnent à voir dans leur diversité et les solutions qu’elles proposent l’ampleur des questions auxquelles nous confronte la question énergétique. Et encore toutes les facettes n’en sont pas abordées, la question technologique et scientifique pour voir comment elles peuvent être mises en œuvre n’est pas discutée, elle est pourtant essentielle et rejoint les problèmes concrets sociaux.
Par ailleurs, la question des limites physiques (liées aux lois de la physique, notamment les lois de la thermodynamique et des limites de la ressource sur terre) ne sont pas prises en compte. En cela toutes ces études demeurent dans l’idéologie économique et sociale dominante, bien exprimé par Milton Friedman, économiste étasunien ultralibéral, « nobélisé » qui interrogé par un journaliste sur « l’illusion de la disponibilité sans limite du pétrole », répond : « Pourquoi une illusion ? Pardonnez-moi, mais ce n’est pas limité d’un point de vue économique : vous devez séparer l’économie du point de vue physique des choses ».
Une approche anthropologique et démographique est aussi indispensable tant l’espèce humaine est invasive et tend à grignoter les habitats des autres espèces vivantes.
La dimension européenne doit également faire partie de ce débat pour plusieurs raisons : les réseaux électriques des États membres sont interconnectés et les décisions prises par les États voisins ont des implications forte sur les réseaux des États voisins, la réglementation et la normalisation européennes conditionnent les politiques des États pour une grandes part, l’Europe est un acteur économique et normatif majeur au niveau mondial et se veut à la tête du combat climatique et écologique, quasiment toute la réglementation et législation sur l’environnement en France trouve sa source dans la réglementation européenne.
Peu abordée dans ce texte cette dimension de la politique énergétique est pourtant essentielle, par exemple c’est sous l’impulsion communautaire, décidée avec l’accord explicite des gouvernements français, que les secteurs de l’électricité, du gaz, des transports… ont été libéralisés ces 30 dernières années. Une politique énergétique en adéquation avec les objectifs fixés par l’UE elle-même de neutralité carbone en 2050 exige de modifier toute la législation communautaire sur ces sujets et de revenir à des politiques publiques tournées vers l’intérêt général et des communs et non vers le marché, avec des services publics refondés.
Elles nous disent aussi la pauvreté du débat politique et médiatique sur le « mix-énergétique » quand il est réduit à l’opposition entre nucléaire et renouvelables quand ce n’est pas éolien. En fait elles nous montrent qu’il n’y a pas de solution idéale ou magique, les lois de la physique nous obligent, les solutions techniques et technologiques aussi importantes soient-elles conditionnent aussi, même implicitement nos choix ; car il s’agit bien de choix politiques qui doivent être aussi éclairés que possible dans des débats qui prennent toutes les dimensions du problème, un débat holistique.
La sobriété tellement mise en avant dans cette période, qu’elle soit heureuse, contrainte, souhaitée ou acceptée après campagne de « nudge », n’est qu’une version douce, euphémisée des restrictions qui sont promises au peuple, restrictions qui en fonction des rapports de force entre classes sociales risquent fort de camoufler des politiques la poursuite des privilèges et modes de vie des couches les plus riches de la société. Après le « il n’y a pas d’autre solution » des néolibéraux et ordo-libéraux pour faire accepter les politiques en faveur des actionnaires et l’augmentation des inégalités qui en résulte, il ne faudrait pas que nous tombions dans le « il n’y a pas d’autre solution » en raison des problèmes climatiques et environnementaux avec un « TINA » (there is no alternative) écologique en somme, une nouvelle religion écologique remplaçant ou plutôt articulée à la religion et aux dogmes néolibéraux. Les questions écologiques aujourd’hui sont trop importantes pour les laisser entre les mains des seuls partis politiques, se réclameraient-ils de l’écologie.