Le traitement par la presse des grèves est différent selon qu’elles se déroulent sur le sol britannique ou français. Dans un cas, le grève serait légitime, car ce serait la « punition » ou la sanction pour avoir osé quitter l’Union européenne. Ce Brexit, qu’on en pense du bien ou du mal, serait la source unique des difficultés que vivent les Britanniques et légitimerait les puissants mouvements revendicatifs outre-Manche.Pour ce qui concerne les mouvements sociaux en France, il semblerait qu’ils se résument à la SNCF et aux contrôleurs. Certains commentateurs ont du mal à cacher ce qu’ils ont en travers de la gorge : grâce à un bras de fer avec les dirigeants de la SNCF et les ministres, ils ont obtenu gain de cause à savoir la création d’un poste de « directeur métier du bord » pour traiter en amont les problèmes, la création de 200 postes, la garantie d’une promotion tous les quatre ans et l’augmentation de la prime spécifique annuelle des ASCT (agent de service commercial trains). Les reproches faits à ce mouvement se sont faits souvent sous la forme de raillerie : vacances signifient grèves à la SNCF. Jamais ou presque jamais, les raisons de la colère ne sont présentées. En filigrane, est mis en avant que ce serait pour embêter les gens. Ces thuriféraire de la soumission à l’ordre établi oublient un principe de base : une grève qui ne dérange personne n’a aucune chance d’obtenir satisfaction. Il est plus facile de taper sur les agents de la SNCF en les faisant passer pour des nantis qui ont empêché les grands-parents de passer Noël avec leurs petits-enfants. Ils proposent, dans la foulée de piétiner la démocratie sociale qu’ils ont en horreur au travers de la mise en œuvre d’une restriction du droit de grève en l’interdisant comme en Italie en périodes de fêtes ou de grandes migrations. Ils évitent de parler des multiples mouvements qui se déroulent en France comme dans l’éducation le 17 janvier ou dans d’autres secteurs de production ou de services.
Dans le secteur de la santé en France
Les grèves des laboratoires privés qui n’ont jamais été autant bénéficiaires grâce à la pandémie, les grèves des médecins libéraux qui sont en partie responsables ou coresponsables de la situation précaire de la santé publique ne relèvent pas du tout de la même légitimité. La grève des médecins apparaît pour ce qu’elle est : une grève « Courchevel », entre Noël et Nouvel an, de vrais nantis avec une revendication qui, selon les études, porterait le salaire moyen des généralistes à 15 000€/mois. Rien d’étonnant qu’elle apparaisse comme foncièrement incomprise au regard de la situation des hospitaliers qui constatent que 80 % des appels et consultations concernent la médecine générale. Ces mêmes hospitaliers doivent faire face, avec des moyens insuffisants, à la recrudescence du virus du Covid, du virus de la grippe et de la bronchiolite enfantine(1)La situation critique à l’hôpital et les liens avec la médecine générale et libérale interpellent. En effet, l’ONDAM (Objectif national des dépenses de l’Assurance maladie) qui définit l’enveloppe globale des dépenses à ne pas dépasser est strictement appliquée dans le service public car plus facilement contrôlable et moins dans le privé et la médecine dite de ville. Ainsi, les services hospitaliers publics doivent réduire encore plus leurs dépenses pourtant indispensables pour que l’équilibre prévu par l’ONDAM soit respecté. La politique de santé française qui allie remboursements publics par la Sécurité sociale et médecine libérale pose problème.. Le ministre de la Santé affirme que cette grève est malvenue dans ces circonstances. Ce faisant, il oublie que cette situation critique et délétère provient de décennies de suppression de postes et, en conséquence, de lits pour accueillir dans la dignité pour des soins de qualité les malades. La situation de la santé et des hôpitaux en particulier en général en France apparaît pour ce qu’elle est et, ce, bien avant les diverses pandémies, catastrophique. Les diverses mesures d’austérité budgétaire font que les hôpitaux sont à l’os au point que la médecine française qui nous était enviée dans le monde entier pour ses performances accessibles à toutes et tous quelle que soit la situation de fortune des patients fait pâle figure. Ce qui est pire est qu’elle s’enfonce vers une médecine à deux vitesses, une pour les pauvres et une pour les riches ou celles et ceux qui peuvent se payer une mutuelle de qualité. La médecine qui devait tenir à distance les lois de marché ou s’en émanciper comme c’était l’objectif du Conseil national de la résistance est devenue un objet de profits pour les grands laboratoires pharmaceutiques privés, une marchandise comme une autre. La question de la mise en œuvre d’une Sécurité sociale intégrale qui rembourse à 100 % se pose et, ce, d’autant plus qu’elle serait neutre financièrement en réalisant des économies avec notamment l’interdiction des dépassements d’honoraire, avec une onéreuse publicité des assurances privées et mutuelles devenues inutiles et des frais de gestion moindre passant de 20 à 25 % des assurances à plus ou moins 5 % pour la Sécurité sociale.
