L’invitation à venir en salle de réunion arrive par SMS vers 8 h 30. Le rédacteur en chef n’est pas surpris. Le jour précédent, son N+1 l’a informé qu’il arriverait exceptionnellement plus tôt que d’habitude pour échanger avec lui. Le directeur sait très bien que le cadre éditorial a l’habitude d’arriver très tôt, vers 7 h 30 chaque jour, pour lancer les premières équipes sur le terrain.
En rejoignant son directeur, le rédacteur en chef relit sur son smartphone leurs derniers échanges. Le précédent commence à dater, presque trois mois de silence. Pourtant, il y a peu, il lui posait quotidiennement des questions ou partageait des impressions sur les journaux, les programmes ou les stratégies mises en œuvre à France Télévisions, même quand il était en vacances. Le climat a changé.
Le directeur tourne le dos quand il entre dans la pièce. Les bras croisés, il regarde le portail où ceux qui prennent leur service saluent à l’aveugle, en essayant d’identifier les visages derrière les pare-brise opaques des premières voitures qui partent en reportage.
– Assieds-toi. J’ai quelque chose de désagréable à t’annoncer.
Quand le directeur se tourne, visage fermé et les yeux tournés vers le sol, le rédacteur en chef cherche son regard sans succès. Il lui tend deux feuillets :
– Nous engageons à ton encontre une procédure de licenciement. Voici le courrier officiel en deux exemplaires. Il faut que tu attestes que je t’ai remis le tien en mains propres… Je vais te demander de prendre tes affaires et de quitter la rédaction sur le champ.
Moins de trois minutes pour mettre un point final à trente années de carrière dans le service public où il a été stagiaire, pigiste, journaliste, présentateur, grand reporter, chef d’édition, responsable d’édition, rédacteur en chef adjoint, rédacteur en chef.
À 8 h 45 ce matin-là, il n’est plus rien. Juste le vestige d’une époque révolue où le métier d’informer s’apprenait à force d’expériences vécues.
Le règne de la peur
D’illustres journalistes comme Georges Pernoud, Henri Sannier ou Ivan Levaï sont passés par là. Jean-François Laville et Alain Vernon ont même raconté leurs évictions violentes dans deux livres récents : Viré, histoire d’un meurtre social à France TV et Le service des porcs.
Ces visages connus du service public ne sont pas isolés : des dizaines de journalistes expérimentés sont ainsi poussés vers la sortie. Points communs : tous ont plus de 55 ans, une solide expérience reconnue par leurs pairs, un caractère souvent trempé et… la plupart s’inscriront à Pôle Emploi pour la première fois de leur vie !
Le 28 octobre 2010, dans une lettre ouverte très documentée et intitulée « Management Ernotte, côte d’alerte dépassée », les représentants du syndicat UNSA-SRCTA (Union Nationale des Syndicats Autonomes – Syndicat des Réalisateurs et Créateurs du Cinéma, de la Télévision et de l’Audiovisuel) de France Télévisions étaient les premiers à s’inquiéter de cette violence ciblée après la tentative de suicide d’une salariée. Les quelques extraits ici reproduits font froid dans le dos :
« Il en faut du temps pour détruire un esprit d’entreprise, instaurer la brutalité comme norme de commande, tout en la masquant sous des labels bidon et de la com’ achetée dans les médias. Mais cette fois nous y sommes, (…) le management à la schlague – tel que les salariés d’Orange ont pu le connaître – est devenu un réflexe conditionné à FTV… Ainsi nous a-t-on rapporté, des CODIR en visio (le conseil des ministres de FTV) où plus personne, plus aucune éminence grise de cette grande direction n’ose, non pas contester, mais simplement prendre la parole derrière la grande prêtresse. Le vide sidéral, qui n’empêche pas les grincements dans les couloirs. Ceux, même compétents, qui n’étaient pas dans la courbure ont fini par dégager peu à peu. (…)
Ainsi a-t-on vu se déployer, dans l’acte 2 de la machine à broyer les énergies, les enquêtes bidon de cabinets dociles et fantoches, ayant pour objectif de virer sur commande. (…) Des enquêtes qui n’en sont pas puisque rien n’est recoupé. Il s’agit juste de faire régner la peur et d’éviter tout débat sur le fond.
Commanditer la honte publique pour éviter le débat sur le fond. Asseoir son pouvoir sur la peur. Utiliser de l’argent public pour sa propre stratégie, mais plonger les salariés dans la culpabilité de coûter trop cher. Voici les piliers sur lesquels repose le règne ernottien. »
Quelques semaines plus tard, les représentants du syndicat Force Ouvrière leur emboîtaient le pas, sans pour autant réussir à enrayer la machine à broyer ceux et celles qui pensent pouvoir émettre des avis divergents. Gênant pour un service public d’information.
