Avec le soutien de 260 organisations syndicales (CGT, FSU, Solidaires, Confédération paysanne), associatives, mutualistes et politiques (notamment LFI, PC, EELV, PS), la Convergence nationale Services publics (Convergence SP), la Coordination nationale des hôpitaux et des maternités de proximité et la Convergence rail tenaient leur initiative nationale à Lure comme point d’étape et de départ d’un travail de convergence pour des mobilisations futures concernant la Sécurité sociale et les services publics. Près de 3000 personnes, venues des différentes régions de l’Hexagone, se sont rassemblées les 12, 13 et 14 mai 2023 dans cette sous-préfecture de la Haute-Saône (70), exemple typique du recul des services publics des zones rurales et périurbaines de notre pays avec un comité de vigilance affilié à la Convergence parmi les plus dynamiques de France. Étaient prévus :
- une dizaine d’ateliers vendredi soir, samedi et dimanche matin ;
- un « village » avec les stands des organisations présentes ;
- une manifestation dans les rues de Lure avec un arrêt devant chaque type de services publics agressé par les contre-réformes néolibérales avec pour chacun d’entre eux des prises de parole de responsables d’organisations présentes. Le tout agrémenté par les prestations d’un ensemble de percussions et par des « rosies », troupe de féministes contestataires pour le progrès social ;
- une organisation remarquable du comité de vigilance 70 pour l’hébergement, les repas, l’ambiance fraternelle et la logistique.
Débats sur la Sécurité sociale
Pour cela, la Convergence SP estime nécessaire « un changement de cap » de la politique nationale et locale avec « des mesures contraignantes » notamment pour introduire au sein de la Sécurité sociale et des services publics la démocratie, absente aujourd’hui, permettant « un véritable droit d’intervention dans la gestion des services publics des citoyens-usagers et des personnels ». Pour la Sécurité sociale, la volonté – largement rappelée dans l’atelier Sécurité sociale du vendredi soir – est de revenir aux principes fondateurs de celle-ci (unicité, financement par la cotisation, installation de la solidarité définie par l’adage « à chacun selon ses besoins, chacun y contribuant selon ses moyens » et enfin à la gestion de la Sécurité sociale par les représentants élus des assurés sociaux lors d’élections spécifiques pour toutes les caisses de Sécurité sociale). Toujours pour la Sécurité sociale, la Convergence SP appelle à continuer « à poursuivre la mobilisation sur les retraites notamment le 6 juin 2023 » et « à travailler à une mobilisation large en vue du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2024 (PLFSS 2024) ».
Dans l’atelier Sécurité sociale du vendredi soir a été engagé un premier débat sur une feuille de route de la Convergence SP en matière de Sécurité sociale. Le projet proposé a été largement amendé en séance et doit faire l’objet de plusieurs allers-retours avec les centaines de participants qui ont laissé leurs adresses électroniques. Suivront des visioconférences, des réunions publiques et des séances de formation et d’éducation populaire refondée. Le grand intérêt de ce travail est la participation de plus de 300 militants très représentatifs de l’arc de soutien à la Convergence SP (militants syndicaux, politiques, associatifs, mutualistes).
Le format utilisé dans cette courte séance de deux heures a permis après une présentation générale de moins de 5 minutes de donner l’essentiel de la parole à la salle. Mais le délai de cet atelier beaucoup trop court pour parler de l’ensemble du sujet de la Sécurité sociale (budget de la Sécurité sociale 570 milliards d’euros pour un budget de l’État, tous ministères confondus, de 455 milliards d’euros). Aussi, plusieurs camarades sont venus après la séance pour dire qu’il manquait le débat sur le « comment » arriver aux fins proposées en séance. Ce débat pourra donc avoir lieu durant l’année qui vient avec tous ceux que cela intéresse. En séance également a été proposé de ne pas se borner aux deux branches les plus importantes (santé-assurance-maladie et retraites), mais aussi aux trois autres (branche famille avec ses prestations familiales, précarité, logement et animation sociale, accidents du travail et maladies professionnelles et enfin la branche autonomie incluse dans le Code de la sécurité sociale en août 2020).
