Voici un sujet qui n’est pas toujours traité avec calme et raison et qu’on doit féliciter la revue ProChoix d’aborder (dans son n°60, décembre 2013). Parce qu’elle relève de prescriptions religieuses, la circoncision tend en France à rester dans la sphère privée, d’autant que nous avons échappé à la vague de puritanisme qui à la fin du XIXe siècle s’est développée dans le monde anglo-saxon sous l’influence du corps médical pour en faire un remède à nombre de maux, et en particulier à la masturbation.
Dans ce dossier présenté par Fiametta Venner (1)Qui, dans le même numéro de la revue, signe un portrait cinglant d’Alain Soral, son itinéraire doriotiste, ses stratégies de communication et son business… l’article du responsable des questions éthiques de l’Association française d’Urologie examine les aspects médicaux et fait au passage justice de deux idées reçues : une sexualité moins satisfaisante pour l’homme circoncis ; une protection contre l’infection par VIH (au mieux un risque de contamination moins élevé dans les zones à prévalence élevée). Le Dr Castagnola témoigne aussi de l’importance que l’acte soit réalisé dans un établissement de soins, mais il l’est alors aux frais des familles qui exercent une certaine pression sur les praticiens pour que des « raisons médicales » soient trouvées…
L’actualité du sujet provient en Europe de la décision d’un tribunal allemand, à Cologne en 2010, condamnant un médecin sur plainte des parents mais jugeant de surcroît que la circoncision pour raisons religieuses était condamnable au motif que « le droit fondamental de l’enfant à l’intégrité physique l’emporte sur les droits fondamentaux des parents ». La polémique au sein des institutions représentatives des religions juive et musulmane a été relancée avec la résolution du Conseil de l’Europe du 1er octobre 2013 sur « le droit des enfants à l’intégrité physique », qui range au rang des atteintes à cette intégrité la circoncision des jeunes garçons et invite les Etats-membres à réglementer la pratique, notamment en s’assurant que l’enfant soit en mesure d’exprimer son consentement.
Un texte très éclairant de Serge Hefez élève débat par la prise en compte de la dimension symbolique de la circoncision, signe à la fois de filiation dans la lignée paternelle et de filiation au groupe. Dès lors, une solution se dessine, déjà empruntée par certains juifs : pratiquer un rituel non sanglant d’ « alliance sans coupure » (brit shalom).
Le dossier présente aussi le mouvement dit « intactiviste » qui s’est développé en Amérique et est aujourd’hui représenté en France par le Droit au corps.
Outre les droits des enfants, une raison particulière devrait inciter les laïques et les féministes à soutenir la reconsidération de la pratique rituelle de la circoncision : c’est que celle-ci se base sur l’exaltation de la masculinité et sur la différence irrémédiable des sexes.
Notes de bas de page
↑1 | Qui, dans le même numéro de la revue, signe un portrait cinglant d’Alain Soral, son itinéraire doriotiste, ses stratégies de communication et son business… |
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