ReSPUBLICA rappelle souvent que toutes les formes de racisme exigent la même condamnation et que le racisme anti-juifs (terme que nous préférons à antisémitisme) en fait partie. Nos lecteurs savent aussi que nous critiquons les Indigènes de la République sur les distinguos qu’ils opèrent en la matière (voir en particulier ces textes de 2015 et de 2016 sur le PIR).
Lors de la période récente où la montée des actes anti-juifs a été démontrée en France, la gauche dite « décoloniale » a décidé de ne pas rassembler place de la République mais à Ménilmontant. Sur la base d’un texte tourné quasi uniquement sur l’instrumentalisation gouvernementale du rassemblement place de la République et en minimisant de façon éhontée la montée du racisme anti-juif dans notre pays. Ce rassemblement a vu une bonne partie de la mouvance communautariste « décoloniale » autour des Indigènes de la République : l’UJPF, la direction d’Attac et du NPA (même si une fronde a eu lieu au sein du conseil scientifique d’Attac contre la décision de la direction).
Un article de la revue Vacarme (« le non sujet de l’antisémitisme à gauche ») cite Albert Herszkowicz, fondateur de Mémorial 98 selon lequel déjà en 2009 « l’UJPF, la LCR, le Mrap, avaient refusé de manifester pour protester contre l’assassinat d’Ilan Halimi sous prétexte… que la police n’aurait pas établi le caractère antisémite du meurtre ».
Le 6 mars 2015 à Saint-Denis se réunissaient des organisations comme l’UOIF ou les Indigènes de la République, connues pour leurs dérives communautaristes, voire pour leur complaisance vis-à-vis des folies ethnicistes, c’est assez logique. Plus étonnant est de constater que s’associaient à cette initiative des associations comme Attac, des syndicats et des partis ou des mouvements tels que EELV – qui s’est finalement retiré -, le PCF, Ensemble (FDG), le NPA, comme s’ils pouvaient cautionner des amalgames qui font le jeu des apprentis sorciers.
Par la suite le MRAP a refusé le slogan « Non au philosémitisme d’État » des Indigènes de la République : « Ce slogan désigne les Juifs comme les privilégiés de la République. Il alimente la thèse antisémite d’une mainmise de leur part sur l’appareil d’État et s’inscrit dans les fantasmes complotistes de Dieudonné, entre autres.» (Non au philosémitisme d’État : un slogan indigne ! Déclaration du Bureau exécutif du MRAP, 7 avril 2015).
La mouvance dite « décoloniale » mélange dans un « antisionisme » déclaré aussi bien une juste critique de la politique coloniale du gouvernement israélien qu’un abject combat pour la destruction de l’Etat israélien. Elle mélange aussi une juste critique de l’instrumentalisation de l’antisémitisme par le Crif avec une abjecte position sur le soi-disant « philosémitisme d’Etat ».
S’allier aux Indigènes de la République, c’est soutenir les thèses antisémites, racistes, racialistes, anti-féministes, homophobes de Houria Bouteldja, porte-parole du PIR dans son dernier livre dont rien que le titre devrait faire sursauter « Les blancs, les Juifs et nous ». (1)Un florilège sur la question féminine (Source : Les Blancs, les Juifs et nous)
« Il faudra deviner dans la virilité testostéronée du mâle indigène, la part qui résiste à la domination blanche »
« C’est moins la réalité de la domination masculine qui pose problème que sa déshumanisation ».
« J’en viens à préférer les bons gros machos qui s’assument. Je vous le dis mes sœurs, il faut trancher dans le vif. Quand les hommes de chez nous se réforment sur injonction des Blancs, ce n’est pas bon pour nous. Parce qu’en fait, ils ne se réforment pas. Ils font semblant.
