NDLR : Homa Arjomand est une militante iranienne vivant en exil au Canada. Elle a joué en 2005 un rôle important dans la campagne – victorieuse – contre l’adoption par l’État de l’Ontario d’une législation permettant la mise en place de tribunaux jugeant des affaires civiles selon le droit islamique (charia).
Le texte qui suit est celui de son audition, le 5 février 2015, devant un comité sénatorial à Ottawa, sur la prévention de la radicalisation.
Traduit de l’anglais par Jocelyne Clarke.
J’ai structuré ma réflexion de la façon suivante : d’abord, je parlerai brièvement des problèmes posés par les communautés dites islamiques. Puis j’examinerai les questions auxquelles sont confrontés les membres de ces communautés avec l’ensemble de la société. J’axerai la fin de mon intervention sur les mesures aptes à prévenir la radicalisation au Canada.
Tout d’abord, les reculs au sein des communautés appelées islamiques :
– L’apartheid sexuel, la ségrégation des hommes et des femmes.
– L’oppression des femmes prend les formes les plus grossières et les plus scandaleuses dans ces communautés : la polygamie, les mariages arrangés, les fillettes cédées en mariage, le trafic d’enfants pour des projets de mariage, les mariages temporaires (« prêt » islamique d’une femme pour une heure, un jour, un mois, appelé « seegheh »), les crimes d’honneur… sont désormais pratiquées dans ces communautés.
– Les hommes sont les chefs du foyer (parfois juste après Dieu), ils contrôlent les finances de la famille, le choix du lieu de résidence, le patrimoine, l’emploi, le divorce, la garde des enfants et le partage des biens suivant leurs propres traditions.
Imposant les travaux d’entretien et de ménage à leurs filles et à leur femme.
Infligeant des sanctions, des menaces, restreignant leur liberté, avilissant les femmes et les filles de la famille.
Obligeant les filles de 4-5 ans à se couvrir la tête.
Interdisant aux enfants de prendre des cours de sport, de danse, de musique ou de natation.
Forçant les enfants à fréquenter les écoles islamiques et les encourageant à suivre les dogmes religieux et la tradition, à participer à des cours récréatifs contre les tenants des autres religions, ou contre les athées, promouvant la haine contre les homosexuels, les lesbiennes et tous les Occidentaux.
Obligeant les enfants à participer à des cérémonies religieuses incompatibles avec les lois et les règles de santé, d’hygiène, d’environnement et les valeurs occidentales.
Infligeant des actes cruels aux animaux.
Les membres de cette communauté appelée islamique vivent au Canada mais sont soumis à la loi de la charia et à son application.
Mais voyons les problèmes rencontrés par les membres de ces communautés par rapport à l’ensemble de la société : isolement, ségrégation, discrimination, insécurité, perte de repères, dévalorisation, absence de reconnaissance par la majorité de la société, absence d’espoir d’un meilleur avenir, sentiment d’abandon, passivité, manque de soutien social et de soutien de l’État, chômage et pauvreté…
Malheureusement, la politique du multiculturalisme a amplifié les problèmes qui viennent d’être évoqués. Cette politique a contribué à diviser la société canadienne en différentes religions et en communautés ethniques.
Cette politique a promu la tolérance et le respect pour des opinions et des croyances dites minoritaires au lieu de promouvoir le respect des droits des personnes de cette communauté.
Ces personnes, plus particulièrement les femmes et les enfants, sont restés privées de sécurité pour leur corps et leur esprit, privées de garantie de ce qui fait une vie normale dans la société actuelle, privées de l’assurance d’une indépendance personnelle, privées de la capacité de trouver la vérité dans tous les domaines de la vie sociale, et privées d’une égalité de statut au sein de la famille. La politique du multiculturalisme a offert aux religions beaucoup d’occasions d’imposer leurs propres règles à une communauté spécifique dans une plus large société. Cela a permis aux islamistes de croître et de pénétrer le système canadien.
Il n’est pas loin le temps où l’Islam politique tentait d’établir au Canada, la cour de la charia. Sans la voix de la campagne internationale contre la cour de la charia au Canada et des milliers d’activistes au Canada et dans le monde exigeant une loi pour tous et une loi laïque, l’islam politique ferait partie de notre appareil judiciaire.
Outre le multiculturalisme, la mise en place du relativisme culturel a constitué un barrage énorme à l’intégration des femmes, des enfants et de la jeunesse. Cette politique a livré les gens dans les communautés, à leur religion et leur tradition rétrograde. La culture et la religion sont devenues une question centrale, plus importante que les droits des personnes, et plus importante que les droits des enfants.
C’est dans ces circonstances qu’Aqsa Parvez et les sœurs Shafie (1)Deux cas de « crimes d’honneur » survenus en Ontario en 2007 et 2009ont été jugées et mises à mort à cause des croyances de leur propre famille, pour ne pas avoir honoré la culture et les traditions préconisées par les religieux, en particulier islamiques.
Le relativisme culturel a fourni de nouveaux moyens d’augmenter le nombre de centres et d’écoles religieuses.
Sous couvert de liberté religieuse, des Etats ont délibérément fondé des écoles religieuses et placé des enfants sous la coupe de la religion et de ses coutumes.