Passent également à la trappe des médias dominants ou mainstream les mouvements sociaux qui fleurissent dans les autres pays de l’Union européenne.
Quelle est la part de Brexit dans la situation britannique ?
En revanche, les commentateurs, si prompts à vilipender les grèves en France, font preuve de mansuétude à l’égard des syndicats britanniques ou, à tout le moins, des mouvements qu’ils initient. Il est question, outre-Manche, d’un hiver de « mécontentement » en référence aux grèves massives qui avaient marqué le Royaume-Uni dans les années 1970. Le niveau de l’inflation qui atteint les 11 % n’est pas étranger à l’émergence de ce mouvement ainsi que le recul de 0,2 % du produit intérieur brut (PIB) au troisième trimestre de 2022. Près d’un million et demi de travailleurs ont rejoint ce mouvement historique avec les cheminots, les agents de la Royal Mail (la poste), les infirmiers, les ambulanciers, les bagagistes de certains aéroports. Ce mouvement atteint un tel niveau que le gouvernement se voit contraint de faire appel à l’armée pour éviter trop de blocages. Les analystes ultralibéraux pointent du doigt comme principal responsable de la baisse du pouvoir d’achat et de la hausse du prix de l’énergie le Brexit ou la sortie de l’Union européenne alors que toute l’Europe est impactée par les conséquences de la crise due à la pandémie et de la crise de l’énergie à la suite de l’invasion russe et des sanctions vis-à-vis de la Russie. La population se voit, pour les plus démunis, contrainte de pratiquer le système D pour faire face, de se rendre dans des salles communales chauffées, car certains sont dans l’incapacité de régler leur facture d’électricité. Certes les promesses d’avant Brexit formulées par Boris Johnson n’ont pas été tenues quant aux retombées positives sur le secteur de la santé déjà fragilisé. Il avait été promis « de réinvestir les 350 millions d’€ envoyés chaque semaine à l’Union européenne dans le système de santé britannique. Mais depuis, il n’y a jamais eu d’investissements massifs dans ce secteur. » D’où la situation actuelle(2)Dixit Thibaud Harrois, maître de conférences en civilisation britannique.. Un autre analyste, Marc Lenormand(3)Maître de conférences en études anglophones à l’Université Paul-Valéry de Montpellier. fait remonter à 2008 l’origine de ces mouvements sociaux d’ampleur : « Après la crise financière de 2008, les salaires ont fortement chuté dans le privé et dans le public du fait de politiques d’austérité budgétaire menées par les partis conservateurs. Dans les années 2010, on parlait beaucoup de l’identité nationale et de la sortie britannique de l’UE. Maintenant qu’elle ne se pose plus, on revient à la question sociale et au rôle que L’État doit jouer dans l’économie. »
C’est ainsi que ces politiques austéritaires se sont traduites par une baisse de pouvoir d’achat dans certains secteurs de près de 20 %, ce qui explique et justifie la revendication d’une hausse de 19 %.
La stratégie du nouveau premier ministre, Rishi Sunak, au-delà de ses bourdes en matière de communication, qui consiste à appliquer la ligne conservatrice des années Thatcher ne fonctionne plus comme dans les années 1980. La vague de grève, très populaire au sein de la population britannique qui ne peut étonner que les observateurs enfermés dans leur tour d’ivoire ultralibérale et leur théorie que Jacques Généreux qualifie de déconnomie, est symptomatique de la situation sociale et économique.
