Cela devient lassant : encore une fois, une fois de plus, les trésors publics vont devoir renflouer les banques européennes. En fait, depuis 2008, ils n’ont jamais cessé. À grand coup de liquidités attribuées sans limites par la Banque centrale européenne (BCE), d’achats par celle-ci sur le marché des « covers bonds » bancaires (obligation de couverture), de garanties multiples accordées par la Banque européenne sur les opérations interbancaires, il s’agit en fait d’un flux continu d’argent frais en direction de nos « chères » banques (au sens propre du terme).
Sous un brouillard savamment entretenu, les faits sont d’une simplicité enfantine : depuis la crise des « subprimes » (2007) et la faillite de Lehman Brothers (2008), la majorité des banques européennes de premier plan sont en fait des « banques zombies ». Par ce vocable « draculesque », on entend des organismes financiers vidés de leur substance, c’est-à-dire sans capacité de survie en dehors d’une perfusion étatique permanente. En fait, le système bancaire a perdu des milliers de milliards de dollars dans la crise de 2007-2008, et ne s’en est jamais remis. À cette époque, le système financier mondial aurait dû faire faillite. L’option prise à l’époque a été de maintenir coûte que coûte cette sorte de « château de cendre » pour le plus grand malheur des peuples et des nations.
Prenons l’exemple de Dexia. L’on présente aujourd’hui sa faillite et son démantèlement comme la conséquence de la crise de la dette des États, en particulier de la Grèce. Il n’en est rien… ou si peu. En vérité, Dexia était engagée au milieu des années 2000 pour, sans doute, des dizaines de milliards sur le marché immobilier américain et les subprimes en particulier. Pour se couvrir, elle a eu la « fausse bonne idée » d’acheter des assurances de couverture contre une baisse éventuelle du marché en question que l’on nomme CDS (credit default swap). Pas de chance, ces CDS avaient été émis par… Lehman Brothers ! Bref, à la fin 2008, Dexia s’est retrouvée dans la situation d’un particulier ayant perdu sa maison dans un incendie et dont la compagnie d’assurance viendrait de faire faillite ! Ainsi, depuis trois ans, la banque franco-belge vivotait, consumant progressivement les milliards d’euros octroyés par les états français et belge. Aujourd’hui, au prétexte de la crise grecque, alors même que Dexia est peu engagée sur la dette de cet état, on solde les comptes, on liquide et on démembre ce fleuron de la finance européenne… les Grecs ont bon dos !
Pour le reste, Barroso et consorts nous proposent à l’unisson un vaste plan de recapitalisation des banques… et il faut faire vite ! Comme les investisseurs privés ne vont certainement pas se précipiter sans garantie étatique, les banques centrales des états, la BCE ou le fond de sauvetage européen (FESF) vont être mis à contribution, ou plutôt les contribuables européens devront endosser ces nouvelles dettes. Pour combien ? Impossible à dire, car les montants des pertes bancaires de l’épisode 2007-2008 sont inconnus. Au minimum, il faudrait plusieurs milliers de milliards d’euros, des sommes bien sûr impossibles à assumer pour les états. L’on en restera donc à quelques centaines de milliards en liquide et en garanties. Bref, comme d’habitude, ce sera « trop peu et trop tard ».
Notons que ce déversement d’argent public aura une « petite conséquence » : la perte de la notation triple A pour la France, et donc une augmentation des frais de la dette publique française… Cela s’appelle un cercle vicieux.
Au fait, qu’en pense le candidat désigné par les primaires ? Hollande est-il pour ou contre la recapitalisation des banques ? Si oui, quel contrôle étatique propose-t-il ? Bref, va-t-il, comme les autres socialistes européens, participer à ce renflouement permanent sans aucune issue ni aucun espoir ? Va-t-il, comme Papandréou ou Zapatero, imposer l’austérité à leur peuple pour combler une dette d’État liée à la débine des banques et à une récession due à la crise du système financier ?
Il faudra bien un jour que nos amis, socialistes ou non, comprennent que ce système financier est définitivement mort il y a trois ans.
L’ordre du jour appelle la mise en place d’un nouveau système monétaire en réseau, fondé sur la possibilité pour chaque personnalité physique ou morale de « faire la banque » et d’émettre de la monnaie en correspondance de son épargne.
Aujourd’hui, faire un pas dans cette direction, c’est être progressiste. Maintenir un système moribond c’est être réactionnaire. Voilà le seul dilemme.
Nous y reviendrons prochainement dans ReSPUBLICA.