Mais pas n’importe comment. C’est pour cela que nous étions réunis samedi dernier pour construire une vraie réflexion, un vrai débat sur la laïcité, pour monter un projet de loi clair face aux faux laiques en embuscade, de la droite et de l’extrême droite, prêts à détourner l’universalité de cette laïcité, ciment de notre République qui, bien que mise à mal, sera restaurée dans le cadre de la VIème.
Il apparait nécessaire de lier aujourd’hui le combat laïque et le vrai changement politique.
Autour de H. Pena Ruiz et de E. Khaldi, invités par le Parti de Gauche, sous la présidence de Pascale Le Néouannic et d’Alexis Corbière, cet après-midi a été jalonné par les discours de Jean-Luc Mélenchon et de François Delapierre, et par les propositions des participants apportant leur pierre à l’édifice de ce projet qui prend corps.
Ce qui est remarquable, c’est le contenu des propositions, c’est aussi une assemblée composée d’athées, de croyants et d’agnostiques, promouvant le principe de laïcité. Martine Billard et d’autres féministes ont su rappeler que
le combat laïque et féministe est indissociable. Les femmes sont sujets de plein droit, c’est là le sens de ce qu’on appelle « l’émancipation » des citoyennes et des citoyens. L’émancipation des peuples ne pourra se faire sans celle des femmes.
La laïcité est un acquis indispensable, fruit d’âpres luttes, à visée universelle, le peuple tunisien en est l’exemple le plus récent.
Ici, en France, nous devons revenir sur les accords concordataires d’Alsace, Moselle (simple exemple: celui des logements et presbytères dont le coût est assuré par les finances publiques, par tous les citoyens) : abrogation du concordat.
Ici, en France, fer de lance de la laïcité, il est urgent d’arrêter l’hémorragie des deniers publics vers le financement des lieux de culte et vers les écoles privées. Le curé, le rabbin, l’imam doivent rester dans leurs lieux de culte, financés par leur communauté, et non par les subsides publics appartenant à tous et devant être utilisés au seul bénéfice de l’intérêt commun.
La laïcité économique n’est pas en reste, loin de là : H. Pena Ruiz a d’ailleurs dénoncé « le dieu-marché à défataliser » : oui, le néolibéralisme n’est pas une fatalité, le Front de Gauche est là, en train de se construire pour désacraliser cette crise dont on nous dit qu’on ne pourrait pas en sortir. Ce système mortifère s’appuie sur l’émiettement organisé des acquis de la République, système en marche tel un rouleau compresseur impulsé par les finances spéculatives et les religions qui demandent des droits particuliers, tuant ainsi la solidarité, les luttes convergentes, l’intérêt général protecteur pour tous.
C’est ainsi que main dans la main, ils ont mordu et ne lâchent pas leurs proies que sont l’École publique et la Santé publique.
Quand, dans une manifestation, on entend « ça va péter », je ne peux m’empêcher de penser que ce sont ceux du camp d’en face, les apprentis sorciers néolibéraux et communautaristes, qui ont grandement commencé à « faire péter » les valeurs instaurées pour le seul intérêt général, celui du peuple, faisant vivre les mots de liberté et d’égalité. Doit-on redire que le peuple, c’est le plus grand nombre, toutes couches sociales confondues, celles-là même que les affameurs sont en train d’affaiblir tels des vampires se gorgeant jusqu’à plus soif ?
Pourquoi les soins palliatifs sont-ils majoritairement pris en charge par le privé, où la présence des catholiques est prépondérante ? Pourquoi l’hôpital public devrait-il planifier son personnel en fonction des desiderata des intégristes musulmans refusant la mixité ?
Chaque religion a un projet politique sur la société, chacune tirant de son côté pour attraper les subventions publiques. L’application de la loi de 1905 est aujourd’hui un panier percé, il faut ouvrir ce grand chantier et promouvoir nos propositions afin de les concrétiser : un projet, une loi, son application.
C’est aussi parce que la laïcité a fait ses preuves, en France et dans tous les pays qui avancent d’un pas ou de plusieurs vers elle, que, si elle ne prétend pas s’ériger en modèle, elle porte un flambeau universel, levé et relevé sans cesse. La laïcité émancipatrice est seule capable de structurer l’esprit critique des futurs citoyens, est seule capable de rassembler la diversité des composantes d’un pays. Nous avons, à ses rencontres sur la laïcité, beaucoup évoqué les crèches et leur besoin de protection face aux attaques visibles (foulard d’un islam affiché) ou moins visibles (subventions publiques aux crèches loubavitch) ; ces coups de canif dans les principes laïques ne seront plus possibles quand sera mis en place un grand service public de la petite enfance. Vous voyez bien le lien entre le combat politique et le combat laïque ?
Nous avons beaucoup évoqué l’école pointant la dangerosité des financements « facultatifs » ; soyons clairs : à école privée, fonds privés, à école publique, fonds publics. Que dire des multiples menaces de séparations : celle des filles et des garçons dans les activités sportives, la remise en cause d’une mixité acquise par nos ascendants, celle des tables isolées des autres dans les cantines sous prétexte de ne pas se mélanger aux autres, les « différents » , les « impurs » (le repas est pourtant une belle occasion de discuter ensemble), la séparation des « carrés religieux » dans les cimetières, celle des jours fériés variant d’une religion à l’autre, celle qui se fait jour dans les entreprises privées avec la demande de salles de prière, dans des espaces tels les aéroports ? Si la loi n’est plus adaptée à ces demandes, alors, il faut assurer son efficacité en la modifiant, après en avoir débattu avec les laïques, et non pas en y travaillant chacun de son coté ou en créant une commission qui aménagera et ménagera les exigences des partenaires religieux. Quand le Parti de Gauche demande l’abrogation de la loi de 1942 par laquelle Pétain a dénaturé la loi laïque de 1905, il a raison. La laïcité ne se bricole pas et aujourd’hui, nous devons faire cesser cette négociation permanente qui aboutit à des compromissions vidant peu à peu de son sens la loi laïque.
Ce n’est pas cette série de découpes dans le tissu républicain qu’il nous faut, c’est une seule partition : celle de la séparation des Églises et de l’État qui garantit les droits de tous, à égalité, qui garantit la liberté de conscience de tous, qui propulse une protection pour tous. Oui au droit à la différence, non à la différence des droits !
Faire droit à chacun, sans savoir si celui-ci ou celle-ci appartient à telle ou telle communauté.