Machine à broyer
Il ne s’agit plus seulement de se débarrasser des « hommes blancs de plus de 50 ans » dont Delphine Ernotte, la PDG tout récemment nommée, avait indiqué dès septembre 2015 – lors d’une célèbre interview accordée à Jean-Pierre Elkabbach sur Europe 1 – qu’ils étaient trop nombreux à France Télévisions. Il faut aussi « disqualifier » les cadres (femmes ou hommes) contestataires, les empêcher de faire valoir leur expertise, d’exprimer leur malaise face à la stratégie de la Présidente et surtout aux méthodes plus que contestables de son entourage.
Comment « disqualifier » des professionnels aguerris, réputés et bien notés ? En justifiant les procédures par des fautes, des défauts, des problèmes de comportement brusquement apparus quelques semaines avant leur éviction : management « toxique », insuffisance managériale, harcèlement des salariés, attitudes sexistes…
Les responsables des ressources humaines de France Télévisions sont désormais rompus à l’exercice et s’appuient sur deux rouages efficaces :
- Une poignée de partenaires sociaux complices, trop heureux de nouer un dialogue privilégié avec le haut encadrement et d’inspirer la crainte à leurs propres managers, dévoient leurs mandats en amorçant la procédure avant de se reconnaître incompétents pour la mener à son terme.
- Des cabinets privés (Interstys, Secafi…) engagés par la direction pour porter secours aux vaillants guerriers du front social. Ces forts lucratives entreprises se donnent pour mission « l’anticipation et la résolution des situations de crise humaine, relationnelles ou traumatiques ». Facturés forts chers (50 000 à 100 000 euros), leurs « audits » ou leurs pseudo enquêtes offrent des conclusions accablantes pour les cibles et ne se soucient guère du respect d’un quelconque principe contradictoire.
Dans l’article « Licenciement pour harcèlement : ces entreprises qui piègent leurs salariés » – publié en 2021 par la revue en ligne Cadre Averti » – Françoise de Saint Sernin, avocate spécialisée en droit du travail, décrit précisément ces procédures cyniques venues des pires entreprises privées et déployées aujourd’hui dans le service public :
« A l’heure actuelle le harcèlement moral est dans toutes les bouches. (…) La crise sanitaire a-t-elle accentué les comportements managériaux harcelants ? Y aurait-il une augmentation statistique de la perversité au travail ? Aux vrais cas de harcèlement ne faudrait-il pas ajouter ceux montés de toutes pièces pour se débarrasser des «quinquas» dont la crise accentue de façon inquiétante le départ prématuré et qui, s’ils ont conservé leur ancienneté, coûtent encore cher à licencier ? (…)
Le modus operandi pour se débarrasser d’un manager innocent est généralement le suivant. On lui fait part verbalement de plaintes ou de remontées négatives de la part de ses collaborateurs. Peu de temps après, on l’informe qu’il va être entendu dans le cadre d’une enquête faite par un cabinet extérieur. Lors de son « audition », on lui précise que pour des raisons de confidentialité on ne peut pas lui révéler le nom des personnes qui se sont plaintes ni des propos tenus. (…) On lui propose, pour lui éviter la honte d’un licenciement disciplinaire, une négociation à bas prix. (…)
La spécificité française consistant à mettre fin de façon prématurée à l’emploi des séniors, s’accélère avec la crise. Les cadres d’un niveau élevé, bien rémunérés, généralement âgés et qui coûtent encore cher à licencier parce qu’ils ont de l’ancienneté, figurent aux premières loges de ce type de pratique. (…)
Voilà pourquoi accuser brutalement le manager de harcèlement moral sur ses collaborateurs, avec une enquête commanditée par l’employeur, mais censée être totalement impartiale, puisqu’effectuée par un cabinet extérieur, est une solution qui présente tous les avantages. (…)
Il convient de dénoncer la pratique insupportable qui consiste pour l’employeur peu scrupuleux, à accuser faussement de harcèlement moral pour faire partir dans la honte et sans bourse délier, les collaborateurs âgés et anciens qui l’ont jusqu’alors bien servi, et en adoptant au surplus la posture de l’employeur vertueux. »
Gaspillage de compétences et d’argent public
Certes, comme Benoît Lafon dans les colonnes du Huff’ Post, il est possible de qualifier cette violente politique managériale de simple « restructuration qui aurait pu avoir lieu dans n’importe quelle autre entreprise ».
