Septembre 68, des centaines de militants d’extrême gauche diplômés de l’Université ou de grandes écoles se font embaucher comme ouvrier pour vivre leur vie de travail et pour espérer être en mesure de dynamiser les luttes ouvrières. Comme Robert Linhart, jeune professeur de philosophie, maoïste, qui se fait embaucher à Citroën et qui a écrit une dizaine d’années plus tard un livre avant de passer quelque temps dans un service de psychiatrie. Mathias Gokalp en a fait un film avec Swann Arlaud dans le rôle de Robert Linhart, Denis Podalydès, sociétaire de la Comédie française, comme directeur de l’usine, et d’autres acteurs de talent.
Ce film de fiction montre la réalité des émotions et réflexions de ce type d’action.
J’ai été voir ce film avec un ancien « établi » qui me disait durant la projection : « c’est tout à fait cela ! ». L’épuisement, l’abrutissement des tâches répétitives, l’encadrement de petits chefs inhumains, les blessures, le rôle prodirection des médecins du travail, les rapports de classe dirigés par un directeur du type salopard intelligent, le syndicat « jaune » jouant le rôle de police patronale, mais aussi les débats au sein de la classe ouvrière sur la stratégie, sur les rapports hommes-femmes, sur le racisme, sur le rôle de la CGT, etc.
Lorsque la direction décide d’ajouter 3/4 d’heure de travail non payé pour reprendre les concessions faites en juin 68, un mouvement social se crée. Entre-temps, certains ouvriers apprennent que Robert Linhart est un prof d’université et les rapports changent dans l’atelier. Et à ce moment surgissent les difficultés de la lutte dans la bataille pour maintenir l’unité du mouvement avec le travail de sape organisé par la direction de l’usine. Le débat sur la violence se pose. Les impératifs de la lutte entrent en contradiction avec les intérêts de la famille, femme et enfant.
Ce film, réaliste au possible, ne sombre pas dans la moralité et pose toutes les questions liées aux luttes sociales de classe. Quel débat profond pourrait-on avoir collectivement après avoir vu ce film… Courez le voir !