Références : loi n°73-1195 du 27/12/73 ; loi n°81-64 du 28/01/81 ; Ordonnance n°82-271 du 26/03/82 ; Ordonnance n°86-948 du 11/08/86 ; loi n°87-423 du 19/06/87 ; loi n°91-1 du 3/01/91 ; loi n°93-1313 du 20/12/93 ; loi n°2000-37 du 19/01/2000 ; loi n°2003-47 du 17/01/2003 ; loi n°2004-391 du 4/05/2004 ; loi n°2005-841 du 26/07/2005 ; loi 2008-789 du 20/08/2008 ; ANI du 11 janvier 2013
Avant 1973, le « temps partiel » n’était pas autorisé par la loi.
En 1973, par un gouvernement de droite mais quelques années après 1968, il a été institué de la même façon, juridique, qu’en 1936 les 40h : un volontariat collectif dans l’entreprise, avec accord des représentants du personnel ou de l’inspection du travail, des horaires fixes, sur la semaine, sans heures complémentaires.
Il a ensuite progressivement, et d’une façon presque linéaire, été mis en place avec des conditions de travail de plus en plus précaires pour les salariés. Pour mesurer ces reculs et également (en étant gentil) l’amnésie de ceux qui, aujourd’hui, vont répétant, pour ne pas parler du fond, que le contrat vaut mieux que la loi, il est utile de citer des extraits de l’exposé des motifs de l’ordonnance de mars 1982, sans oublier qu’à cette date, le rapport de forces pour les salariés était pourtant bien supérieur à celui d’aujourd’hui : « La loi n°81-64 du 28 janvier 1981relatice au temps partiel… a soulevé lors de sa promulgation la réserve, si ce n’est l’hostilité de la quasi-totalité des organisations syndicales. Ce texte présente en effet un certain nombre de lacunes quant aux droits et garanties dont devraient bénéficier les salariés à temps partiel…..Les modifications apportées ….ont notamment pour objectif de prévenir les abus auxquels pourraient donner lieu le recours systématique à des heures complémentaires au-delà de l’horaire de base prévu par le contrat de travail….De même est-il prévu que, s’il s’avérait que dans certaines branches de professions le travail à temps partiel se pratiquait dans des conditions telles qu’il apparaîtrait nécessaire d’en assortir le recours de garanties allant au-delà de celles que met en place par ailleurs la présente ordonnance, qu’il soit possible par décret pris après consultation des organisations d’employeurs et de salariés intéressées et au vu des résultats d’éventuelles négociations de préciser les modalités de recours au temps partiel les mieux adaptées pour remédier à cette situation. »
1/ Procédure de mise en place
1973 : Des « horaires de travail réduits » ne peuvent être applicables qu’ « aux seuls salariés qui en font la demande », avec « l’accord » des représentants du personnel (CE ou, à défaut, DP) ou, en l’absence d’accord ou en l’absence de représentants du personnel, ils peuvent être « autorisés » par l’inspecteur du travail.
1981 : le temps partiel peut être « proposé » aux salariés de l’entreprise « qui demandent à en bénéficier » ou, à défaut, aux « demandeurs d’emploi », après « avis » des représentants du personnelet information de l’inspecteur du travail, ou simple information de l’inspecteur du travail en l’absence de représentants du personnel. (1981)
1982 : des horaires de travail à temps partiel (nommé aussi « temps choisi » pour marquer la volonté de faire la différence avec la réalité imposée par les employeurs) « peuvent être pratiqués » après « avis » des représentants du personnel et information de l’inspecteur du travail, ou simple information de l’inspecteur du travail en l’absence de représentants du personnel.
1986 : du travail à temps partiel avec des périodes d’inactivité (appelé « travail intermittent ») peut être mis en place par un accord collectif étendu.
1991 : le temps partiel peut être mis en place « à l’initiative du chef d’entreprise » ou « à la demande des salariés ». Dans ce dernier cas, les modalités de mise en place peuvent être fixées par un accord collectif étendu.
1993 : le « travail intermittent » est abrogé mais remplacé par un succédané, le « temps partiel annualisé »
2000 : le travail à temps partiel peut être mis en place par un simple accord d’entreprise. Ou, en l’absence d’accord d’entreprise, après « avis » des représentants du personnel transmis à l’inspecteur du travail et, s’il n’y a pas de représentants du personnel, « à l’initiative du chef d’entreprise ou à la demande des salariés » par simple information de l’inspecteur du travail.
2000 : le « travail intermittent » est réintroduit et peut cette fois être mis en place par un simpleaccord d’entreprise.
2008 : le temps partiel dit « modulé » est abrogé et remplacé par le temps partiel « aménagé » plus flexible…
2013 : le temps partiel peut être mis en place par accord collectif
2/ Horaires collectifs ou individuels :
De 1973 à 1981, il semble, au vu de la rédaction du texte de 1973, que la mise en place d’horaires de travail réduits dans les entreprises ne concerne que des horaires collectifs, et pour les seuls salariés de l’entreprise.
