Nous savons depuis longtemps que la bataille sociale et politique ou la bataille des idées est directement liée à la bataille des mots. Depuis que les communautaristes ethniques et religieux ont accepté le mot « laïcité » (ce qui n’a pas été si facile), ils tentent d’en pervertir le sens en y adjoignant un adjectif. Nous avions connu la « laïcité 2000 », puis la « laïcité ouverte », et enfin la « laïcité plurielle » popularisée à gauche par la direction de la Ligue de l’Enseignement qui reprenait cette stratégie de la doctrine sociale de l’Église. Nous avons vu les dégâts que cela a produits dans les partis de gauche, les syndicats enseignants dans les années 80. Puis, on nous a servi la « laïcité de reconnaissance » puis la « laïcité positive » de Nicolas Sarkozy. Et, bien, la Conférence des responsables de culte en France (CRCF), regroupement de la plupart des structures religieuses en France, réuni le 17 octobre dernier nous propose une « laïcité de bonne intelligence » contre une « laïcité de combat ». Le texte dit même que « les religions sont une contribution à la vitalité sociale, un garde-fou utile contre la sécularisation extrême ». Qu’est-ce à dire ? Que la « sécularisation extrême » serait diabolique ?
Faut-il rappeler que la laïcité n’a besoin d’aucun adjectif pour être un principe universaliste qui s’appuie sur la liberté de conscience et la stricte séparation entre d’une part la société civile et d’autre part les sphères de l’autorité politique et de constitution des libertés (école, protection sociale, services publics) ?
Doit-on rappeler qu’il existe aussi des athées et des agnostiques ici ou là (plus de 30 % en France !) dont ces messieurs (car très peu de femmes dans ce milieu !) ne parlent guère.
Dans leur texte, il est écrit que la loi de séparation des Églises et de l’État ne doit pas « séparer les Églises de la société ». De ce point de vue, le regroupement des épiscopats promotionne la démocratie communautaire anglo-saxonne où la vie politique et sociale est régi par le face à face entre l’État et la société civile et où la société civile domine l’État par ses lobbies que ces derniers soient religieux, ethniques, économiques, financiers, etc. Tout leur combat est là : celui de vouloir empêcher l’instauration d’une République sociale qui s’appuie sur trois piliers (et non deux comme dans la démocratie communautaire anglo-saxonne). Dans une République sociale, il y a bien entendu l’État et la société civile comme dans la démocratie communautaire, mais où le principe de laïcité lié au principe démocratique permet la construction d’un troisième pilier, le corps politique des citoyens qui lorsqu’il se penche sur le vivre ensemble et la politique à produire pour l’humanité doit pouvoir délibérer en toute liberté sans la pression de l’État ni des lobbies de la société civile.
Il va sans dire que la République sociale du 21e siècle avec ses 4 ruptures et ses 10 principes constitutifs est aujourd’hui le modèle politique qui assure la plus grande liberté à l’ensemble des citoyens et de leurs familles. Encore faut-il pouvoir ne pas se laisser berner par les semeurs de confusion.