Pour ce chercheur en communication et directeur adjoint du GRESEC (Groupe de recherche sur les enjeux de la communication) à Grenoble : « On peut s’indigner d’une mauvaise gestion, mais ce n’est pas pour autant qu’une entreprise ne peut pas se réorienter et changer de cap. Il faut éviter des phénomènes de vieillissement, de non-renouvellement. » C’est faire peu de cas de cette « mauvaise gestion » et des problèmes qu’elle induit.
Financiers d’abord, car les inévitables transactions qui suivent chaque licenciement s’ajoutent aux importants chèques versés aux cabinets d’audit ; Chacune de ces procédures abusives coûterait en moyenne 400 000 euros, soit – au bas mot – une vingtaine de millions d’euros annuellement soustraits au budget déjà exsangue du service public audiovisuel.
Managériaux ensuite, car le remplacement de cadres expérimentés ne s’improvise pas : l’un des problèmes majeurs de France Télévisions est ainsi l’absence de vocations managériales. Les journalistes expérimentés sont de moins en moins nombreux à postuler pour des postes d’encadrants trop exposés et synonymes de mobilités dans l’hexagone ou les outremers.
L’un d’eux résume ainsi les raisons de son refus d’intégrer l’encadrement : « Il faut être kamikaze pour devenir manager ! Faire face à l’hostilité des consœurs et confrères, servir de fusible à la direction ; Se retrouver entre le marteau et l’enclume pour quelques centaines d’euros supplémentaires à la fin du mois… Très peu pour moi ! En étant Grand Reporter, je gagne autant en travaillant sur des sujets intéressants et en plus je reste sur le terrain. »
Modèle norvégien
Coûteuse socialement, désastreuse sur le plan managérial, très lourde pour les finances du service public… Pourquoi s’acharner dans une telle politique managériale ? Difficile de croire en une simple discrimination systémique visant des salariés trop « anciens ». L’une des raisons régulièrement évoquées par les syndicalistes et les managers joints pour cette enquête est la transformation structurelle du service public audiovisuel. Une révolution inspirée à Delphine Ernotte par la NRK, le service public norvégien : priorité au numérique et aux réseaux sociaux, transformation des métiers, intégration des nouveaux outils et « production de contenus ».
Dès juillet 2019, un papier très documenté de Libération (« La Norvège, un modèle pour France Télévisions ») décrit le fantasme absolu des proches de Delphine Ernotte : « la recommandation personnalisée de séries au milieu des articles d’information… ». L’article donne aussi la marche suivie par NRK et imitée par les responsables de France TV : «Il y a six ans, on avait besoin de douze personnes pour la technique. Désormais, c’est trois personnes. Nous avons redéployé une partie des postes dans la rédaction. (…) L’entreprise est ainsi plus pointue, plus flexible, plus rapide.»
Même si la NRK est quatre fois plus petite que France Télévisions, les proportions sont reproductibles : diviser par quatre le nombre des personnels techniques et administratifs, sans pour autant les licencier, mais en les transformant en producteurs de « contenus ».
Qu’est-ce que les « contenus » ?
Un assemblage disparate et volontairement confus que chacun peut aujourd’hui observer dans la plupart des médias en ligne : communiqués, graphiques, publicités, tweets, photos, vidéos, posts extraits de Facebook, dessins, recettes de cuisine, bulletins météo et… informations de plus en plus rares !
Quels sont les avantages des « contenus » ?
Ils peuvent être produits par n’importe quel salarié motivé, personnel technique ou administratif. Nul besoin de disposer d’une carte de presse pour le créer si ce contenu n’est pas qualifié « d’information ».
Avec comme objectif prioritaire de réduire les effectifs (déjà passés de 10 000 à 8 000 salariés pendant le dernier quinquennat) tout en augmentant le volume des productions audiovisuelles et surtout numériques, voilà une subtilité fort intéressante ! Surtout pour la directrice des ressources humaines de France Télévisions. Car si le service public audiovisuel compte près de 3 000 journalistes, il emploie également 5 000 salariés à des tâches techniques et administratives.
Transformer une bonne partie de ces salariés en « producteurs de contenus » notamment numériques, c’est augmenter les volumes créés tout en continuant à réduire les effectifs globaux. C’est aussi proposer une évolution professionnelle valorisante à des personnels dont l’activité est menacée par les innovations technologiques : logiciels de gestion des frais de mission ou de planification simplifiant les tâches comptables et administratives, nouveaux outils de réalisation, de création graphique, de mixage, de mise en image et de prise de son.
