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Les écologistes ont un « Gro » problème avec la République

On pensait avoir tout vu et tout entendu de la part d’Eva Joly, la candidate d’Europe Écologie Les Verts (EELV) à la présidentielle de 2012. Après avoir proposé de supprimer le défilé du 14 Juillet, symbole de « la France guerrière« , après avoir voulu gommer la mémoire de la première guerre mondiale en faisant du 11 Novembre une « journée européenne de la paix » car il faut arrêter « de penser que c’est l’Allemagne qui a perdu la guerre« , après avoir considéré que Jeanne d’Arc était un « symbole ultra-nationaliste« , l’ancienne juge d’instruction a créé la polémique en proposant le 11 Janvier de créer deux nouveaux jours fériés : un pour la fête musulmane de l’Aïd-el-Kebir et un autre pour la fête juive du Kippour.

Annoncée au cours de la « nuit de l’égalité », cette proposition vise à faire en sorte que « chaque religion ait un égal traitement dans l’espace public ». Selon Gro (c’est son véritable prénom), si cette mesure venait à être appliquée, « égalité et la laïcité auront avancé dans notre pays ». Une fois de plus, la pêche aux voix des « minorités » s’est transformée en véritable dérive communautariste. À ceci près que la candidate d’EELV n’a pas simplement répondu  à une demande des « représentants » des « communautés » musulmanes ou juives (à part quelques extrémistes, peut-être, personne ne proposait un tel changement), elle a anticipé leurs revendications.

Une situation qui n’en finit pas d’embarrasser les principaux intéressés : Moché Lewine, porte-parole du grand rabbinat de France, a ainsi tenu à  préciser que « ni le Consistoire juif, ni le Grand rabbinat ne sont à l’origine de revendications en ce qui concerne un jour férié ». De son côté, Dalil Boubakeur, recteur de la Grande Mosquée de Paris, a exprimé des doutes sur la pertinence de cette initiative : il ne pense pas qu’elle puisse « trouver une traduction dans le cadre législatif français ».

Alors que la campagne peine à démarrer, en raison de l’omniprésence de la crise et de la paralysie des candidats du oui au référendum de 2005 face à l’échec de la monnaie unique, les prétendants (qu’ils soient « petits » ou non) tentent d’exister par l’intermédiaire de « coups médiatiques » : un bon mot (« capitaine de pédalo« ), une menace ridicule (Accoyer qui compare l’arrivée de la gauche aux affaires à la guerre) ou comme nous le voyons ici des propositions volontairement provocatrices. Le débat de fond se fait attendre…

En cette période de bouleversements majeurs, l’irruption du fait religieux en pleine campagne présidentielle n’est pas de nature à apaiser les esprits. On peine à voir l’intérêt de cette intervention dans un pays où la  laïcité demeure une valeur essentielle et profondément ancrée. Fort heureusement, la quasi-totalité de la classe politique a dénoncé ces propos, y compris chez ses alliés d’hier et de demain : Michel Sapin l’a ainsi encouragée à « se souvenir toujours du principe de laïcité » et le P.R.G. a regretté qu’elle « confonde laïcité et clientélisme communautariste ». A l’intérieur même d’EELV la grogne monte et Pascal Durand y voit, lui aussi, « une atteinte au principe de laïcité ».

Focalisée sur ce seul problème, l’opinion publique a en revanche totalement ignoré une autre annonce, tout aussi déplorable, si ce n’est plus : la volonté de créer des « statistiques de la discrimination », un « instrument utile pour permettre demain un même accès à l’emploi, à la santé, au logement, voire aux responsabilités politiques ». On peut deviner que derrière cet enrobage sémantique se cache le désir de remettre au goût du jour la notion de « discrimination positive« , pratique qui, rappelons-le, consiste à donner des droits supplémentaires à des individus en fonction de leur couleur de peau, de leurs habitudes sexuelles, de leur religion ou de toute autre caractéristiques considérée comme discriminante, au mépris de la notion d’égalité républicaine.

L’idée de lutter contre les discriminations en les institutionnalisant, en les officialisant et en leur donnant tous les attributs d’une base légale n’est pas nouvelle à gauche. Dans « Refaire société« , Magali Bessone proposait ainsi de définir un référentiel « racial » afin de mesurer puis de corriger les inégalités de traitement entre les différentes « races ». Si cette proposition absolument choquante n’a, fort heureusement, pas eu beaucoup d’écho au moment de la publication de l’ouvrage, l’idée n’en demeure pas moins « dans l’air », comme en témoignent les paroles d’Eva Joly. Il s’agirait inévitablement d’une atteinte sérieuse aux valeurs de notre République, qui ne reconnaît que des citoyens et non des communautés établies arbitrairement. La publication de « statistiques ethniques » – pour prendre l’exemple le plus parlant – pourrait, par ailleurs, s’avérer le meilleur moyen de dresser les Français les uns contre les autres.

Les dispositions contenues dans l’accord PS-EELV révélé en Novembre avaient de quoi inquiéter. Plusieurs personnalités socialistes, parmi lesquelles François Hollande et Arnaud Montebourg ont, fort heureusement, pris leurs distances avec ce texte fantaisiste. La dernière sortie de la candidate écologiste montre que les verts sont engagés sur une pente dangereuse, celle du communautarisme et du différentialisme. Ces attaques répétées contre nos idéaux républicains nous imposent un devoir de vigilance vis à vis des propositions émanant de cette « secte fanatique« .

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