Dans le prolongement des promesses du candidat Hollande, vous avez déclaré à propos de cette “ouverture”, le 17 juin dernier, devant l’assemblée générale de l’Union nationale des associations familiales (UNAF), « c’est une mesure d’égalité, ce seront les mêmes droits, mais également les mêmes devoirs… Même responsabilité pour chacun, celle de s’engager. S’engager vis-à-vis de l’autre, quand on choisit de s’unir par la loi. S’engager vis-à-vis de ses enfants, quand on devient parent. S’engager à respecter leur droit d’être élevé dans de bonnes conditions, de recevoir de l’amour, mais aussi des repères. »
Propos clairs et raisonnables. La réponse que vous avez reçue de l’institution, de la bouche d’un président issu de la Confédération syndicale des familles (CSF) et qu’on aurait pu croire plus proche de l’actuelle majorité, montre bien le décalage de l’UNAF à l’égard de l’évolution des pratiques et des opinions du pays !
Il faut connaître les rapports de force au sein de cette institution pour comprendre l’influence de ceux qui considèrent l’homosexualité comme une pathologie ! La droite catholique qui représente une composante en voie d’élimination au sein du paysage politique actuel s’ancre non seulement sur l’UNAF mais sur des positions occultes : l’Opus dei dont la présence dans les cabinet de l’ancienne Présidence a été bien notée, au point de faire reculer les volontés pourtant modérées de Nadine Morano de promouvoir un « statut du beau-parent » qui aurait pu recueillir un accord de bon sens dans une société où les familles recomposées sont de plus en plus nombreuses.
Mais UMP et FN se sont clairement rangés dans la campagne électorale, face à un danger dont on peut penser qu’il n’était pas l’ennemi principal, dans le camp de l’ordre moral. Et aujourd’hui, le brave président Fondard déclare : « L’UNAF est attachée au maintien des principes qui réservent le mariage aux couples composés d’un homme et d’une femme, et aux principes fondamentaux de la filiation fondés sur le triptyque ”père, mère, enfant”.»
Manquant un peu de munitions, il fait appel à… Mme Guigou (!) qui déclarait jadis lors des débats à l’Assemblée nationale sur le Pacs : « Mon refus de l’adoption pour des couples homosexuels est fondé sur l’intérêt de l’enfant, sur son droit à un milieu familial où il puisse structurer son identité et épanouir sa personnalité ».
Et M. Fondard de conclure sur l’apocalypse des « conséquences en chaîne pour toutes les familles : modification du mariage, de la filiation, de l’autorité parentale, de l’adoption, de la présomption de paternité, des congés parentaux, ou encore de l’accès à la procréation médicalement assistée. »
Eh bien oui, M. Fondard, voilà les chantiers à engager. Mais ce n’est pas dans l’enceinte d’une organisation non représentative, avec la pratique du vote familial et la surreprésentation de la droite catholique et du familialisme de droite qu’ils peuvent avoir lieu !
Quelles que soient les réserves qu’on puisse avoir à l’égard des multiples instances consultatives qui décorent les hauteurs de la République, il en est une – le Haut Conseil de la Famille (HCF) – où la présence des partenaires sociaux fut gagnée de haute lutte, qui représente aujourd’hui mieux que l’UNAF les préoccupations quotidiennes des citoyens et de leur familles.
Sur la morale et les mœurs, que l’on reste hors des instances pour dicter les principes. Que l’on fasse des études sur ce que deviennent, par exemple, les enfants élevés dans des couples de même sexe, pour répondre à Mme Guigou si ce n’est pas fait depuis le temps !
Comptons sur les parlementaires, parfois mieux au contact des évolutions sociétales, comme dans le cas de la fin de vie, pour faire aboutir dans la nouvelle configuration un débat honnête sur ces questions.
Comptons sur vous, Dominique Bertinotti, pour porter cet espoir. Et, si vous le permettez, pour vous suggérer de proposer au gouvernement :
- sur le fond, des modifications de la loi de 1975 définissant la famille,
- sur la forme, d’ajouter à l’intitulé de votre portefeuille : ministère de la famille et de l’enfance, c’est peu de chose pour décentrer les perspectives, mais ce serait un signe.