Le gouvernement britannique demeure ferme dans son refus d’ouvrir un dialogue social digne de ce nom, pratique une communication hors sol comme nous avons pu la subir en France enjoignant les Britanniques à ne pas prendre de risques (dixit le ministre de la Santé), à ne pas trop boire, à ne pas conduire, à ne pas faire de sport. L’inflexible Premier ministre, pour sortir de son image de pro-riche, s’est fendu d’une remarque à un sans-abri qu’il servait, digne en cela des actions de dame patronnesse, en lui demandant s’il travaillait dans les affaires. C’est emblématique d’un mépris de classe du même acabit que certains propos présidentiels hexagonaux.
La situation dans l’Union européenne n’est pas plus florissante
Se focaliser sur une seule cause, le Brexit, relève de la manipulation pour faire croire qu’il n’y a point de salut hors des traités européens. C’est faire oublier qu’en France, sans parler des autres pays membres de l’Union européenne, la situation est critique. Pour ne prendre que quelques exemples emblématiques, nous pouvons évoquer l’afflux constaté dans les lieux de solidarité tenus par les Restos du cœur, le Secours populaire, Caritas… ou encore le nombre de sans-abris parmi lesquels, chiffre effarant dans une République qui se veut sociale et laïque, 42 000 enfants sans toit(4)Selon le SAMU social, l’UNICEF et Santé publique France, en août 2002, étaient dénombrés 42 000 enfants vivant dans des hébergements d’urgence, des abris de fortune ou dans la rue. L’association Jamais sans toit dénonce le fait que des femmes qui viennent d’accoucher sont remises à la rue avec leur nouveau-né. Le projet de loi de finance pour 2023 n’arrangera pas la situation en menaçant les 14 000 places d’hébergement pourtant insuffisantes..
Quant à la hausse exorbitante des tarifs de l’énergie, les entreprises françaises ne sont guère préservées. Depuis 2016, elles ne bénéficient plus du tarif réglementé de l’électricité. De plus les nouveaux contrats font passer du tarif moyen de 50€/MWH à un tarif vingt fois supérieur. La presse s’est même fait l’écho d’une boulangère qui vu sa facture passer de 1 600 € en décembre 2022 à 15 000 € en janvier 2023.
L’appartenance à l’Union européenne ne prémunit pas les habitants et les entreprises ainsi que leurs employés contre une détérioration de la situation sociale. Certes le Brexit peut être présenté comme un facteur aggravant la cause première, que ce soit au Royaume-Uni ou au sein de l’Union européenne. Cette cause première réside dans la mise en œuvre d’un système économique ultra-libéral dont les principes favorisent les inégalités sociales, la misère, la pauvreté, le chômage. Ainsi, « le royaume de l’argent (détenteurs de capitaux) est […] un empire, c’est-à-dire un espace affranchi des lois nationales. » Cet empire fragilise les solidarités au sein des Nations. La libre circulation du capital financier permet à ses propriétaires d’exercer un chantage permanent à la délocalisation des investissements pour obtenir une organisation du travail, des méthodes de management, une réglementation et une fiscalité qui maximisent le taux de rendements du capital. Telles des métastases, ces contraintes du capitalisme actionnarial et financier se diffusent dans les PME et ETI qui sont souvent des sous-traitants des multinationales, dont les produits sont en concurrence sur un marché mondial ouvert, qui doivent présenter des taux de rendements exorbitants pour espérer emprunter des fonds auprès de leur banque ou sur le marché financier… Cela infuse même les institutions et services publics à qui sont imposées l’organisation du travail et les méthodes de gestion conçues pour les firmes privées. Les mutuelles, elles-mêmes, de par l’ouverture au marché et à la concurrence se voient contraintes de renoncer au principe de solidarité sociale, notamment entre générations, qui devrait fonder leur gestion. Tout cela contribue grandement à empêcher les possibilités de réindustrialisation et à réduire l’efficacité des services publics et explique, plus que le Brexit ou pas, la montée des mouvements sociaux.