L’énergie
En ce qui concerne l’énergie, le débat du dimanche matin a été très fécond grâce aux camarades de la Fédération Mines-Énergie de la CGT, de Sud Énergie et du Mouvement national pour la lutte pour l’Environnement (MNLE). Voilà la synthèse de cet atelier dont l’unanimité est pour un processus visant à la suppression progressive des énergies fossiles :
Pour l’énergie, afin de répondre aux besoins, de ne plus avoir 12 millions de précaires énergétique, il est indispensable de rompre avec le marché spéculatif énergétique, d’avoir un vrai service public de l’énergie gérant un mix énergétique pour planifier et répondre aux besoins sociaux, environnementaux, reconstruire l’industrie, maîtriser le prix de l’énergie, développer la recherche-étude-développement. Le prix doit correspondre au coût, stable depuis 30 ans, de production, de transport, de distribution. Le marché européen de l’énergie n’empêche pas la France de faire ce choix.
À noter que deux camarades de Sortir du nucléaire ont, en séance, contesté la non-volonté de la tribune d’aller dans le sens de l’éradication du nucléaire. A contrario, un autre camarade a contesté les hypothèses de Négawatt, partisan de la sortie du nucléaire, en prenant l’exemple de l’hypothèse de Négawatt sur la nécessité d’augmenter le nombre de personnes par logement pour arriver à la sortie concomitante des fossiles et du nucléaire en 2050 alors que la diminution du nombre de personnes par logement est absolument nécessaire pour aller dans le sens des droits des femmes qui ont besoin des possibilités de décohabitation à la suite des séparations et des divorces en forte augmentation.
Les camarades en tribune se sont déclarés prêts à répondre à toute sollicitation sur des initiatives d’éducation populaire refondée sur l’énergie. Les participants à cet atelier ont pu voir la qualité de l’analyse du réel par les intervenants.
Les autres sujets
Dans les ateliers du samedi matin et du dimanche matin a été actée la volonté des participants à poursuivre le travail pour répondre « aux difficultés de la vie de tous les jours, au chômage et à l’urgence climatique » concernant les besoins vitaux des citoyens et de leurs familles « notamment sur l’alimentation, l’eau, la santé et le logement » qui « doivent être garantis par une évolution et une extension du service public. Pour l’alimentation, son niveau de qualité et d’accessibilité pour toutes et tous doit être garanti en permettant aux agriculteurs faisant le choix du conventionnement de vivre décemment. « Pour l’Eau la gestion en régie publique est indispensable d’autant plus que la ressource de l’eau se fait de plus en plus rare. Pour le logement il faut garantir à toutes et à tous un logement décent stable, abordable accessible et respectueux du climat, pour un droit au logement universel, inconditionnel et protecteur. »
Pour la préparation de la campagne des européennes, l’engagement de la Convergence SP se résume comme suit :
« Avec des organisations d’autres pays d’Europe, nous tiendrons une réunion avant la fin de l’année pour discuter des politiques et des batailles à mener afin de maintenir et développer les services publics au plan national et européen, sortir du dogme du « tout concurrence », de l’austérité et débattre de moyens de financement étendus pour les services publics. L’enjeu des services publics doit être débattu à l’occasion des élections européennes de 2024. Nous allons travailler en commun à interpeller les listes et sensibiliser les opinions publiques sur celui-ci. »
D’autres revendications sont apparues dans les ateliers, à savoir développer une campagne contre la suppression des relations humaines dans les services publics au profit d’une dématérialisation forcée et déshumanisante, pour la défense et la promotion des statuts spécifiques des fonctionnaires ou des personnels de droit privé (comme à France travail ou à la Sécurité sociale par exemple) permettant un meilleur service des usagers de la Sécurité sociale et des services publics, un renforcement du nombre de personnels formés et mieux payés notamment dans les Ehpad, les hôpitaux, etc., de combattre le processus en cours d’ouverture à la concurrence qui va de pair avec une dégradation du service rendu comme dans les transports, etc., de lutter « pour une fiscalité plus juste avec davantage de progressivité », de renforcer les investissements dans le ferroviaire pour pouvoir diminuer l’utilisation des transports concurrents à émission forte de gaz à effet de serre comme l’avion, la voiture individuelle et le fret par camion, de développer « la gratuité ou la progression tarifaire selon les services publics » et les retours d’expérience menés.
Lecteurs de ReSPUBLICA, dîtes-nous ce que vous pensez d’une part de cette initiative et d’autre part sur ce qui devrait être fait dans le domaine de la Sécurité sociale et des services publics ?