« Nous reprocher de ne pas être féministes, c’est comme reprocher à un pauvre de ne pas manger de caviar. »
« La critique radicale du patriarcat indigène est un luxe. Si un féminisme assumé devait voir le jour, il […] passera obligatoirement par une allégeance communautaire. Du moins aussi longtemps que le racisme existera. »
« Je partage les rênes de ma vie avec [ma mère], et avec toute ma tribu. De toutes façons, si je les leur avais retirées, je les aurais données aux Blancs. Plutôt crever. »
« Les hommes doivent apprendre à nous respecter et comprendre notre sacrifice comme nous comprenons la nécessité de les protéger. »
Elle, qui semble croire que la seule chose susceptible d’attirer les femmes racisées hors d’une communauté prétendument close est la séduction de l’homme banc, nous adjure de nous en garder. Car, celle qui s’y risquerait, « quoi qu’il arrive, [subira] l’opprobre. Alors pourquoi prendre ce risque ? »
« Mon corps ne m’appartient pas. Aucun magistère moral ne me fera endosser un mot d’ordre conçu par et pour des féministes banches. »
« Pour moi, le féminisme fait effectivement partie des phénomènes européens exportés. »
Nous disons clairement au sujet de la dernière agression contre Alain Finkielkraut que, même si nous critiquons les idées de ce philosophe, nous nous devons de combattre avec la plus grande véhémence l’acte antisémite qu’il a subi. Pour n’importe quel racisme, notre première réaction doit être de nous y opposer, avant de parler de leur instrumentalisation par d’aucuns.
Il est de plus abject de rendre les juifs collectivement responsables d’une politique gouvernementale israélienne. Notre position sur le conflit du Proche-Orient reste marquée par le projet de “deux peuples, deux Etats” que ce soit dans la variante Beilin-Rabbo ou dans celle de Nusseibeh-Ayalon. Comme ce n’est pas possible avec un gouvernement israélien d’extrême droite au pouvoir, nous devons donc chaque fois que faire se peut, critiquer la politique du gouvernement Netanyahu comme obstacle à la paix au Proche-Orient.
De PIR en pire : le mouvement réactionnaire des Indigènes de la « République »
La politique racialiste du PIR justifie la critique des gilets jaunes à cause de « la frontière raciale qui persiste entre les deux ».Ces gilets jaunes sont « principalement des Gilets Blancs, autant dans leur composition sociale que dans leurs revendications », écrit un militant du PIR sur leur site. Lors du rassemblement de Ménilmontant, voici ce qu’a dit Houria Bouteldja, la principale porte-parole du PIR : « Enfin, nous ne manifestons pas à République car nous refusons de nous associer à un gouvernement et à toute la chaîne de complicité autour de lui, à commencer par la cohorte des partis d’opposition comme le PCF, la FI ou Ensemble qui, capitulards ou tétanisés, s’associent à une marche orchestrée par un pouvoir qui tente aujourd’hui de criminaliser l’antisionisme et réhabiliter le délit d’opinion en France. Nous refusons de nous associer à ceux qui sur la scène internationale dansent le tango avec Netanyahou… ». Elle a aussi écrit : « Les juifs sont les boucliers, les tirailleurs de la politique impérialiste française et de sa politique islamophobe. »
Non seulement le titre du livre de Houria Bouteldja, Les blancs, les juifs et nous. Vers une politique de l’amour révolutionnaire (sic), rompt avec l’universalisme émancipateur révolutionnaire, mais son contenu est un contenu raciste, homophobe et anti-féministe. Sans compter sa complaisance avec l’intégrisme de l’islam politique. Que ce mouvement ait de l’influence dans de nombreuses organisations syndicales et politiques de la gauche dite radicale est l’une des raisons (quoique malheureusement pas la seule) de l’incapacité de cette gauche syndicale et politique à jouer son rôle de ferment du bloc historique nécessaire pour combattre le mouvement réformateur néolibéral et son futur allié en cas de crise paroxystique, l’extrême droite sous toute ses formes.
Sans cordon sanitaire contre ce cancer dans toutes les organisations qui veulent engager un processus de transformation sociale et politique émancipateur , la gauche sera exclue de la représentation populaire et laissera se faire la bataille centrale entre le dispositif macroniste et l’union des droites autour du Rassemblement national. Déjà, le mal est profond car la gauche ne représente aujourd’hui que 25 % des suffrages exprimés et le syndicalisme dit de lutte a été coiffé par la CFDT devenue premier syndicat du pays. Le processus de division de la gauche par les communautaristes (dont les Indigènes de la République sont le cœur actif) est une des causes importantes de la descente aux enfers de cette gauche. Bien sûr, l’antidote pour fédérer le peuple reste la liaison du combat laïque et du combat social (voir www.combatlaiquecombatsocial.net ).