Le cléricalisme économique de la finance(5)De même qu’en matière de religion il y avait un cléricalisme religieux, et il y en a encore un, qui accorde une position dominante dans la société au clergé, il y a, avec le capitalisme financier, une doxa qui impose des normes économiques qui conduisent à la marchandisation de tous les aspects d’une société et pousse à intégrer dans le système concurrentiel des secteurs jusque-là épargnés, du moins en France avec le programme des Jours heureux au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, comme la santé publique, les transports comme la SNCF, la gestion publique de l’énergie avec le démantèlement d’EGF (Électricité et Gaz de France) avec la privatisation de GDF et le découpage d’EDF en secteur commercial, secteur hydraulique, secteur nucléaire, le démantèlement des PTT avec la privatisation des télécommunications, l’enseignement avec la concurrence des établissements privés. Cela s’accompagne d’une désorganisation volontaire des services publics pour mieux faire accepter leur éventuelle privatisation puisqu’ils ne fonctionnent plus correctement du fait d’un défaut de moyen et l’intrusion d’un new management ultralibéral. Les clercs de cette nouvelle religion économique ultralibérale se recrutent parmi le personnel politique, les journalistes des journaux aux mains des puissances d’argent. Cette nouvelle religion tend à imposer à l’ensemble de la société ses normes faisant de chacun et chacune d’entre nous de parfaits consommateurs qui pour être dans la norme doivent consommer comme les croyants, autrefois, devaient prier et écouter les prêches. Autrefois les religions imposaient leur définition de ce que serait la « vie bonne », la bonne façon de se comporter… En résumé c’est ce que nous pouvons entendre par « cléricalisme économique » qui est tout autant liberticide que l’ancien cléricalisme religieux. De même, le cléricalisme étatique et collectiviste de l’ex-Union soviétique était tout autant liberticide. a réussi à imprégner les esprits d’une trop grande partie de nos concitoyens que le système économico-politique capitaliste, c’est-à-dire le pouvoir essentiel accordé aux propriétaires et gestionnaires du capital, serait socialement positif. La réalité, du moins avant l’ultralibéralisme des années Thatcher et Reagan, montre que les aspects positifs relèvent principalement d’une volonté politique et d’une pression forte des forces populaires pour circonscrire ou limiter ce pouvoir par des réglementations et une redistribution plus juste des fruits de la croissance. Cette volonté politique et cette pression des forces populaires, il faut bien le reconnaître, n’est plus à la hauteur des enjeux notamment du fait de la désunion syndicale.
Cause principale : l’application d’une théorie économique hors sol
Plutôt que de se lamenter sur les grèves et les désagréments qui en résultent, il serait plus approprié de s’interroger sur ce qui fait que le recours aux arrêts de travail s’impose.
En bonne gestion économique, toutes celles et ceux qui interviennent dans le processus de production, détenteurs de capitaux, ouvriers, employés de tous grades ou niveaux devraient s’attacher à :
- redonner consistance et autonomie aux collectifs de travail en accordant confiance à leurs capacités d’organisation et d’adaptation ;
- intéresser chaque collectif à ses propres résultats comme à la performance globale de l’entreprise favorisant la coopération entre les individus et services ;
- valoriser la détection des problèmes et des erreurs à la base et la délibération sur les solutions ;
- donner à chaque équipe les moyens pour atteindre ses objectifs tout en prévenant et évitant les catastrophes susceptibles d’arriver en raison de défauts.
Un tel modèle aurait pu améliorer les relations de travail en favorisant l’implication de toutes et tous dans le processus de production, la prise de responsabilité, l’autonomie en contrepartie d’une participation des salariés aux prises de décision, aux résultats collectifs et d’une activité plus valorisante.
Le capitalisme actionnarial vise à s’accaparer les résultats ou les fruits de la croissance et non pas à optimiser la valeur globale de l’entreprise au bénéfice de toute la société humaine. Le capitalisme actionnarial pour asseoir sa domination préfère la mise en œuvre d’une ligne managériale qui doit :
- obérer la capacité des salariés à négocier avec la direction, détruire les collectifs de travail, alimenter la rivalité entre salariés, individualiser les rémunérations, instaurer la peur du licenciement ;
- asseoir l’arbitraire du partage inéquitable des revenus de l’entreprise ;
- décourager la détection des problèmes en sanctionnant le salarié « lanceur d’alerte » par un déclassement ou une évaluation négative ;
- réduire les moyens matériels et humains mis à disposition pour atteindre les objectifs car toute réussite pourrait signifier un excès de moyens matériels et humains.
