La presse annonçait il y a deux semaines une semaine « décisive », façon pour les chiens de garde médiatiques de dire que si la mobilisation s’essoufflait, c’était une défaite supplémentaire que le mouvement social enregistrait. Et la mobilisation ne s’essouffla pas. Bien au contraire puisque nous avons assisté à un maintient de la mobilisation, un élargissement de sa base et une amplification des actions.
S’il fut une semaine décisive, c’est la semaine dernière. Après le succès incontestable de la 6ème mobilisation d’ampleur nationale en 6 semaines, avec un cadre unitaire préservé, l’intersyndicale s’est réunit alors que le texte de la contre-réforme était encore en discussion au Sénat. Et force est de constater que le Sénat a mieux respecté les droits de l’opposition que l’Assemblée Nationale, discréditant encore plus son président Bernard Accoyer, accusé de putsch et de forfaiture par l’opposition pour avoir interrompu les débats. En pré-campagne pour les sénatoriales de 2011, le Sénat a en effet décidé lundi, sur pression des sénateurs communistes et du Parti de Gauche, de reporter à nouveau le vote solennel sur l’ensemble du projet de loi à jeudi au lieu de mercredi, tout en envisageant que les débats pourraient se poursuivre jusqu’à dimanche, ce qui aurait empêché un vote solennel qui requiert 50% de présents. La décision du gouvernement d’utiliser le 49-3 a changé la donne. Pour quelques petits jours de gagné, c’est le passage en force contre le débat démocratique qui marquera le texte.
Pour en terminer avec le parlement, l’ironie du sort veut que c’est Bernard Accoyer qui rédigea la proposition de loi qui mis fin au CPE trois semaines seulement après son adoption au travers d’une loi cosignée par… Gérard Larcher, actuel président du Sénat.
L’intersyndicale qui a suivi la dernière journée de grèves et de manifestations interprofessionnelles et unitaires de mardi s’est donc déroulée avant le « vote » du Sénat, ce qui a permis d’annoncer de nouvelles mobilisations unitaires, alors que la CFE-CGC avait laissé entendre qu’elle s’en retirerait si le projet de loi était voté.
Où est la légitimité ?
«Ce n’est pas un engagement que j’ai pris devant les Français. Je n’ai donc pas de mandat pour faire cela.» dixit l’omniprésident en mai 2007 quand on lui posait la question de savoir s’il allait reculer l’âge légal de la retraite. Et aujourd’hui, avec 69% d’opinions défavorables, il renie sa parole et s’arqueboute sur une contre-réforme dont il a fait le point d’orgue de son quinquennat. Mais aujourd’hui, c’est avec 71% des « voix » que les salariés défilent dans les rues et c’est bien eux qui ont le « mandat » pour empêcher un recul social emblématique.
La personnalisation du pouvoir qu’il a voulu place Sarkozy seul face au peuple. Il aurait du prendre la parole en allocution solennelle , il ne l’a pas fait, préférant jouer le pourrissement, en espérant des débordements capables de retourner une partie de l’opinion et en comptant sur les vacances de la Toussaint pour faire passer l’orage.
Le scénario est désormais écrit, après le passage en commission mixte paritaire, la loi sera définitivement votée cette semaine et l’omniprésident viendra alors parader à la télévision pour siffler la fin de la partie avec sa morgue habituelle.
Mais plusieurs signes laissent penser que la mobilisation ne retombera pas comme un soufflé, notamment le fait que ce n’est pas seulement dans les rues de Paris ou des grandes villes que les français manifestent, mais dans les rues des sous-préfectures, ce qui montre l’ancrage du mouvement de refus.
Face à une incompétence mêlée d’un empressement à satisfaire la caste de ceux qui l’ont fait empereur, le mépris de Sarkozy doit déterminer le peuple à poursuivre sa mobilisation et refuser de se soumettre.
Ce n’est pas en 2012 que cette forfaiture sociale doit être sanctionnée, c’est la semaine prochaine et aussi longtemps que nécessaire, unis dans la rue et dans la grève, qu’il faut exiger son enterrement.