Après avoir signé un accord de libre échange avec la Corée du Sud en février 2011, l’Union Européenne (U.E.) a expliqué son intention de signer un accord similaire avec le Japon dans les années qui viennent. Selon la Commission européenne, cet accord devrait permettre de créer 400 000 emplois en Europe et augmenter le produit national brut de l’U.E. de 2 %, soit environ 250 milliards d’euros. L’accord concerne différents secteurs : industrie pharmaceutique, chimie, alimentaire, services, technologie de l’information et… automobile. Dans un contexte de crise économique, c’est ce dernier secteur qui suscite le plus de controverses.
Un an après l’accord avec la Corée du Sud, le nombre de véhicules sud-coréens produit en Corée et vendus en Europe a augmenté de 77 %. Alors que la Corée exportait en Europe 4 fois plus de voitures qu’elle n’en importait de la même région en 2010, depuis l’accord, le ratio est passé à 6 fois plus. Et ces chiffres n’incluent pas les véhicules (Hyundai/Kia) produits en Europe de l’Est. De plus, la Corée maintient non seulement des barrières non tarifaires comme des normes anti-pollution et de sécurité qui défavorisent fortement les marques européennes de petites cylindrées, qui n’ont pas les marges nécessaires pour effectuer les changements sans impacter le prix de vente. Mais, selon le groupe Volkswagen, le gouvernement lance aussi des contrôles fiscaux aux Coréens achetant des voitures étrangères. Cependant, malgré les revendications de Ford, PSA, Volkswagen et Fiat représentées par l’ACEA (Association des constructeurs européens d’automobiles), l’U.E. a avalisé son intention de commencer les négociations avec le Japon. En parallèle, elle travaille sur des accords semblables avec l’Inde, le Canada et Singapour.
Plusieurs problèmes se posent : d’abord, les entreprises automobiles ne sont pas toutes perdantes. Les entreprises haut de gamme (BMW, Daimler) profitent de ces accords ainsi que celles produisant des véhicules dans ces pays (par exemple, Renault en Corée du Sud). De plus, ces accords, ne concernant pas seulement le secteur automobile, sont intéressants pour de nombreux pays (en Europe du Nord notamment) dont la filière automobile n’est pas aussi importante qu’en France ou en Allemagne. Enfin, de nombreuses industries, comme l’agro-alimentaire ou les entreprises pharmaceutiques, attendent beaucoup de ces accords. Les négociations avec Singapour, qui ont débuté en 2010, ont par exemple permis d’ouvrir le marché de la banque de détail, au grand plaisir de BNP Paribas and HSBC et de mettre les banques européennes sur un pied d’égalité avec les États-Unis qui ont obtenu ce droit en 2003.
La question est donc de savoir comment négocier ces accords sans nuire aux industries fondamentales de la Vieille Europe. Vu leur portée, il est évident qu’ils ne peuvent satisfaire tout le monde et que c’est entre gouvernements que les négociations doivent se faire pour arriver unis devant le Japon. Le Japon, rappelons-le, est le champion des normes techniques uniques et fournit déjà 6-7 fois plus de véhicules qu’il n’en importe d’Europe. Les risques sont donc similaires pour l’industrie automobile européenne. L’ACEA sera donc sans aucun doute particulièrement actif (et médiatisé) pendant ces négociations qui durent généralement plusieurs années.