Bernard Ravenel, une vie de militant

Bernard Ravenel était né en 1936 dans un milieu assez modeste. Sa mère était une institutrice laïque dans un village de la Sarthe et s’était remariée avec un cheminot, mort prématurément de tuberculose, une maladie dont souffriront plusieurs membres de la famille de Bernard Ravenel, lui y compris. Si sa mère était de sensibilité socialiste, Bernard Ravenel, scandalisé par les conditions de la vie ouvrière de son grand-père dans la Somme, tomba assez tôt dans la mouvance communiste, d’abord par le journal Libération qu’il lut pendant ses années de lycée effectuées au Mans, grâce à une bourse. En terminale, il eut comme professeur d’histoire Jacques Ozouf, le mari de Mona Ozouf, qui lui fit connaître d’autres historiens communistes comme François Furet et Denis Richet.

Du communisme au PSU

Il tomba ensuite malade et séjourna dans un sanatorium, c’est à cet endroit qu’il adhéra au Parti communiste : à la cellule du sanatorium. En raison de son état de santé, il fut réformé, mais il était résolu à se battre contre la guerre d’Algérie à laquelle il fut tout de suite opposé. L’intervention de Hongrie provoqua l’explosion de la cellule du sanatorium et constitua pour Bernard Ravenel la rupture fondamentale avec le Parti communiste qu’il quitta en 1956, tout comme François Furet et les époux Ozouf, une rupture aggravée encore deux ans plus tard avec l’exécution d’Imre Nagy⁽¹⁾Premier ministre de la Hongrie qui avait participé à l’insurrection de 1956.. Par l’intermédiaire de ces opposants du communisme, il se rapprocha du journal Tribune du communisme, également animé par un historien, Jean Poperen, une figure qui jouera un rôle très important dans les premières années du PSU. Sorti du sanatorium, Bernard Ravenel poursuivit ses études d’histoire à la Sorbonne à Paris, logé à la résidence universitaire d’Antony. Victime d’un accident nécessitant une hospitalisation, Bernard Ravenel n’assista pas au congrès d’unification (de l’UGS, du PSA et de Tribune du communisme) qui donna naissance au Parti socialiste unifié en 1960, auquel il adhéra immédiatement.

Contre la guerre d’Algérie

Dans les premiers mois qui suivirent la création du PSU, Bernard Ravenel fut particulièrement mobilisé contre la guerre d’Algérie — premier combat fondateur du PSU.

Dans les premiers mois qui suivirent la création du PSU, Bernard Ravenel devint le secrétaire de section de la résidence universitaire d’Anthony et fut particulièrement mobilisé contre la guerre d’Algérie — premier combat fondateur du PSU. À cette période, Bernard Ravenel était convaincu que l’opposition à la guerre d’Algérie devait d’abord se manifester dans l’action collective ; s’il ne s’opposa pas aux actions individuelles de type insoumission, il pensait que les militants ne pouvaient pas s’en contenter et qu’il était important de montrer une mobilisation massive. Cet engagement pacifiste, en faveur de la non-violence, marquera ses engagements futurs. Au début des années 1960, il fut notamment chargé de constituer les GAR (groupes d’action résistance) imaginés par le PSU pour lutter contre l’OAS, ce qui lui valut d’être menacé. En 1965, il obtint l’agrégation d’histoire et fut nommé à Amiens, il revint à Paris en 1971 où il enseigna au lycée Paul Valéry jusqu’en 1997.

Il se présenta plusieurs fois à des élections législatives ou cantonales avec l’étiquette PSU et devint membre de son bureau national en 1972, fonction qu’il occupa jusqu’en 1984.

Un engagement internationaliste

Surtout, il fut responsable du secteur international du PSU, ce qui lui permit d’effectuer plusieurs voyages, au Chili et au Portugal notamment, et de poursuivre une réflexion sur la politique internationale du PSU. Il poursuivra cet engagement internationaliste de plusieurs façons après la fin du PSU. On peut notamment citer en 1991 la création de la revue Confluences-Méditerranée à laquelle il participa activement, ainsi que l’Association France-Palestine solidarité (AFPS) qu’il présida de 2001 à 2009. Ses qualités de conciliateur lui permirent de réussir à y faire dialoguer les différentes tendances du mouvement pro-palestinien français. Il fut également l’un des fondateurs du CODENE (Comité pour le désarmement nucléaire en Europe)

Bernard Ravenel fut membre du PSU jusqu’à sa dissolution en 1989, dissolution qu’il avait souhaitée, considérant que le parti n’avait plus d’avenir.

Il resta par la suite à l’écart des partis politiques, même s’il participa à plusieurs initiatives : il fit partie du comité de rédaction de la revue marxiste M (renommée Mouvements par la suite) et participa également à Refondation (un mouvement constitué de communistes insatisfaits de la politique de la direction du PCF des années 1980-90 et qui souhaitaient une « refondation » du parti en partant du réel, d’une analyse prenant en compte toute la réalité de la situation, avec la volonté de faire de la politique autrement).

Dans la continuité de la commémoration du cinquantenaire du PSU, en 2010, Bernard Ravenel acheva son travail historique sur ce parti avec la publication de Quand la Gauche se réinventait. Le PSU, Histoire d’un parti visionnaire 1960-1989. À partir de 2013, il participa aux activités de l’Institut Tribune socialiste, association chargée de la transmission de la mémoire du PSU, qu’il présidait depuis 2016. Dans ce cadre, il intervenait fréquemment comme historien et témoin de cette période.

Au-delà de ce parcours exemplaire qui témoigne de convictions fermes et d’un engagement sans faille, ses anciens camarades rendent hommage à une personnalité attachante, très bienveillante et évoquent son air fringant et espiègle inoubliable.