3/ Période de calcul de la durée du travail (semaine, mois, année)
1973 : rien n’est prévu car, dans la logique de l’époque, le temps de travail, depuis 1936, est compté àla semaine et de la même façon pour tous.
1981 : la semaine, mais pas forcément la même durée pour tous, car la durée hebdomadaire figure au contrat de travail du salarié
1982 : la semaine ou le mois
1986 : l’année pour le travail dit « intermittent » par accord collectif étendu
1993 : la semaine, le mois, ou l’année pour le « travail intermittent » abrogé et transformé en temps partiel annualisé)
2000 : la semaine, le mois, ou l’année (pour celle-ci, il y a à la fois le temps partiel annualisé et le « travail intermittent » par simple accord d’entreprise)
2008 : la semaine, le mois, ou l’année (le temps partiel « modulé » est remplacé par le temps partiel « aménagé »)
2013 : la semaine, le mois ou l’année
4/ Programmation, répartition, délai de prévenance
1973 : la répartition des heures sur la semaine n’est pas prévue, les heures sont sans doute réparties, comme pour le temps complet, de façon égale et il n’y a pas de modification exigeant un délai de prévenance
1981 : la répartition des heures sur la semaine est prévue par le contrat de travail, écrit. La loi ne prévoit pas de délai de prévenance, les modifications de répartition ne sont donc pas prévues
1982 : répartition prévue par le contrat de travail sur les heures de la semaine ou sur les semaines du mois ; conditions de la modification prévues au contrat de travail ; délai de prévenance de 7 jours au moins
1986 : pour le travail « intermittent », le contrat de travail prévoit la répartition sur l’année de périodes travaillées et non travaillées ; la répartition des heures de travail à l’intérieur des périodes travaillées ; et, si ces répartitions ne sont pas prévues au contrat de travail, un accord collectif étendu détermine « les conditions dans lesquelles le salarié peut refuser les dates et horaires de travail qui lui sont proposés »
1993 : répartition par le contrat de travail sur la semaine ou sur le mois ; répartition sur l’année de périodes travaillées et non travaillées ; la répartition des heures de travail à l’intérieur des périodes travaillées ; conditions de la modification de la répartition ; délai de prévenance de 7 jours au moins
2000 : répartition par le contrat de travail sur la semaine ou sur le mois ; pour le « travail intermittent »,répartition sur l’année de périodes travaillées et non travaillées ; répartition des heures de travail à l’intérieur des périodes travaillées, et, pour les secteurs où ces répartitions ne seraient pas possibles, un simple accord d’entreprise détermine « les conditions dans lesquelles le salarié peut refuser les dates et horaires de travail qui lui sont proposés » ; délai de prévenance en cas de modification de pas « moins de 7 jours » ou pas moins de 3 jours par accord collectif étendu
2008 : répartition (pour les salariés à temps complet et à temps partiel) par accord collectif d’entreprise, ou à défaut par accord de branche, de la durée du travail de la semaine à l’année, etdes conditions de la modification; à défaut d’accord collectif, répartition par décret ; délai de prévenance pour la durée et les horaires fixé à 7 jours, ou moins par accord d’entreprise, ou à défaut par accord de branche.
2013 : outre la répartition et le délai de prévenance, plusieurs mesures pourront être prévues par accord collectif de branche ou d’entreprise
5/ Plancher
1973 : la moitié du temps légal, soit 20 heures
1981, 1982 : pas de plancher
1982 : pas de plancher
1986 : pas de plancher sur l’année pour le « travail intermittent »
1991, 1993 : pas de plancher
2000 : pour le temps partiel, plancher fixé par accord d’entreprise, mais pas moins que les 2/3 de la durée prévue au contrat de travail
2000 : pour le « travail intermittent », pas de plancher
2008 : pas de plancher
2013 : l’ANI dit prévoir un plancher de 24 h par semaine, qui est en fait une passoire (dérogations pour les particuliers employeurs, pour les salariés de moins de 26 ans, et surtout pour tous les salariés qui en feront la « demande »…)
6/ Plafond
1973 : les 3/4 du temps légal, soit 30 heures
1981 : la durée légale, soit 40 heures
1982 : en principe les 4/5 de la durée légale pour le contrat de travail (32 heures), mais avec des heures complémentaires, la durée légale (39h)
1986 : pour le « travail intermittent », la durée minimale annuelle plus 1/4.
1993 : la durée légale (39 heures) ou, pour le temps partiel annualisé, la durée minimale annuelle (qui peut aller jusqu’à 4/5ème de la durée légale) plus 1/3
2000 : pour le temps partiel, la durée légale (39 heures) ou, par accord collectif étendu, la durée prévue au contrat plus 1/3 ; pour le temps partiel annualisé, par accord d’entreprise, pas plus que la durée prévue au contrat de travail plus 1/3.