Aujourd’hui, une story ou un live diffusé sur les antennes numériques peuvent être créés par un seul contributeur. À la façon des « influenceurs » et autres « Youtubeurs », il assure les images, la prise de son, enregistre un commentaire et réalise le montage final avant d’instantanément diffuser le « contenu » ainsi créé sur les réseaux sociaux. Le tout sur son smartphone de dernière génération. Plus question d’équipes avec caméraman, preneur de son, monteur et technicien pour envoyer les images. Plus question de caméras et micros professionnels hors de prix, de bancs de montage et de systèmes satellitaires pour envoyer les images… Une UTS (Unité de Tournage avec Smartphone) à moins de 2 000 euros suffit !
Pouvoir appliquer ces méthodes à la réalisation des reportages représenterait donc de substantielles économies. Raison qui a conduit à la nomination de l’actuelle directrice des ressources humaines de France Télévisions. En effet, précédemment directrice régionale de France 3 Nouvelle Aquitaine, celle-ci a développé 3 NoA : financé par la Région Nouvelle-Aquitaine, ce canal est le laboratoire de France Télévisions pour les nouvelles techniques de réalisation avec des moyens légers, notamment les smartphones.
Information contre « création de contenus »
L’évolution des personnels techniques et administratifs vers la « production de contenus » souhaitée par une partie seulement des salariés concernés et surtout par les syndicats qui les représentent (principalement SUD et la CGT) inquiète leurs collègues journalistes. Est-ce simplement du « corporatisme » ? Pas si évident, si l’on considère comme essentielles la formation et la réflexion dans l’exercice difficile du métier d’informer. L’équilibre et l’honnêteté du traitement d’un sujet sont à ce prix.
Alors, bien sûr, la direction met en avant ses « programmes de formation interne » dispensés par l’Université France Télévisions : quelques semaines censées transformer un technicien vidéo ou une assistante en journalistes. Différents modules aisément validés et essentiellement focalisés sur l’apprentissage des techniques de réalisation. Comment peut-on considérer que ces formations express peuvent avoir la même valeur que les deux à trois années de formations spécifiques en journalisme, les exigeantes sélections basées sur la culture générale et les diplômes universitaires de haut niveau demandés aux jeunes journalistes ?
Au-delà des avantages liés à la gestion sociale de l’entreprise, un autre intérêt bien perçu par la direction des médias de service public est d’avoir des « contributeurs » moins hostiles à la « publicitarisation ». Cette notion théorisée en 2014 par la chercheuse Valérie Patrin-Leclère, maître de conférences au CELSA, qui consiste en une adaptation de la forme et des contenus des médias pour accueillir de la publicité. Attente forte des annonceurs et des partenaires institutionnels, qui sont prêts à financer forts chers des « contenus » pouvant se fondre dans la continuité éditoriale, la publicitarisation implique de réduire la rupture sémiotique entre contenus informatifs et contenus publicitaires afin de placer des messages, des produits ou des partenariats dans les contenus informatifs : publirédactionnel, publi-information, articles sponsorisés, parrainage…
Hybridation entre la production éditoriale et la production publicitaire, la « publicitarisation » est redoutée par les journalistes qui apprennent très tôt à l’éviter et – pour s’en prémunir – à se référer aux critères de l’ARCOM (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) qui a remplacé le CSA (Conseil Supérieur de l’Audiovisuel) depuis le 1er janvier 2022.
Cette « publicitarisation » est aussi une ligne rouge infranchissable pour les « vieux » managers de l’information de service public… brusquement devenus « indésirables ».
Idéologie et information
Dernier constat : les professionnels expérimentés ont moins de place dans l’organigramme du service public. Finie l’époque des Jean-Pierre Elkabbach, Marc Tessier, Patrick De Carolis ou Remy Pflimlin (PDG successifs de France Télévisions), Geneviève Giard, Jean-Pierre Cottet, Jean Réveillon, Xavier Couture ou Takis Candilis (Directeurs d’antennes ou des programmes), qui accédaient aux plus hautes responsabilités après de longues carrières dans l’information ou la production audiovisuelle et imposaient naturellement une « neutralité bienveillante » vis-à-vis des émissions d’information, se contentant de leur donner les moyens d’exister sans se mêler des sujets mis à l’antenne.
Analyste financière, Delphine Ernotte (PDG) vient de France Télécom / Orange et Stéphane Sitbon-Gomez, tout puissant directeur des antennes et des programmes, est un apparatchik des « Verts » : ex-assistant-parlementaire au parlement européen, puis conseiller spécial de Cécile Duflot au ministère du Logement après avoir dirigé la campagne d’Eva Joly lors de l’élection présidentielle de 2012.