Avec l’argent de l’Arabie Saoudite, du Qatar, des Emirats et de l’Iran, avec les imams importés au Canada, le résultat est évident : les Etats ont ouvert la route à davantage de ségrégation, de repli et de discrimination, à dénier aux enfants la possibilité de se mêler aux autres, à les empêcher eux et leurs familles d’évoluer dans une société moderne.
Il s’agit de garder à l’esprit que le Canada n’est pas un cas isolé par rapport aux autres pays, il est directement et indirectement concerné. Je ne parle pas de l’action militaire contre EIS ni des sanctions économico-politiques contre l’Etat islamique d’Iran. Je parle d’autoriser des personnes clés de l’islam politique – c’est-à-dire du régime islamique d’Iran, ceux qui sont directement impliqués dans l’exercice de l’opposition politique, les adversaires et les tenants d’une autre croyance – à devenir citoyens canadiens. Ces personnes, tôt ou tard, considérant le soutien financier qu’elles reçoivent des islamistes, deviendront des membres actifs du système canadien. Nous ne devrons pas nous étonner de les voir devenir des membres actifs des différents partis canadiens ou même Premier ministre…
Aujourd’hui, elles construisent, organisent et planifient leur programme au Canada, étendant leur manœuvre politique non seulement au Canada mais partout dans le monde.
Chers Sénateurs, la radicalisation ne pourra arriver au Canada ou ailleurs si les islamistes ne peuvent pas s’appuyer sur leurs adeptes. Malheureusement, la politique du relativisme culturel a généré division, isolement et ségrégation. Une jeunesse perdue, ayant subi un lavage de cerveau, désespérée, une jeunesse vulnérable devenue aujourd’hui des cibles parfaites pour les islamistes. Cela suffit que les islamistes les appellent frères et sœurs, les aident financièrement, eux ou leurs familles, leur offrent une éducation dans leurs centres ou à l’étranger, comme en Angleterre, en France ou en Allemagne. Qu’ont donc ces jeunes à perdre ?
Qui blâmer ?
Je commence par moi-même parmi toutes les autres femmes, les enfants et les militants des droits de l’homme, pour ne pas avoir agi plus fortement pour une école laïque pour tous, pour l’intégration, pour la séparation de la religion et de l’Etat, pour une religion limitée à la sphère privée des individus adultes. Ensuite, je blâme le système de ne pas avoir protégé ses précieux enfants, vulnérables, de ne pas avoir défendu les droits des femmes et d’avoir mis en danger ceux des enfants ; je le blâme de ne pas avoir imposé une loi pour tous les citoyens canadiens.
Comment éviter la radicalisation ?
Malheureusement, il n’y a pas de solution miracle. Mais je crois que la radicalisation peut être stoppée conjointement par l’éducation publique et les lois.
– Notre société doit accepter de faire des lois progressistes et des règlements pour tous, sans distinction du sexe, de la race et de l’ethnie ou du pays d’origine. Une loi progressiste pour tous doit être appliqué. C’est le devoir du gouvernement de protéger l’individu, il ne doit pas y avoir d’état dans l’état. Seul un état laïque et une société laïque peut garantir la libération des femmes et la sécurité des enfants.
– Le Canada a besoin de se recentrer sur l’intégration plutôt que le multiculturalisme et de se préoccuper des droits individuels plutôt que de ceux des minorités.
– Le Canada doit stopper la politique du relativisme culturel qui a provoqué suffisamment de dégâts dans la vie des femmes et des enfants des communautés appelées islamiques.
– Il doit s’assurer que la religion reste totalement séparée du système judiciaire et du système éducatif.
– Il doit cesser le développement des écoles religieuses et des centres et être attentif aux besoins des écoles. Promouvoir plus de sports, de musique, de centres artistiques en libre accès à tous les enfants jusqu’à 18 ans.
– Excusez le terme, mais il est nécessaire que le Canada cesse de flirter avec l’islam politique. Ce ne sont pas seulement des djihadistes ou des gangsters, ou des sectes. L’islam politique est un mouvement politique qui recherche plus de pouvoir et de reconnaissance de l’Occident. Pour cela, ils sont prêts à tout. A commettre des actes durs, inhumains, comme enlever des filles de l’école pour les marier de force ou recruter des jeunes de la communauté qui ont soif de reconnaissance et d’héroïsme.
– Il convient de faire porter l’effort sur l’éducation publique pour l’égalité entre l’homme et la femme, contre les violences conjugales, à l’aide des bandes dessinées, des jeux électroniques, des programmes de télévision, des spectacles, des autres programmes pour enfants. Plutôt que l’héroïsme religieux, il faut encourager l’humanisme dans la création littéraire.
– Nous avons besoin d’auteurs qui mettent l’humanité au centre de l’univers, avec amour et passion.
– De défendre de façon inconditionnelle la liberté d’expression, sans exception.
– Au niveau international, nous devons fermer les ambassades de l’islam politique, cesser toute relation diplomatique, rompre tout contact avec ses chefs politiques
Notes de bas de page
↑1 | Deux cas de « crimes d’honneur » survenus en Ontario en 2007 et 2009 |
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