2000 : pour le « travail intermittent », la durée minimale annuelle plus 1/3 et même plus si « accord du salarié »…
2008 : deux textes contradictoires : L.3123-7 (pas de plafond, les dispositions sur les heures supplémentaires s’appliquent en cas de dépassement de la durée légale sur une semaine, ou, en cas d’annualisation, de dépassement des limites fixées par l‘accord collectif) ; L.3123-17 (plafond durée légale 35h)
2013 : l’ANI, en prévoyant qu’un accord de branche étendu des « compléments d’heures » lorsque « le salarié et l’employeur en conviennent », ne donne pas de plafond
7/ Les interruptions d’activité dans la journée
De 1973 à 1993 : pas prévu
2000 : pour le temps partiel, limitation par la loi à une interruption d’activité dans la journée et durée de l’interruption limitée à deux heures, sauf si un accord collectif de branche étendu le prévoit
2000 : pour le « travail intermittent », pas prévu
2003 ; un simple accord d’entreprise permet d déroger à la limitation à une seule interruption de deux heures maximum
2013 : l’ANI prévoit que, par accord de branche, il pourrait y avoir plus d’une interruption d’’activitéet que leur durée pourrait être supérieure à deux heures
8/ Nombre d’heures complémentaires
1973 : aucune
1981 : dans la limite de la durée légale, donc beaucoup puisqu’il n’y avait pas de plancher
1982 : maximum un tiers de la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue au contrat, dans la limite de la durée légale
1986 : pour le « travail intermittent », un quart de la durée minimale annuelle, mais sur la semaine, rien n’empêche que la durée légale soit dépassée ; en ce cas, la jurisprudence considère que les heures au-dessus de la durée légale soient considérées comme des heures supplémentaires
1993 : dans le cadre du temps partiel annualisé, il est possible de faire des heures complémentaires (et même supplémentaires) dans la limite du 1/10ème de la durée annuelle prévue au contrat et même d’1/3 de cette durée (qui peut être égale à 4/5ème de la durée légale) par simple accord d’entreprise
2000 : pour le travail à temps partiel, 1/10ème de la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue au contrat de travail, dans la limite de la durée légale ou 1/3 de la durée prévue au contrat si un accord collectif étendu le prévoit ; pour les contrats conclus sur la base de la loi de 1993, celle-ci reste en vigueur mais les heures au-dessus du 1/10ème doivent être majorées de 25%.
2000 : pour le travail intermittent, le nombre d’heures complémentaires (ou supplémentaires) possible est indéterminé, car le maximum d’1/3 au-dessus de la durée minimale annuelle peut être dépassé avec l’ « accord du salarié »
2013 : les « compléments d’heures » par accord de branche ne permettent pas de fixer un plafond aux heures complémentaires
9/ Intégration des heures complémentaires dans le contrat de travail
1973 : sans objet
1981 : pas prévu
1982 : intégration dans le contrat de travail si pendant 12 semaines consécutives, l’horaire réel a dépassé d’au moins deux heures par semaine ou l’équivalent par mois
2000 : pour le temps partiel sur l’année, intégration dans le contrat de travail si l’horaire réel moyen sur l’année est supérieur à celui prévu par le contrat de travail
2000 : rien de prévu pour le « travail intermittent »
2008 : intégration dans le contrat de travail si – pendant 12 semaines consécutives ou pendant 12 semaines au cours d’une période de 15 semaines ou sur la période (qui peut être l’année) prévue par un accord d’entreprise de modulation – l’horaire réel a dépassé d’au moins deux heures par semaine ou l’équivalent par mois
2013 : rien de prévu dans l’ANI
10/ Paiement des heures complémentaires
1973 : sans objet
Jusqu’en 2000, pas prévu, donc sans majoration
2000 : pour le travail à temps partiel, les heures au-delà du 1/10ème de la durée prévue au contrat doivent être payées avec une majoration de 25%
2000 : pour le « travail intermittent », rien n’est prévu, donc pas de majoration, sauf si on est dans le cas d’heures supplémentaires
2013 : la rédaction floue de l’ANI et son avant-projet, plus clair, laisse présager que, contrairement au progrès apparent qui est le paiement d’une majoration de 10% pour les heures au-delà du 1/10ème ,possibilité serait laissée aux employeurs, par accord collectif, de ne payer les majorations qu’à 10% au lieu de 25% pour les heures comprises entre le 1/10ème et le tiers au-dessus de la durée prévu au contrat. Globalement, un recul.
11/ Rémunération indépendante de l’horaire réel
De 1973 à 1986 : rien
1986 : pour le « travail intermittent », un simple accord d’entreprise peut prévoir que la rémunération mensuelle est « indépendante de l’horaire réel », ce qui peut revenir à faire une avance à son employeur
2000 : pour le temps partiel comme pour le « travail intermittent », un simple accord d’entreprise peut prévoir que la rémunération mensuelle est « indépendante de l’horaire réel »