Alors que le budget 2013 de l’Union est infime (138 milliards d’euros, soit 1,26 % du PIB européen), rien ne va plus ! Les désaccords font la une des journaux. Il n’y a même pas eu d’accord sur de grands travaux européens qui auraient pu être une petite bouffée d’oxygène à court terme. Soyons clairs cependant, cette bouffée d’oxygène n’aurait été que de courte durée vu qu’en période de crise intense due à la crise de profitabilité du capital, ces nouveaux débouchés ne seraient acquis qu’au prix d’un endettement encore plus grand et donc inacceptable pour l’oligarchie capitaliste.
De Sarkozy-Merkel à Hollande-Merkel, c’est la continuité qui prévaut. Mais il y a pire encore. Nos amis socialistes vivent sur un manque de sincérité et sur une illusion. Le manque de sincérité provient du fait qu’ils ne disent pas qu’ils acceptent l’abdication de la démocratie au profit d’une autorité extérieure (selon les mots de Pierre Mendès-France en fin de son intervention le 18 janvier 1957 à l’Assemblée nationale lorsqu’il s’opposa au traité de Rome). L’illusion est celle de pouvoir convaincre les pays nordiques et de la Mitteleuropa (Allemagne et Autriche) de financer le fédéralisme économique ouvertement anti-démocratique et imposant la loi du capital aux couches populaires et couches moyennes intermédiaires.
Michel Zerbato a montré dans ce journal (« L’Allemagne ne paiera pas… » et les articles suivants du même auteur) pourquoi ces pays ne paieront pas à la hauteur nécessaire ni aujourd’hui ni demain. D’abord parce que les intérêts des uns et des autres vont devenir de plus en plus divergents (différence des indices conjoncturels de fécondité, inégalités sociales exorbitantes en Allemagne, géopolitique allemande, baisse du taux de profit dans l’économie réelle, etc.), ensuite car les lois du capitalisme sont plus fortes que la raison humaine, et enfin parce qu’ils ne mobiliseront de l’argent, dans le cadre de la crise de la dette, que pour défendre les intérêts privés de leurs banques et de leurs multinationales.
En bons ordolibéraux, les pays nordiques et la Mitteleuropa estiment que la compétitivité des entreprises et donc la balance commerciale doit rester du domaine des États selon le dogme de la non -interdépendance entre États dans ce domaine-là. Dans ce dogme ordolibéral, les excédents de l’Allemagne ne sont pas liés aux déficits des autres pays. Dit autrement, on essaye de nous persuader que les efforts austéritaires des différents pays s’ajoutent les uns aux autres. Malheureusement, cela n’est vrai que dans l’ethos luthérien de la souffrance nécessaire des uns et des autres. C’est à ce prix que l’Allemagne croit pouvoir garder ses excédents commerciaux. Il est en fait étonnant que les successeurs de Giscard d’Estaing et de Jacques Delors restent dans l’illusion de faire « bouger » l’Allemagne !
En fait, la seule sortie réaliste de la crise est bel et bien de préparer par un gigantesque effort la bataille centrale pour une nouvelle hégémonie culturelle préfigurant un nouveau modèle culturel, économique, politique et social. Le rapport des forces politique que nous avons en France et même en Europe (sauf peut-être en Grèce avec Syriza) ne nous permet pas d’entrevoir une issue politique à court terme. Nos ordolibéraux de droite et de gauche nous emmènent vers le désastre sans qu’une force politique soit sur-le-champ en mesure de « renverser la table » et d’en mettre une autre à la place.
Voilà pourquoi la bataille pour une éducation populaire en direction des couches populaires et des couches moyennes intermédiaires doit devenir la priorité.