L’auteur, d’entrée, cite une lettre adressée à Angela Davis dans laquelle il évoque une chanson de Pierre Perret condamnant le racisme et qui parle de la militante des droits de l’homme et communiste :
Mais, dans un meeting à Memphis, Lily
Elle a vu Angela Davis, Lily
Qui lui dit viens petite sœur
En s’unissant on a moins peur
Des loups qui guettent le trappeur
La première partie de la BD(1)Publiée chez Glénat en 2020. nous met dans l’ambiance des années 1970, une ambiance qui montre le peu de considération, le mépris des forces de sécurité des États-Unis à l’égard des minorités en général et des Noirs en particulier.
Elle se poursuit avec la description de la jeunesse d’Angela Davis, très tôt confrontée au racisme ordinaire quand on lui fait comprendre qu’en croisant des policiers il faut baisser la tête pour éviter les ennuis. Elle refuse de s’habituer à une telle situation. Elle est témoin également des violences antinoires des Blancs, membres du Ku Klux Klan.
Les médias américains parlaient de « problème noir » alors que la réalité est un problème inventé par des Blancs qui fantasment la pureté de leur « race », fantasme qui les transforme en monstres. L’homme noir tire sa haine de la rage face aux injustices de la société américaine à leur encontre et l’homme blanc tire sa haine de la terreur qui se focalise sur le noir une entité qui n’existe que dans son esprit, son imagination. Depuis Spinoza, on comprend bien que l’imagination procure une connaissance imparfaite des choses et nous enferme dans des passions tristes. Seules la raison, les lumières de l’intelligence peuvent conduire à la formation d’un jugement sûr qui écarte ces passions tristes, permet de s’en émanciper.
La vie des Noirs américains des années 1960-1970 est retracée dans toute sa complexité ainsi que la vie d’Angela Davis, de ses études aux États-Unis, en Europe, à ses luttes pour l’émancipation en passant par le métier de professeur rapidement écourté par les volontés conjuguées des Nixon, Hoover (FBI) et Reagan (gouverneur de Californie) qui obtinrent son licenciement soi-disant pour incompétence, en fait pour son appartenance au Parti communiste américain.
Elle fut un temps attirée par le parti « Black Panthers » afin de combattre pour la cause du « Black Power ». Elle s’en détourna rapidement trouvant ses militants trop machistes, à la fois modernes pour la défense du peuple noir et archaïques pour la cause des femmes. Le programme en dix points de « Black Panthers » est un mélange de revendications universelles communes à tous les opprimés et de revendications communautaristes qui affaiblissent le combat pour l’émancipation de toutes et tous. Elle se tourna vers le Che Lumumba Club(2)Che de Che Guevara et Lumumba du leader africain, assassiné en 1961 et héros national de la République du Congo, ex-Belge. lié au Parti communiste américain et très égalitaire sur la question du droit des femmes.
Son charisme en fit l’ennemi public numéro 1 du pouvoir américain. Pour la faire taire, des accusations grossières et mensongères furent proclamées afin de justifier son arrestation. La BD retrace ses années de cavale, son arrestation, ses conditions indignes d’emprisonnement, dont la mise en isolement, son procès qui se solda par son acquittement.
Au lieu de se ranger pour profiter d’un retour à la vie « normale », elle poursuivit son combat parsemé de répressions policières : Miami, 1980, Rodney King, 1992, Cincinnati, 2001, Ferguson, 2014, New-York, 2014, Charlottesville, 2017 précédés par la naissance, en 2013, du mouvement politique de Black Lives Matter (ou « la vie des Noirs compte ») qui milite contre le racisme systémique propre aux États-Unis.
La volonté des auteurs fut de dépasser le combat et la vie d’Angela Davis, noire, féministe et communiste qui résista et demeura debout et de traiter, également, le sujet de « l’acharnement d’une Société dominante blanche et masculine sur une Société noire ».
Ce sujet interpelle sur la question de la défense et l’émancipation de tous les opprimés. Il serait nuisible à ce combat de se cantonner aux minorités discriminées et exploitées alors qu’il est indispensable, pour réussir à transformer la société et la libérer du carcan du système capitaliste, de l’élargir à tous les exploités. Seule l’union est en capacité de renverser un système injuste et construire un monde de justice dans lequel tous les êtres humains trouvent une place digne.