Nous ne revenons pas sur les citoyens non inscrits sur les listes ou mal inscrits. Comme nous l’avons noté pour le premier tour de la présidentielle du 23 avril, 11,4 % de l’électorat potentiel est non-inscrit sur les listes électorales et 15,1 % des inscrits sont mal inscrits, c’est-à-dire ne sont pas inscrits où ils habitent.
Par contre, un problème de légitimité s’annonce avec une abstention record pour la Ve République, alors que plus d’un inscrit sur les listes sur deux décide de ne pas voter et que la grande majorité de l’assemblée ne représentera in fine que 16 % des inscrits. Quand les citoyens qui étaient hostiles à la loi El-Khomri I verront que Macron va faire passer par ordonnances une loi El Khomri II plus anti-sociale que la première et davantage encore (la prochaine réforme des retraites, etc.), il est probable que le président fera l’objet du même désamour que Hollande. Mais la crise politique risque d’être plus forte que la précédente. Et alors, s’en suivra une course de vitesse entre la gauche et l’extrême droite comparable à celle que nous venons de vivre mais en plus marqué encore. Préparons-nous à cette échéance.
Revenons au scrutin lui-même. En fait, d’après Ipsos, ce sont les jeunes (64 % chez les moins de 35 ans soit presque le double des plus de 60 ans) et les couches populaires (61 % des employés et 66 % des ouvriers se sont abstenus) qui sont les principaux abstentionnistes. Cela explique le fort recul de la France insoumise et du Front national par rapport au premier tour de la présidentielle 2017 où ils avaient percé dans ces catégories sociales, en particulier chez les jeunes.
Chez les votants, la France insoumise a notamment perdu du terrain chez les 18-24 ans (avec 18 %, contre 30% pour Jean-Luc Mélenchon dans cette catégorie au premier tour de la présidentielle, -12 points), chez les employés (14 %, -8 points), les ouvriers (11%, -13), les chômeurs (18 %, -13), les bas revenus (13 %, -13). Le FN reste le premier parti chez les ouvriers (29 %) malgré son recul massif par rapport à la présidentielle.
Cela dit, le rapport des forces à gauche a changé dans pratiquement toute la France. D’une façon générale, la France insoumise est à la première place dans les forces politiques de transformation sociale très loin devant le PCF qui s’effondre, y compris dans certains de ses bastions historiques (le Val-de-Marne entre autres).
Le Parti socialiste subit un déclin sans précédent, que ce soit du fait de ses frondeurs ou pas.
Le second tour ? Le mieux placé des candidats France insoumise, PCF et autres forces de gauche qui s’opposent manifestement aux politiques d’austérité néolibérales, doit bénéficier d’un désistement.
Pour la suite de l’histoire, plus que jamais, il faudra renforcer le travail d’implantation des idées de transformation sociale dans les couches populaires et les jeunes, sans quoi il n’y aura pas de transformation sociale. A noter que la poussée de Jeremy Corbyn en Grande-Bretagne est dû à une campagne essentiellement portée sur les couches populaires, la défense de la protection sociale, des services publics, de l’emploi et du pouvoir d’achat.
Plus que jamais, le travail d’éducation populaire refondée en lien avec les luttes sociales doit prendre force et vigueur.
Plus que jamais, il conviendra de sortir des schémas post-keynésiens qui n’ont pas d’avenir.
Hasta la victoria siempre !