Avec ce new management qui infuse l’ensemble des lieux de production y compris les services publics comme celui des transports, regretter les mouvements de grève qui seraient inopportuns ou malvenus, par exemple à la veille des départs en vacances, relève de la tartufferie de haut vol. Que ce soit au Royaume-Uni où ce système a été le plus loin dans son application ou dans les pays de l’Union européenne dont la France, le résultat est que les négociations ne peuvent se dérouler sereinement dans un tel cadre et que les arrêts de travail s’imposent.
Commission européenne : plus de souplesse dans l’application des critères de Maastricht
La grande crainte des dirigeants des gouvernements européens et de la Commission de Bruxelles est de voir le mouvement exemplaire qui traverse le Royaume-Uni s’étendre à toute l’Union européenne. Pour cela, elle admet plus de souplesse dans l’application des critères dits de Maastricht afin d’élargir la marge de manœuvre des différents gouvernements pour faire face aux luttes et éviter une confluence entre tous les mouvements sociaux au sein de l’EU qui leur donneraient une dimension européenne.
Notes de bas de page
↑1 | La situation critique à l’hôpital et les liens avec la médecine générale et libérale interpellent. En effet, l’ONDAM (Objectif national des dépenses de l’Assurance maladie) qui définit l’enveloppe globale des dépenses à ne pas dépasser est strictement appliquée dans le service public car plus facilement contrôlable et moins dans le privé et la médecine dite de ville. Ainsi, les services hospitaliers publics doivent réduire encore plus leurs dépenses pourtant indispensables pour que l’équilibre prévu par l’ONDAM soit respecté. La politique de santé française qui allie remboursements publics par la Sécurité sociale et médecine libérale pose problème. |
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↑2 | Dixit Thibaud Harrois, maître de conférences en civilisation britannique. |
↑3 | Maître de conférences en études anglophones à l’Université Paul-Valéry de Montpellier. |
↑4 | Selon le SAMU social, l’UNICEF et Santé publique France, en août 2002, étaient dénombrés 42 000 enfants vivant dans des hébergements d’urgence, des abris de fortune ou dans la rue. L’association Jamais sans toit dénonce le fait que des femmes qui viennent d’accoucher sont remises à la rue avec leur nouveau-né. Le projet de loi de finance pour 2023 n’arrangera pas la situation en menaçant les 14 000 places d’hébergement pourtant insuffisantes. |
↑5 | De même qu’en matière de religion il y avait un cléricalisme religieux, et il y en a encore un, qui accorde une position dominante dans la société au clergé, il y a, avec le capitalisme financier, une doxa qui impose des normes économiques qui conduisent à la marchandisation de tous les aspects d’une société et pousse à intégrer dans le système concurrentiel des secteurs jusque-là épargnés, du moins en France avec le programme des Jours heureux au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, comme la santé publique, les transports comme la SNCF, la gestion publique de l’énergie avec le démantèlement d’EGF (Électricité et Gaz de France) avec la privatisation de GDF et le découpage d’EDF en secteur commercial, secteur hydraulique, secteur nucléaire, le démantèlement des PTT avec la privatisation des télécommunications, l’enseignement avec la concurrence des établissements privés. Cela s’accompagne d’une désorganisation volontaire des services publics pour mieux faire accepter leur éventuelle privatisation puisqu’ils ne fonctionnent plus correctement du fait d’un défaut de moyen et l’intrusion d’un new management ultralibéral. Les clercs de cette nouvelle religion économique ultralibérale se recrutent parmi le personnel politique, les journalistes des journaux aux mains des puissances d’argent. Cette nouvelle religion tend à imposer à l’ensemble de la société ses normes faisant de chacun et chacune d’entre nous de parfaits consommateurs qui pour être dans la norme doivent consommer comme les croyants, autrefois, devaient prier et écouter les prêches. Autrefois les religions imposaient leur définition de ce que serait la « vie bonne », la bonne façon de se comporter… En résumé c’est ce que nous pouvons entendre par « cléricalisme économique » qui est tout autant liberticide que l’ancien cléricalisme religieux. De même, le cléricalisme étatique et collectiviste de l’ex-Union soviétique était tout autant liberticide. |