L’Islam doit-il être enseigné en Alsace comme le sont le catholicisme, le judaïsme et le protestantisme ? Oui, nous avait répondu Jean-Yves Causer, tête de liste du Front de gauche. Le Parti de gauche nous a fait parvenir un droit de réponse à Rue89, se désolidarisant de la tête de liste du Front de gauche en Alsace sur la question.
Le 14 février, Rue89 s’interrogeait : « Faut-il enseigner l’Islam à l’école en Alsace-Moselle ? » Cet article répertoriait les positions des candidats aux élections régionales d’Alsace (et de Lorraine, pour Lutte ouvrière) sur le souhait de la communauté musulmane locale d’avoir des cours sur l’islam dans les écoles et collèges publics. Et ce au même titre que le catholicisme, le judaïsme et le protestantisme, cultes reconnus par le Concordat encore en vigueur dans les départements de Moselle, du Haut et du Bas-Rhin.
Interrogé, Jean-Yves Causer, issu du courant Les Alternatifs, tête de liste du Front de gauche en Alsace et maître de conférence à Mulhouse, expliquait ne pas être « sectaire » :
« Je suis non seulement favorable à l’introduction de cours d’islam à l’école mais aussi à la création d’une faculté d’État de religion musulmane. À Strasbourg, il y a une faculté d’État catholique, une faculté d’État protestante…. C’est absolument anormal qu’il n’y ait pas de fac d’État musulmane. »
Le Parti de gauche (PG), composante du Front de gauche, a fait parvenir un « communiqué/droit de réponse » à Rue89. Soutien de la liste « Ensemble pour une Alsace à gauche, solidaire, écologique et citoyenne » menée par Jean-Yves Causer, le PG se désolidarise pourtant de ses propos :
« En Alsace aussi la laïcité est un fondement de la République… La laïcité vise à garantir que l’espace public appartient bien à tous les citoyens sans exception, sans distinction d’origine ou de croyance, égaux pour faire et respecter la loi….
Il ne s’agit donc absolument pas, ni en Alsace ni ailleurs, d’élargir le Concordat ou d’ouvrir d’autres facultés de théologie, comme le dit au nom du Front de gauche et par erreur Jean-Yves Causer dans une interview à Rue89, mais bien de préparer à l’école de la République, l’exercice sans crainte des droits que la démocratie laïque reconnaît à l’Homme. L’argent des citoyens ne doit pas être utilisé pour l’enseignement des religions, quelles qu’elles soient.
La laïcité est l’une des garanties de la paix civile : “La laïcité garantit ma liberté de respecter la loi morale ou religieuse que je choisis mais m’interdit de l’imposer aux autres. Comme citoyen appelé à participer à la formation de la loi, je ne puis donc envisager le bien de tous d’après mes impératifs singuliers mais d’après la seule exigence de l’intérêt général. Celui-ci ne saurait être la conclusion d’une vérité révélée, source d’arbitraire et de violence”.
Le Parti de gauche est donc partisan de la suppression de ce particularisme mosellan et… alsacien. »
Financer seulement l’enseignement de trois religions, c’est injuste
Joint par téléphone, Jean-Yves Causer explique que le Parti de gauche lui reproche son analyse, perçue comme un « soutien actif au maintien du Concordat ». Expliquant avoir exprimé un « engagement personnel », Jean-Yves Causer récuse ce raccourci :
« Je suis de gauche, laïc, fils de communiste breton. Je suis contre le financement de l’enseignement privé. Mais à partir du moment où le droit local organise des cours de catholicisme, de judaïsme et de protestantisme, pourquoi les musulmans n’auraient pas les mêmes droits ? C’est injuste. Nos camarades musulmans n’ont pas à être marginalisés. »
Soutenu par Les Alternatifs, la tête de liste « persiste et signe » :
« J’irais même plus loin que les cours de religion. Je pense qu’il faudrait des cours de culture religieuse dans toute la France. Nos jeunes sont de plus en plus incultes sur cette question. Après, il ne faut pas s’étonner de la montée de l’intégrisme. »
Précisant sa position, Jean-Yves Causer ajoute qu’il faudrait consulter les musulmans d’Alsace sur cette question :
« Faire de la politique autrement, c’est demander leur avis aux gens et les écouter. Surtout lorsqu’ils sont vulnérables. »
Le Parti de gauche, mené par Jean-Luc Mélenchon, est un membre « historique » du Front de gauche, créé à l’occasion des élections européennes de 2009, avec le Parti communiste français (PCF) et Gauche unitaire, issue du NPA.
Reconduit pour les élections régionales de 2010, le Front de gauche a été rejoint, à cette occasion, par Les Alternatifs, République et Socialisme, la Fédération pour une alternative sociale et écologique (Fase), le Mouvement politique d’éducation populaire (M’Pep), et le Parti communiste des ouvriers de France (Pcof).