Samedi 17 octobre, 5000 personnes ont manifesté pour le droit des femmes. Pour Mélenchon, la gauche n’a pas pris ses responsabilités dans ce combat.
Les manifestants des 103 associations féministes, syndicats et partis de gauches se sont réunis à l’appel du Collectif National pour les Droits des Femmes et de l’association Femmes Solidaires. « Ensemble pour une réelle égalité » et sur des mots d’ordre aussi divers que ceux de la dignité, de la solidarité, de la laïcité ou de l’autonomie. Au-delà de l’unité affichée dans le cortège, c’est aussi la multiplicité des préoccupations et des perspectives féministes qui ont donné de la voix. Points de vue.
Clémentine Autain (Fédération pour une Alternative Sociale et Ecologique)
« Le féminisme, ce sont des théories et des pratiques ancrées dans l’histoire des luttes contre la domination masculine. Elles visent à l’émancipation et à l’égalité de droit et de fait des femmes et des hommes. Mais ce qui me paraît important, c’est de faire le lien entre les différentes luttes pour l’égalité en pensant l’ensemble des facteurs qui la font vivre en France. »
Yvette, MLF (Mouvement de Libération de la Femme)
« Le Mouvement de Libération des Femmes soutient, mais dépasse le féminisme. Militer pour l’égalité entre les hommes et les femmes ne suffit pas, nous avons besoin d’un mouvement de civilisation. Il faut reconnaître la différence et la complémentarité entre les sexes, au-delà de la simple égalité en droit. Selon nous, les hommes et les femmes ne sont pas assimilables. Si on n’admet pas les différences entre les sexes, le droit à l’égalité ne pourra pas être appliqué. Cependant, dans la conjoncture actuelle, notre combat majeur est de mobiliser les femmes de 30-40 ans qui semblent se reposer sur leurs acquis. »
Christine Prézac, militante du Planning Familial
« L’enjeu du féminisme est d’intégrer les hommes dans la lutte. Une meilleure compréhension des hommes ferait évoluer les mentalités, notamment sur l’avortement. À Orléans, plus de 2000 femmes viennent se faire avorter tous les ans. 90% d’entre elles viennent seules et sont reçues dans des conditions d’accueil déplorables. Ces femmes sont maltraitées dans les hôpitaux par des médecins qui pratiquent l’IVG à contrecœur. Notre but est de les faire parler et de leur faire prendre conscience qu’elles méritent un accueil digne de ce nom. Le droit à l’avortement est également menacé par la fermeture des centres IVG. »
Ana Andrade, responsable du collectif de l’égalité professionnelle (CGT cadres et techniciens, BNP Paribas)
« Je travaille sur les affaires de discrimination directes et indirectes. L’inégalité est souvent structurelle. Un exemple : s’il n’y a pas assez de place dans les crèches, c’est traditionnellement le conjoint qui gagne le moins qui assume la garde des enfants. C’est pour cela que le choix se porte toujours sur les femmes. En effet, dans le cadre professionnel, les femmes doivent subir le plafond de verre qui leur rend difficile l’accès aux postes de cadre. Quand elles y accèdent, elles gagnent 30% de moins que leurs homologues masculins et n’accèdent pas aux responsabilités. Il y a beaucoup de femmes cadres travaillant aux 4/5ème qui sont pénalisées car elles touchent un salaire moindre alors que leur charge de travail est équivalente à celle d’un temps plein. »
Jeanne Fidaz, présidente de la Commission Féminisme du Parti de gauche
« Pour le Parti de Gauche, le féminisme est une bataille culturelle. Nous militons pour l’émancipation des femmes du système patriarcal. Si je devais choisir un combat emblématique, ça serait celui de la place des femmes dans les médias et la lutte contre la publicité. Nous allons aussi lancer le débat sur l’abolition de la prostitution. Actuellement, le gouvernement criminalise les prostituées. Il faudrait plutôt criminaliser les clients, démanteler les réseaux et assurer la reconversion des prostituées. C’est un combat d’avant-garde que nous devons mener pour ne pas nous contenter d’un consensus mou sur l’égalité des droits ».
Jean-Luc Mélenchon, fondateur du Parti de Gauche
« Le féminisme a été un angle mort de la pensée de gauche pendant longtemps. Jusqu’à ce qu’on se rende compte que deux aspects étaient essentiels dans ce combat. D’une part, la place particulière de la main d’œuvre féminine dans le processus d’exploitation capitaliste permet de profiter de leur situation dégradée pour enfoncer le front social. D’autre part, nous devons défendre la lutte pour la liberté individuelle, et en particulier pour le droit à l’avortement, à l’heure où l’Eglise catholique mène une offensive contre les législations favorables à l’avortement partout en Europe et en Amérique Latine (en Espagne, au Nicaragua et en Uruguay). Contrairement à ce qu’on cherche à nous faire croire, ce n’est pas un combat du passé. Il faut avoir conscience que rien n’est acquis. »