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« Faire vivre la laïcité », sous la direction d’A. Seksig

Vient de paraître Faire vivre la laïcité, ouvrage collectif, utile et singulier (1)Faire vivre la laïcité, sous la direction d’Alain Seksig, Avant-propos d’Élisabeth Badinter, Le Publieur, mai 2014, 310 p., 22 €.. Il rend enfin public deux  des derniers travaux de la mission Laïcité du Haut conseil à l’intégration (HCI) liquidée par  le cabinet de Jean-Marc Ayrault (2)Le Comité de réflexion et de propositions sur la laïcité  auprès du HCI  a été installé en 2010 par le président du HCI suite à la décision du Président de la République de confier au HCI une mission de suivi des questions liées à l’application du principe de laïcité. Les services du Premier ministre ont mis fin à l’automne  2013 à cette  mission,  peu après une campagne de presse mensongère contre son rapport sur l’enseignement supérieur qui avait mystérieusement « fuité », et peu avant l’interdiction par  le cabinet du Premier ministre de la publication de ce rapport par la Documentation française. Et, pour que la signification politique de cet « avis de décès » de la mission Laïcité du HCI n’échappe à personne, on trouva en décembre 2013 sur le site du Premier ministre un « rapport sur la refondation de la politique d’intégration » d’inspiration communautariste, visant à substituer une politique dite d’ « inclusion » à une politique républicaine d’intégration. La mise en ligne sur le site du Premier ministre de ce rapport signa sans gloire le  second « avis de décès » de la mission Laïcité du HCI.

La laïcité dans l’enseignement supérieur et dans la société

Le livre contient l’Avis du 28 mars 2013, Expression religieuse et laïcité dans les établissements publics d’enseignement supérieur en France. Ce rapport  fait le point avec précision sur les problèmes rencontrés à l’université et dans les écoles supérieures en matière d’expression religieuse et de laïcité : professeurs empêchés de faire cours au nom de convictions religieuses, récusations d’un examinateur en raison de son sexe, financements et allocations d’un local à des organisations manifestement communautaristes… Tout en cherchant à préserver la tradition libérale de l’Université, le rapport prend acte que la réalité universitaire  d’aujourd’hui n’est plus celle du XIXe siècle et qu’il convient de garantir par la neutralité laïque la liberté et la sérénité indispensables à l’enseignement et à la recherche.

Le second grand texte du volume rassemble les Actes des Conférences organisées en 2012 et 2013 par le HCI. L’ensemble foisonne d’analyses instruites et de discussions concrètes sur l’école mais aussi sur des secteurs de la vie sociale trop longtemps contournés quand on traite de laïcité, comme l’Hôpital, le travail social, la petite enfance et  l’entreprise privée.

Un Manifeste pour réfléchir à des solutions

Ces deux textes sont précédés d’un avant-propos d’Élisabeth Badinter et d’un Manifeste pour faire vivre la laïcité signé des 24 bénévoles qui ont œuvré à la mission Laïcité du HCI. Ce texte militant ne cache rien des difficultés présentes. Il rappelle  que des mouvances religieuses font pression sur la société pour mettre fin à la suprématie du droit civil sur les interprètes des commandements religieux. Il montre également que la laïcité est aujourdhui  prise en tenaille entre la xénophobie identitaire et le communautarisme inclusif qui aggravent chacun à leur façon la fragmentation sociale.

Contre le déni de réalité

Une réunion de présentation de cet ouvrage collectif s’est tenue mardi 27 mai dans l’Amphithéâtre Abbé Grégoire du Conservatoire national des Arts et Métiers (Paris). Autour d’Alain Seksig, cinq des contributeurs du livre ont présenté succinctement leur champ d’intervention. Natalia Baleato, directrice de la crèche Baby-Loup, a expliqué avec sobriété la pugnacité nécessaire pour résister à l’intimidation intégriste. Le Pr Sadek Beloucif (hôpital Avicenne) a rendu compte du travail déjà accompli  pour surmonter à l’aide de la laïcité les difficultés qui apparaissent au quotidien dans des établissements publics où doit aussi être respectée l’autonomie du patient. La sociologue Yolène Dilas-Rocherieux a pointé l’antagonisme  des requêtes communautaristes  et de l’article 1 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789 et insisté sur la puissance normative de la laïcité comme code de vie collective. Et Philippe Fanartzis (Paprec) a évoqué le besoin pour de nombreuses entreprises privées de se doter d’une « charte de la laïcité et de la diversité », afin d’anticiper avant que des difficultés ne surviennent.

