Le Monde arabe et l’Afrique du Nord ont connu une agitation sociale et politique sans précédent tout au long de l’année 2011. Les brasiers de la colère continuent de brûler à ce jour et l’Algérie n’échappe pas au malaise général exprimé par des peuples lassés par l’asphyxie d’un système politique verrouillé et l’absence de toute perspective.
En Algérie, le pouvoir croit s’être tiré à bon compte de ces convulsions après avoir puisé dans les ressources de la manne pétrolière pour pacifier démagogiquement les flambées du mécontentement populaire et en faisant croire au changement par la mise en route de réformettes.
Ce train de mesures, notamment la légalisation de nouveaux partis, présentées comme « révolutionnaires » ne sont en fait que de la poudre aux yeux destinée à abuser l’opinion publique et à accroire la thèse selon laquelle le pouvoir n’a d’autre dessein que celui de la refonte radicale et démocratique du système politique du pays. La démarche trahit mal la volonté délibérée d’un pouvoir résolu à bloquer toute perspective de rénovation. En effet, l’ouverture « démocratique » dont il se targue a eu pour conséquence principale de donner de nouveaux gages à l’islamisme politique puisque des partis islamistes nouvellement reconnus sont entrés en lice dans la bataille électorale. Cette supercherie normalise les résidus d’un parti officiellement dissous, l’ex-FIS en permettant à certains de ses dirigeants, criminels notoires comme Ali Belhadj, de remettre le pied en toute légalité à l’étrier politique en organisant des manifestations. Elle montre aussi que ce pouvoir croit toujours manipuler et manœuvrer pour garder la main haute sur le jeu politique.
Jusqu’à présent, le pouvoir avait réussi à préserver un équilibre précaire en soignant sa « respectabilité » internationale grâce à l’expérience engrangée en matière de lutte anti-terroriste, en se faisant passer pour « le sauveur » du chaos et à faire de son président à temps partiel « l’artisan de la paix ».
Or, après le raz de marée islamiste dans la totalité des pays arabes, rien n’autorise à dire que l’Algérie y fasse exception. Belkhadem a beau rassurer en vociférant à Oran que « La politique et le pouvoir ne sont pas un manège où chacun attend son tour», il n’est pas dit que le pouvoir en place ne soit disqualifié aux prochaines « élections » législatives par une majorité islamiste d’autant que la situation sécuritaire est des plus alarmantes.
En effet, le terrorisme islamiste continue son cours meurtrier. Après un attentat des plus sanglants contre les forces de sécurité et de simples citoyens dans la wilaya de Boumerdes qui a fait plusieurs victimes, un groupe de terroristes surpris en conclave vient d’être éliminé à un jet de pierre de la capitale. Un arsenal de plusieurs dizaines de missiles a été découvert près d’Illizi et l’on parle de plusieurs milliers d’autres qui seraient « perdus » dans la nature, ce qui n’est pas de bon augure pour la sécurité des citoyens et la stabilité du pays.
Mais aux difficultés et aux incertitudes internes, s’ajoute au pouvoir un écueil à la mesure des pressions occidentales. Ce n’est pas un hasard du calendrier si Hilary Clinton s’est invitée à Alger, pour imposer sa feuille de route. Elle n’a pas manqué d’y rappeler les impératifs de la stratégie américaine dans la région comme elle n’a pas hésité, comme à son habitude, d’y porter aux nues l’exemplarité du modèle tunisien de l’islamiste « modéré » Ghannouchi. Comment ont réagi à ces belles paroles ses hôtes, eux qui ont toujours eu le verbe facile pour se tresser des lauriers de patriotes et présenté les démocrates comme les suppôts de Hizb França ?
Il n’échappe désormais à personne que l’Occident a décidé de mettre en orbite l’« islamisme modéré » même s’il doit rompre, comme il l’a déjà fait ces derniers mois, avec les marionnettes qu’il a soutenues pendant des décennies. Après avoir encensé les dictatures arabes, le voilà aujourd’hui totalement converti à la panacée de « l’islamisme modéré » et un farouche partisan des « révolutions arabes». Une «sainte alliance», comprenant les monarchies du Golfe, notamment l’Arabie Séoudite wahabbite, le Qatar et son porte-voix Al Djazira, la Turquie d’Erdogan qui rêve d’expansion et de restauration du khalifat, Israël, les Etats-Unis et la France, s’est constituée pour engloutir pacifiquement par la voie des urnes, après avoir recouru à la hache de guerre, tout un continent dans les limbes du moyen âge !
De doctes spécialistes, par un discours lénifiant, justifient aujourd’hui la confiscation du pouvoir par les islamistes par la « démocratie ». Ils poussent jusqu’au cynisme, à vouloir identifier « l’islamisme modéré » à une variante du courant démocrate chrétien. Or, la différence essentielle entre ces deux courants politiques vient du fait que la démocratie chrétienne est née dans la synergie d’une pensée nourrie par les idées des Lumières et les valeurs du combat antifasciste tandis que « l’islamisme modéré » a surgi dans le paysage politique arabe à l’instigation de l’impérialisme britannique pour contrecarrer le mouvement de libération nationale moderne.
Une lueur d’espoir, néanmoins a émergé dans le camp des démocrates algériens où l’on semble avoir compris que le suffrage universel pluraliste n’est pas synonyme de démocratie politique car s’il en est la condition nécessaire, il n’en est pas la dimension suffisante.
C’est pourquoi le PLD se félicite des positions adoptées par le CCDR, le RCD, le Front Démocratique et de celles de personnalités de la société civile telle que Maître Ali Yahia Abdennour, de ne pas se joindre aux échéances macabres « électorales » de mai prochain.
Notre parti lance aussi un appel vibrant à toutes les autres forces républicaines et démocratiques sans exception, à toutes les associations modernistes de femmes, de jeunes, d’étudiants, de travailleurs, et à toutes les personnalités et patriotes qui ont la République et la démocratie chevillées au cœur, pour joindre leurs voix à toutes celles qui disent non à ces « élections » funèbres et faire avorter le plan anti-national qui se trame contre le pays.
L’Algérie est sommée de faire les choix qui s’imposent si elle veut éviter un destin tragique. Elle doit renvoyer dos à dos ceux qui ont confisqué l’Histoire pour en faire un fonds de commerce et perdurer comme ceux qui se sont autoproclamés prophètes sur terre pour assouvir leur soif de pouvoir et de sang.
Un tel défi ne triomphe pas dans des « élections » suicidaires. Il se relève dans le resserrement des liens et l’échange entre démocrates, toutes sensibilités confondues, pour que se dessinent dans les meilleurs délais les contours d’une véritable convergence en vue d’une transition républicaine et démocratique.