Le racisme, l’anti-féminisme et l’homophobie de Houria Bouteldja mis au jour
C’était sur un plateau de télévision en 2016 : « Je pense que ce qui a changé, c’est qu’il y a une partie de l’antiracisme, et ça me fait beaucoup de peine de dire ça, qui est devenue raciste ! Je parle de vous, madame Bouteldja », entame Thomas Guénolé en montrant une photographie sur laquelle apparaît Houria Bouteldja, pouce en l’air et sourire aux lèvres, à côté d’une pancarte où on peut lire : “Les sionistes au goulag”. Il commente : « Ça signifie au sens strict que les juifs favorables à l’existence d’Israël doivent être envoyés dans des camps de concentration ».
Puis, la voix posée, il assène : “Par ailleurs, vous êtes raciste, madame !” et cite un passage du livre précité de Houria Bouteldja : “La blanchité est une forteresse, tout blanc est bâtisseur de cette forteresse”, y écrit la militante. Décryptage de Guénolé : “‘Tout blanc’, c’est une généralisation fondée sur la couleur de la peau. La généralisation fondée sur la couleur de la peau, surtout pour un propos négatif, c’est du racisme, madame“. Pire : “Si une femme noire est violée par un noir, c’est compréhensible qu’elle ne porte pas plainte pour protéger la communauté noire” (Déjà en 2015, elle disait : “L’idéologie selon laquelle les couples mixtes, la rencontre entre deux cultures, c’est beau, c’est pourri”.) Réplique de Thomas Guenolé : “Donc les noirs avec les noirs, les Arabes avec les Arabes, les blancs avec les blancs. D’un point de vue technique, pour suivre votre idée, il faudrait faire des lois raciales”.
Sur l’homosexualité, il cite encore : “Comme chacun sait, la tarlouze n’est pas tout à fait un homme. Ainsi, l’Arabe qui perd sa puissance virile n’est plus un homme“.
Remplacer la lutte des classes par la lutte des races
Bouteldja répond : “Je ne vais pas m’étendre, puisqu’une partie des citations de monsieur Guénolé sont parfaitement vraies et je les assume. Simplement, il va falloir lire le livre pour se faire une idée de la précision avec laquelle j’utilise un certain nombre de concepts… Le clivage de race est un clivage qui n’est pas assumé, ou ne veut pas être vu, au prétexte que la race n’existant pas, on ne peut pas s’attaquer… La race n’existant pas, on ne peut pas la faire exister… Voilà. On crée du racisme en pointant du doigt l’existence des races sociales qui sont en réalité un produit de l’Histoire et du pouvoir“.
Tout était dit déjà.
Notes de bas de page
↑1 | Un florilège sur la question féminine (Source : Les Blancs, les Juifs et nous) « Il faudra deviner dans la virilité testostéronée du mâle indigène, la part qui résiste à la domination blanche » « C’est moins la réalité de la domination masculine qui pose problème que sa déshumanisation ». « J’en viens à préférer les bons gros machos qui s’assument. Je vous le dis mes sœurs, il faut trancher dans le vif. Quand les hommes de chez nous se réforment sur injonction des Blancs, ce n’est pas bon pour nous. Parce qu’en fait, ils ne se réforment pas. Ils font semblant. « Nous reprocher de ne pas être féministes, c’est comme reprocher à un pauvre de ne pas manger de caviar. » « La critique radicale du patriarcat indigène est un luxe. Si un féminisme assumé devait voir le jour, il […] passera obligatoirement par une allégeance communautaire. Du moins aussi longtemps que le racisme existera. » « Je partage les rênes de ma vie avec [ma mère], et avec toute ma tribu. De toutes façons, si je les leur avais retirées, je les aurais données aux Blancs. Plutôt crever. » « Les hommes doivent apprendre à nous respecter et comprendre notre sacrifice comme nous comprenons la nécessité de les protéger. » Elle, qui semble croire que la seule chose susceptible d’attirer les femmes racisées hors d’une communauté prétendument close est la séduction de l’homme banc, nous adjure de nous en garder. Car, celle qui s’y risquerait, « quoi qu’il arrive, [subira] l’opprobre. Alors pourquoi prendre ce risque ? » « Mon corps ne m’appartient pas. Aucun magistère moral ne me fera endosser un mot d’ordre conçu par et pour des féministes banches. » « Pour moi, le féminisme fait effectivement partie des phénomènes européens exportés. » |
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