Élisabeth Badinter a clos les interventions de la tribune sur le déni de la réalité de l’intégrisme religieux. Elle a montré que ce déni opérait comme une censure efficace contraignant  à taire un attachement très majoritaire à l’universalité laïque.

Un échange s’est ensuite engagé avec l’auditoire, qui remplissait l’Amphithéâtre, sur la querelle des accompagnateurs de sorties scolaires, l’interprétation des statistiques des conflits surgissant au quotidien, le besoin d’un « intellectuel collectif » de la laïcité et sur l’apparition à l’école publique de nouvelles tenues religieuses (3)Sur cette questions des « abayas », l’auditoire a été renvoyé la contribution de Sophie Mazet : http://www.hommes-et-migrations.fr/index.php?id=6581..

Après le 25 mai 2014

Cette réunion s’est tenue deux jours après le désastre électoral du 25 mai 2014. Elle a confirmé que les politiciens et divers idéologues de « gauche » qui ont abandonné au FN la classe ouvrière et les secteurs les plus précarisés du peuple, ont également déserté la laïcité républicaine, toujours au bénéfice du FN.  

Le combat à mener contre le déni du péril intégriste, contre les intimidations, les confusions et les détournements, n’est cependant pas perdu. Car il s’agit maintenant d’offrir à l’immense majorité des Français, sans religion et de toutes religions,  attachés à l’intégration républicaine, les moyens de se revendiquer de la laïcité, de la faire évoluer en fonction des besoins présents et d’apercevoir ce que nous perdrions  si elle venait à disparaître.

Ainsi, cette réunion appelée par « l’ex-mission Laïcité du HCI » a montré que des forces étaient partout disponibles pour assumer et propager ce bien structurant d’un peuple libre et fraternel qu’est la laïcité. Chacun, malgré les difficultés socio-économiques et à cause d’elles, peut devenir co-auteur responsable de la laïcité républicaine et contribuer ainsi « faire vivre la laïcité ». Voilà pourquoi l’article 15 de la Charte de la laïcité à l’école prévoit que « par leurs réflexions et leurs activités, les élèves contribuent à faire vivre la laïcité au sein de leur établissement ».

Notes de bas de page[+]

Notes de bas de page
1 Faire vivre la laïcité, sous la direction d’Alain Seksig, Avant-propos d’Élisabeth Badinter, Le Publieur, mai 2014, 310 p., 22 €.
2 Le Comité de réflexion et de propositions sur la laïcité  auprès du HCI  a été installé en 2010 par le président du HCI suite à la décision du Président de la République de confier au HCI une mission de suivi des questions liées à l’application du principe de laïcité. Les services du Premier ministre ont mis fin à l’automne  2013 à cette  mission,  peu après une campagne de presse mensongère contre son rapport sur l’enseignement supérieur qui avait mystérieusement « fuité », et peu avant l’interdiction par  le cabinet du Premier ministre de la publication de ce rapport par la Documentation française. Et, pour que la signification politique de cet « avis de décès » de la mission Laïcité du HCI n’échappe à personne, on trouva en décembre 2013 sur le site du Premier ministre un « rapport sur la refondation de la politique d’intégration » d’inspiration communautariste, visant à substituer une politique dite d’ « inclusion » à une politique républicaine d’intégration. La mise en ligne sur le site du Premier ministre de ce rapport signa sans gloire le  second « avis de décès » de la mission Laïcité du HCI.
3 Sur cette questions des « abayas », l’auditoire a été renvoyé la contribution de Sophie Mazet : http://www.hommes-et-migrations.fr/index.php?id=6581.
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