Ça devait être l’apothéose de la fin d’une année 2009 marquée par le sceau de la crise, la conférence des Nations Unies sur les changements climatiques de Copenhague, le plus grand rassemblement de chefs d’États et de gouvernements de l’histoire de l’ONU (119), a été un flop retentissant. Rappelons qu’il s’agissait de permettre de limiter le réchauffement climatique par une réduction des émissions anthropiques des gaz à effet de serre en trouvant un accord contraignant de réduction d’émissions prenant le relais du protocole de Kyoto, qui prend fin en 2012.
Depuis la conférence de Bali en 2007, qui avait fixé les objectifs pour Copenhague, tout semblait avoir été minutieusement préparé, jusqu’au choix même de Copenhague, capitale du Danemark aux jours courts et aux nuits glacées mais aux salons bien chauffés, bref, l’idéal pour espérer décourager tout mouvement social d’envergure.
Notre omniprésident a été pratiquement le seul chef d’État à crier victoire après l’accord minable concocté in-extrémis par les États-Unis-d’Amérique et les pays émergents (Chine, Brésil, Inde, Afrique du Sud). Mais ce fiasco en a réjoui d’autres, tels les lobbys énergétiques nord-américains et l’OPEP.
Si le résultat de Copenhague est sans aucun doute un fiasco, est-ce pour autant un désastre comme nous l’entendons un peu partout ?
Certainement si on considère qu’il fallait un accord coûte que coûte, ce qui était la position des ONG environnementalistes, sans faire de la remise en cause le système des droits à polluer et de la finance carbone instaurés après Kyoto un objectif.
Certainement pas si on considère qu’un mauvais accord risquait en fait de bloquer tout espoir de pouvoir limiter le réchauffement climatique à 2° et n’aurait fait que gonflé la bulle spéculative du carbone.
Dans la mesure où l’accord obtenu n’en est pas un puisqu’il est vide (limitation à 2° de la hausse de la température moyenne du globe d’ici 2050 mais sans s’engager à réduire les émissions de GES, financement à hauteur de 21 milliards d’€ en 3 ans pour limiter les émissions des pays en voie de développement mais sans préciser d’où viendra l’argent), qu’il n’a été rédigé que par 5 pays, que la plénière finale de la Conférence s’est bornée à en « prendre note », et qu’il a mis fin au Protocole de Kyoto, les pays devront remettre l’ouvrage sur le métier, peut-être dès la prochaine Conférence qui aura lieu à Mexico à la fin de l’année.
Par contre des leçons essentielles doivent être tirées :
- la défaite des environnentalistes pour qui l’urgence écologique suffit à elle seule à influencer les politiques ;
- la marginalisation de l’Union Européenne qui n’a pas réussi à peser dans la conférence, insuffisamment soudée et trop sûr d’elle-même ;
- la suprématie des EUA alors qu’ils n’ont pas ratifié le Protocole de Kyoto et qu’ils arrivaient les mains vides sans que le Congrès ne se soit prononcé ;
- la confirmation du de l’importance croissante des pays émergents, tout particulièrement la Chine, sur la scène internationale, qui au passage semblent avoir renoncer à toute solidarité avec les pays en voie de développement ;
- la démonstration que tant que le G2, le G8, le FMI et surtout l’OMC continueront d’imposer leur vision d’une économie uniquement orientée pour le profit d’une minorité en entretenant l’exploitation, la soumission et la misère, aucune rupture, fut-elle au profit de l’humanité toute entière, ne sera possible ;
- échec pour l’ONU qui montre son incapacité à peser et à mener les débats pour faire aboutir un accord à 194 parties parce que 2 d’entre elles (Les EUA et la Chine) ont décidé de ne rien céder ;
- affirmation de l’importance (certes relative) et de la pertinence de la position de certains pays en développement hors de tout esprit de compromission diplomatique ou de renonciation quand à l’objectif et en répondant à l’intérêt général de leurs peuples, ce fut le cas des pays de l’ALBA.
Les ONG doivent revoir leur copie. Si l’affaiblissement des environnementalistes pur jus au profit des associations liants les questions écologiques et sociales fut une avancée certaine, les propositions du Klimaforum amènent à tempérer l’enthousiasme : l’arrêt de l’utilisation de toute énergie fossile dans les 30 prochaines années est complètement irréaliste, la « les réparations et les compensations de la dette des des crimes climatiques », c’est à dire un flux financier massif du Nord vers le Sud, ne pose pas la question de l’utilisation démocratique de ces fonds.
Il ressort de ces leçons que le cadre national est bien le plus pertinent pour mener le combat , que ce combat est bien un combat éminemment politique, et que les mouvements sociaux doivent l’intégrer dans le cadre d’une globalisation de leurs combats. L’écologie est une affaire politique et c’est aux peuples de faire savoir à leurs représentants qu’ils attendent d’eux beaucoup plus de courage, d’humanisme et de solidarité qu’ils n’en ont eu à Copenhague.