Il est grand temps d’en finir avec la résignation. Résignation politique devant le pouvoir de la finance internationale, résignation politique devant une banque centrale européenne aux ordres de la troïka, résignation politique devant les enjeux sociétaux et devant une démocratie à bout de souffle, résignation politique imposée au nom d’un sacro-saint réalisme porté par les auto-proclamés bien pensants qui, parce qu’ils sont justement « réalistes » affirment détenir l’unique solution.
Nul besoin dès lors d’imaginer autre chose, c’est comme ça, un point c’est tout ! L’apragmatisme est devenu indicateur de l’intelligence et, puisque tout le monde est contaminé, l’épidémie d’aboulie passe inaperçue.
Car s’il est impossible de changer les choses, s’il est illusoire d’imaginer un autre monde, s’il est chimérique de vouloir guérir alors à quoi bon donner son avis ? À quoi bon agir ? Il est bien plus préférable de maugréer chez soi. De devenir égoïste. D’avoir peur. De haïr. Préférable de ne plus réfléchir. Préférable de ne plus se sentir concerné. Être résigné et attendre qu’ils continuent de choisir pour nous.
Mais sont ils à la hauteur des enjeux ?
Manifestement pas.
La droite, celle dite gaulliste, est devenue minoritaire. Copé, Sarkozy, Buisson, Peltier et consorts ont fait sauter les dernières digues entre l’extrême droite et l’UMP. Chantres du libéralisme économique sauvage il n’y a pas de place dans leur programme pour les plus faibles. C’est marche ou crève ! C’est aide toi et le ciel t’aidera ! C’est le culte de la sécurité et de l’endoctrinement. Le dogme de la communication qui dissimule l’aporie. Résignés !
Le Parti socialiste, ou plutôt parti socio-démocrate, a peur. Il a une tendance schizophrène. Coincé, écartelé entre ses racines d’idéal, d’internationale et la mode du politiquement réaliste. Il a fait un choix. On ne change plus le monde. On l’aménage à doses homéopathiques. Pourquoi ? Parce que c’est sérieux au parti socialiste et que les gens sérieux, désormais, ne rêvent pas ! Les rêveurs, il y en a encore, sont minoritaires.
On voit où tout cela nous mène. Non seulement la misère et le chômage ne faiblissent guère mais il est de surcroît interdit de rêver à la transformation sociale. Sauf bien sur à se faire taxer d’idéologue, d’extrémiste ou… de doux rêveur. Vous rêviez d’un traité européen modifié ? D’une lutte acharnée contre la finance ? D’une présidence normale ? Ils voudraient bien mais ne peuvent point ! Résignés ! Mais convaincus qu’il n’y a pas d’autre politique plus juste à mener que la leur.
Les Verts ? Courant du parti évoqué précédemment. On les écoute quand la télévision veut qu’on les écoute. On est d’accord avec eux quand ça explose. On les aime bien. Leurs leader sont la feuille de salade qui décore l’assiette socialiste. Elle colore un peu pour cacher le côté indigeste du plat traditionnel.
Le Parti communiste ? Ils ont besoin d’argent pour ne pas mourir et cet argent provient de leurs élus. Plus il y a d’élus, plus les subventions tombent. Pour avoir plus d’élus il faut faire preuve d’acrobaties et ainsi dire aux socialistes qu’on est avec eux en disant à la plèbe qu’on y est pas. Faire vivre le parti l’emporte sur les idéaux. La base voudrait bien agir mais l’appareil n’est pas à la hauteur des enjeux.
Le NPA, c’est les pavés ! Pourquoi pas en effet. À la violence institutionnelle et financière tolérée par le plus grand nombre pourrait s’opposer la violence révolutionnaire. Déconstruire par l’émeute et attendre de voir qui prendra les commandes… Certes, pas de résignation au NPA mais l’envie d’agir vite pour démolir un système oppresseur. L’intention est bonne. La méthode n’a rien de républicaine.
Le Parti de gauche, quant à lui, a enchaîné une communication pertinente lors de la dernière présidentielle avec une communication catastrophique il y a quelques mois. L’intelligence des propos a laissé place au « parler dru et au parler cru ». Le rêve et la construction courageuse d’un monde plus juste se sont laissés dériver, avec l’aide des médias, vers la case « utopie » de l’échiquier politique. Utopie se définissant par « réalisation impossible » il est désormais urgent de repenser le positionnement. Le Parti de gauche ne peut être personnifié, quel qu’en soit le talent de son fondateur, et il ne peut rester à l’orée de la situation en attendant son heure et en se complaisant de l’entre soi. La qualité de ses débats, de ses propositions et de ses acteurs devrait en faire la seule alternative possible mais dans ce monde de communication, il communique fort mal. Le rêve, ce n’est pas l’utopie ! Il ne faut jamais laisser les résignés décrédibiliser les rêves.
Le Front national est le parti de la peur et de la haine. Le mariage de la sottise et de la cruauté qui enfantent le fascisme. Il faut l’interdire ! Le port d’arme l’est bien.
Alors que reste-t-il ? Il reste l’Education Populaire !
C’est désormais le seul outil, c’est désormais le seul levier qui puisse participer à changer le monde. L’éducation engendre l’esprit critique. L’éducation crée le libre arbitre. Elle forme à la citoyenneté. Elle permet de prendre part aux débats. Elle émancipe. Elle rend libre !
Le mal de notre société est qu’elle ne veut pas donner à l’éducation la place qu’elle devrait avoir. Il ne faut plus éduquer. Il est inutile de vouloir comprendre. Non, il faut aujourd’hui se former pour obtenir un métier qui soit, selon Pôle Emploi, en tension ! Au diable la culture. Il faut devenir plombier quand on a besoin de plombiers puis informaticiens quand on a besoin d’informaticiens. Il est de plus et dorénavant inutile de vouloir vivre dignement de son travail puisque avoir un travail c’est déjà beaucoup.
Les résignés sont souvent indignés mais ils sont et restent soumis à cet ordre établi qu’est l’impuissance face au dictat de l’argent et à la tyrannie de l’oppression capitaliste de ce monde.
Nous avons débuté il y a des années le sacrifice de quelques générations en constatant que ces sacrifices, s’ils devaient perdurer ainsi, ne serviraient jamais la construction d’une société plus juste pour les générations futures. Sacrifiées pour sacrifiées il nous appartient aujourd’hui d’avoir le courage de mettre en mouvement les rêves auxquels ceux qui nous gouvernent ne croient plus. À cette fin, la résignation ne nous servira pas et l’indignation ne nous suffira pas.
Eduquons, éduquons et imaginons…