Beaucoup de commentateurs reprennent la litanie des « chiens de garde » médiatiques sur le chaos qui attend la Grande-Bretagne. Pendant qu’exulte de joie la partie de la gauche de la gauche qui confond le visible et le réel et qui croit qu’il suffit de l’application d’une simple surplombance pour ouvrir la porte du paradis…
Jaurès avait raison de dire qu’il fallait aller du réel vers l’idéal mais cela implique d’abord de détecter le réel qui se cache derrière le visible.
Le référendum britannique a été favorable au Brexit. Que faut-il pour réaliser le Brexit ? Activer l’article 50. Qui peut activer l’article 50 ? Le Parlement britannique dont les membres sont et de très loin défavorables au Brexit. Et rappelez-vous le 29 mai 2005 ! Un référendum a dit non et le Parlement a dit oui. Qui a gagné le conflit ? Le Parlement ! Donc, il faut aussi changer les institutions. Voilà une réflexion dans le réel. Et il y a bien d’autres conditions nécessaires dont nous avons déjà abondamment parlé dans ReSPUBLICA. Comme celle qu’un processus de transformation sociale et politique ne peut pas se faire sans une direction politique animant ce processus. Ou comprendre les lois tendancielles du capitalisme pour savoir quand une mutation peut s’effectuer. Ou le fait qu’aucune avancée émancipatrice ne peut se faire sans la classe populaire ouvrière et employée (majoritaire dans le peuple en France et en Grande-Bretagne). Et ainsi de suite…
En fait, tout ce que l’on peut dire est que le vote du 23 juin n’est qu’une simple étape et que l’histoire n’est pas écrite. Lorsqu’on mène une bataille, il faut la penser jusqu’au bout et ne pas s’arrêter en chemin. Nos amis espagnols disent Hasta la victoria siempre !
En réalité, pour mener une transformation sociale et politique, il faut d’abord comprendre le réel (différent du visible), puis définir l’ensemble des conditions nécessaires à cette transformation, pratiquer une éducation populaire refondée pour mener la bataille pour une nouvelle hégémonie culturelle, et agir dans (et pas en dehors comme le font ceux qui souhaitent se battre avec la peau des autres !) les luttes syndicales et politiques. En ayant bien à l’esprit que seul le peuple mobilisé autour de sa classe ouvrière et employée peut aller aujourd’hui au bout du chemin de l’émancipation. A condition cependant de rassembler toutes les conditions nécessaires.
En fait, l’émancipation se fait toujours au rythme de l’histoire et non des impatiences des couches moyennes supérieures radicalisées. Dommage pour les spiritualistes, les idéalistes, les solipsistes, les volontaristes, les adeptes d’une surplombance simpliste, etc.