L’actuelle direction ne s’embarrasse plus des précédents usages qui garantissaient un « cloisonnement étanche » des journaux télévisés par rapport aux partenariats et la liberté éditoriale des rédacteurs en chef du service public. Aujourd’hui les consignes viennent d’en haut. Elles doivent être appliquées sous peine de sanctions. Des « campagnes » doivent ainsi simultanément être mises en scène sur toutes les antennes de France Télévisions, y compris dans les journaux télévisés jusqu’alors sanctuarisés : utilité des institutions européennes, soutien aux gay games, dialogue des députés macronistes avec les Gilets jaunes, qualité des productions françaises, promotion du don d’organes, lutte contre l’homophobie, promotion de la diversité, promotion des droits des femmes, lutte contre les violences faites aux femmes…
Tous ces sujets présentent bien sûr un vrai intérêt journalistique et sont d’ailleurs régulièrement abordés sans besoin d’injonctions directoriales. Cependant, le fait d’imposer et d’orienter le sens de leur traitement dans les journaux d’information est une nouveauté qui interroge la liberté des rédactions à décider et hiérarchiser leurs contenus éditoriaux. Régulièrement, ces « campagnes » précédant les promulgations de lois ou les débats à l’Assemblée nationale peuvent d’ailleurs donner l’impression de venir « légitimer » ou « souligner l’intérêt » des orientations gouvernementales.
Les convictions des dirigeants de France TV se sont même traduites par des soutiens sonnants et trébuchants : en 2016, le Canard Enchaîné a mis au jour une aide de 7 000 euros accordée par l’entreprise à la Fondation des Femmes et la réalisation de trois clips contre les clichés sexistes commandée à un administrateur de cette même Fondation pour un montant d’environ 40 000 euros. Hasard ou pas, cette Fondation des femmes a été créée par Anne-Cécile Mailfert, la compagne de Stéphane Sitbon-Gomez.
Une rupture consommée
À France Télévisions,
- l’« interventionnisme » des dirigeants en rupture avec les pratiques de leurs prédécesseurs ;
- la diminution sensible des journalistes dans les postes directoriaux ; Le rapprochement souhaité des antennes régionales de France 3 avec les Conseils régionaux ;
- les choix stratégiques qui conduisent à favoriser un traitement rapide, superficiel et « grégaire » des sujets aux dépens de l’investigation et des propositions originales qui nécessitent un temps plus long ;
- la réorientation des moyens financiers vers la fabrication de programmes parrainés aux dépens du financement d’une information de qualité
sont autant de sujets de discorde entre la direction et des managers heurtés par ces méthodes inspirées du secteur privé.
Pas étonnant, dès lors, que des cadres très attachés aux valeurs du service public soient poussés – quelquefois violemment – vers la sortie.
Sources
VIRÉ, Histoire d’un « meurtre social » à France.tv
Jean-François Laville
Date de parution : 30/09/2021
Editions Plon
https://www.lisez.com/livre-grand-format/vire/9782259307284
Le Service des Porcs
Alain Vernon
Date de parution : 20/10/2021
Éditions Sydney Laurent
https://editions-sydney-laurent.fr/livre/le-service-des-porcs/
Management Ernotte: cote d’alerte dépassée
UNSA SRCTA france.tv
Publié le 28/10/2021
http://unsa-france-televisions-srcta.fr/management-ernotte-cote-dalerte-depassee/
« On a une télévision d’hommes blancs de plus de 50 ans et cela, il va falloir que ça change »
Delphine Ernotte sur Europe 1 le 23/09/2015
Licenciement pour harcèlement : ces entreprises qui piègent leurs salariés
Françoise Saint-Senin
Publié le 11/05/2021
https://www.cadreaverti-saintsernin.fr/actualites/licenciement-accuse-harcelement-moral-122.html
Comment expliquer la vague de départs survenue chez France 2 en 2019 ?
Stacie Arena
Huffington Post | Page MÉDIAS
Publié le 02/01/2020
https://www.huffingtonpost.fr/entry/france-2-departs-journalistes-2019_fr_5e077b4bc5b6b5a713aed1f0
La Norvège, un modèle pour France Télévisions
Jérôme Lefilliâtre
publié le 3 juillet 2019
Libération | Pages Société
LA PUBLICITARISATION
Valérie Patrin-Leclère
Effeuillage, la revue du CELSA
https://effeuillage-la-revue.fr/portfolio-item/interview-vpl/
A France Télés, les droits des femmes nourrissent son homme
Christophe Nobili
Le Canard Enchaîné
Publié le 16 mars 2016
Reproduit sur le site du syndicat Medias-CGC
http://medias-cgc.blogspot.com/2016/03/les-revelations-du-canard-enchaine-sur.html