« Nous nous félicitons du rétablissement des aides sociales aux élèves du privé. Le groupe des Patriotes salue la fin de cette injustice. » Voilà comment le groupe FN à la région Île-de-France a salué l’octroi d’aides facultatives à l’enseignement privé remis en vigueur cette semaine par Valérie Pécresse. Il faut dire qu’en matière de prosélytisme du privé dans l’éducation, le FN n’a jamais fait dans la demi-mesure.
On se souvient ainsi de la tribune du Collectif Racine, le prétendu collectif enseignant du FN, parue dans Le Figaro du 2 mai 2013. Il y était affirmé la volonté de promouvoir « le respect des spécificités de l’enseignement privé sous contrat ou hors contrat. » Où l’on constate que non seulement le FN cherche à développer l’enseignement privé mais que celui-ci ne fait pas la distinction entre le « sous contrat » et le « hors contrat ». Le FN a beau jeu de clamer, en matière d’éducation comme sur le reste, qu’il revendique un cadrage national qui s’imposerait à tous partout sur le territoire. Dans les faits, en appelant à la promotion du «hors-contrat », il choisit délibérément de laisser le champ libre pour que les savoirs et les conditions d’enseignement proposés aux enfants soient exonérés du respect de tout encadrement par la communauté nationale. Le FN est décidément un parti de bien piètres patriotes pour qu’il abandonne ainsi (à qui ?) la formation du futur de notre patrie républicaine.
Un tel renoncement exprime également une volonté manifeste de brimer l’émancipation populaire. Car reconnaître aux écoles privées « hors contrat » les prérogatives de l’Ecole régie par l’Education nationale, c’est considérer qu’assurer l’éducation de tous les enfants ne serait plus un devoir pour l’Etat ce qui ne serait envisageable que dès lors que l’éducation ne serait plus un droit pour l’individu.
Valérie Laupies, la conseillère politique pour l’Ecole de Marine Le Pen (et par ailleurs conseillère régionale PACA et membre du bureau politique du FN) enfonce le clou quand elle déclare : « Offrir le privé à ses enfants quand l’Etat n’assure plus la qualité du public est une solution pour les parents. Encore faut-il que l’école privée ne soit pas trop coûteuse, et pour cela, l’Etat doit la subventionner. D’autre part, nous devons respecter le choix des familles qui souhaitent élever leurs enfants dans un cadre d’éducation catholique par exemple ou dans une école ayant une pédagogie très spécifique, à partir du moment où cette éducation ne met pas en péril la laïcité. » (Riposte laïque du 21 mai 2012).
La Laïcité… nous y voilà. Le FN emploie de grands mots pour de basses besognes. Car là où la laïcité est un principe d’organisation de la société pour créer du commun, le FN en fait on le voit une machine à segmenter : chacun son école et courage ! Il faut dire que dès lors que la séparation est établie, le tri peut se faire. Valérie Laupies ne s’en cache pas en mettant l’accent sur l’enseignement catholique. Et pour cause, celui-ci représente 95% de l’enseignement confessionnel.
Mais attaquer la laïcité, c’est aussi soustraire à l’intérêt général ce qui devrait revenir à tous pour en faire profiter uniquement quelques uns. La délibération de Mme Pécresse dont se félicite le FN francilien en atteste : les lycées privés représentent 204 établissements contre tout juste 469 pour le public. Ce qui est là donné au privé se fait au détriment du public comme l’a démontré Eric Coquerel dans son intervention en séance.
En matière d’éducation côté aussi, le FN se range à la fois du côté de la droite et du côté de la Caste. C’est la même «liberté » factice et contrevenant à l’égalité qui est revendiquée comme la droite pour justifier la promotion de l’enseignement privé, niant en cela l’idée républicaine qui prend sens justement en ce que l’égalité et la liberté se nourrissent indissociablement l’une de l’autre. C’est la Caste qui se retrouve derrière l’écran scolaire protecteur qu’elle essaie de se construire pour mettre à distance la plèbe, servie en cela par les larbins médiatiques qui comme Bertrand Schneider dans Le Parisien du 8 avril commentent la discussion autour de la délibération du Conseil régional d’Île-de-France en considérant que les 1,6 millions d’euros débloqués sont « une somme dérisoire ». Le soutien du FN à l’enseignement privé est on le voit à haute valeur idéologique.