Compte-rendu 2009 du mandat de Bertrand Delanoë dans le XIIIe arrondissement. Interrogé à plusieurs reprises sur l’installation contestée de 1000 caméras de surveillance à Paris, Delanoë parvient à ménager la chèvre, le chou, et oserais-je dire aussi, le cul du berger. Compte-rendu des débats.
La séance de compte-rendu commence à la mairie socialiste du XIIIe arrondissement par le docte exposé du maire de Paris, Bertrand Delanoë. Politique du logement, maintien de l’emploi, baisse des « frais de fête » et des budgets de communication. Delanoë expose un digest parfaitement maîtrisé du compte-rendu de 70 pages distribué en début de séance pour finir sur ces mots : « L’équipe municipale serre les dents pour passer le cap de la crise ». Mais de quelle crise parle-t-on ? La crise de la vidéo surveillance, bien sûr !
Des questions épineuses…
La séance des questions débute sur un constat dans l’air du temps avant les élections régionales : « La violence et l’insécurité prennent une ampleur de plus en plus importante à Paris ». Un autre intervenant renchérit : « Ce problème est lié à l’éclosion de bandes organisées. Il faut faire quelque chose avant que nous voyions se développer ses effets néfastes car ce problème n’est pas résolu ! ». Le constat est sévère. La réponse à y apporter est épineuse.
D’autant que les méthodes de la mairie de Paris pour résoudre ces préoccupations sont contestées au sein même de la gauche parisienne. Jean-Marc Wasilevsky (Ligue des Droits de l’Homme) prend alors la parole : « La mairie apporte une fausse solution à un vrai problème en accompagnant la politique de vidéo surveillance de la préfecture. Etes-vous d’accord pour entrer en résistance contre cette politique sécuritaire de Nicolas Sarkozy ? Etes-vous d’accord pour informer et consulter l’ensemble des instances de démocratie locale sur ce sujet ? »
Une banderole soudainement déployée au fond de la salle fait écho au vote sans concertation du plan de vidéo surveillance prévoyant la mise en place 1000 caméras dans les rues de Paris pour le plus grand plaisir des exhibitionnistes et voyeurs de tous poils. Superbement ignorée par M. Delanoë et ses adjoints stoïques.
Un nouvel intervenant appuie alors cette fâcheuse question : « Les élus socialistes de Paris ont voté avec la droite le plan de vidéo surveillance. Vous comprenez l’émotion du peuple de gauche ! Est-ce que vous seriez prêts aussi à soutenir la mise en place des « volontaires citoyens de la police nationale » proposé par Nicolas Sarkozy ? ».
Pas de quoi effrayer notre maire rhéteur. Clamant haut et fort son attachement profond à la laïcité, Delanoë prépare déjà ces réponses ciselées dans son crâne impassible d’ex Petits Chanteurs à la Croix des Sables. Un doute persiste pourtant : quelle chanson va-t-il interpréter pour notre plus grand plaisir ?
… pour une réponse de jésuite
Son récital commence par la chanson ardente du mari cocu (et vengeur) : « Il n’y a que vous [les militants de gauche et la Ligue des Droits de l’Homme, ndlr] pour penser que nous sommes les alliés de Nicolas Sarkozy. Lui ne considère pas que je suis un allié. Nicolas Sarkozy cherche à atteindre la gauche à Paris par tous les moyens, même les plus détestables. Mais je ne cèderais pas. ».
Ne nous éloignons pas trop de notre sujet, allons plutôt voir chez nos voisins si la vidéo surveillance y est : « C’est ridicule de dire qu’on se met sur la même position que la droite ou que les Anglais. À Londres, il y a 65 000 caméras. Au conseil de Paris, nous en rajoutons 1000 aux 320 qui existaient déjà et qui avaient été votées par tout le monde ! » rétorque t-il.
Commence alors l’épopée du justicier socialiste redresseur de tords : « Il y a plus de 200 caméras installées dans les couloirs de bus car les automobilistes qui empruntent ces voies vont à l’encontre de notre politique juste de transport en commun ! Je considère que nous devons protéger la sécurité des citoyens les plus faibles. C’est dans les quartiers populaires qu’il y a un droit à la sécurité. Par ailleurs, depuis 2001, nous avons accru le budget de prévention. N’oubliez pas que c’est la gauche qui a créé la police de proximité. ». La dose « juste » pour flatter l’auditoire, qui, ne l’oublions pas est sensible à cette question avant les élections régionales.
Son tour de chant finira par l’éternelle ritournelle socialiste du respect des droits de l’homme et de la prévention avant tout : « N’idéalisons pas les caméras et ne les diabolisons pas non plus. Elles s’ajoutent à un dispositif dans le respect des droits de l’Homme car je n’ai pas envie que l’on atteigne les symboles de la démocratie. Nous voulons disposer de cet instrument à condition de ne pas l’utiliser à la façon de Nicolas Sakozy (sic). Un comité d’éthique va encadrer l’utilisation de ces caméras. ». Et quid du changement de majorité ? Quelle utilisation fera t-on alors de ce dispositif ?
Devant le talent ravissant de notre maire enchanteur, une femme se dresse hors de la foule. « Vous ressemblez à Nicolas Sarkozy ! », lance-t-elle d’une voix hésitante. Compliment ou désaveux ? La preuve, tout simplement, qu’un orateur peut en cacher un autre.