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Salma Boukir : « Les gens sont réceptifs aux projets concrets »

Salma Boukir a commencé sa vie professionnelle, comme secrétaire dans un collège, à Ighram, une petite commune rurale, près d’Akbou, dans la Vallée de la Soummam, en Algérie.

Elle a mené parallèlement une riche activité citoyenne. C’est ainsi qu’elle participa activement, durant l’année de 1994, en Kabylie, à la campagne de boycott scolaire. Cette campagne s’était soldée par une année blanche pour tous les élèves du primaire à l’université. Mais les sacrifices en valaient largement la peine. Il s’agissait de revendiquer l’introduction de la langue tamazight (berbère) comme langue d’enseignement dans les établissements du primaire à l’université, et son adoption, comme langue nationale et officielle, au même titre que l’arabe. Salma Boukir a longtemps milité aussi, à partir de 1989, dans l’un des tout premiers syndicats autonome, le Syndicat Autonome des Travailleurs de l’Éducation et de la Formation –SATEF, dont elle a été l’un des cadres locaux.

Elle fut également membre, de 1997 à 2001, du bureau régional de Bejaïa, puis du Conseil national, chargée du secrétariat des libertés et des droits de la personne humaine.
Elle fut aussi déléguée du SATEF dans les instances du mouvement du Printemps Noir de Kabylie 2001 à Bejaïa, et membre fondateur du Comité de Suivi et de Solidarité de la Ville d’Akbou, en 2001, également.

Elle a quitté, en 2001, l’Algérie pour la France où elle s’était inscrite de 2003 à 2007, à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, à Paris, en vue de préparer une maîtrise sur les évènements du printemps Noir de Kabylie, de 2001. Mais ce projet n’a pas abouti.
Elle exercera pendant plusieurs années des emplois précaires, jusqu’en novembre 2006, date à partir de laquelle elle a suivi une formation en ressources humaines. Elle occupe depuis un poste intéressant dans une entreprise de Services à la personne, à Puteaux-La défense, en proche banlieue parisienne.

Hakim Arabdiou : Dans quelles circonstances votre association a-t-elle été créée ? Et Quels sont ses objectifs ?
Salma Boukir
: Je suis membre fondateur, en 2009, de l’association, AKAM ( Akbou, Kabylie, Méditerranée). Elle a notamment pour ambition de « Promouvoir et soutenir toute initiative ou action visant : l’insertion ; la sensibilisation au développement durable et à l’économie sociale et solidaire ; l’amélioration de la condition féminine ; et la protection des droits de la personne humaine ».

Je suis également membre fondateur de l’association, ADEKA : Association pour le Développement de la Kabylie. Cette association est née, en 2008, à Boulogne-Billancourt, en banlieue parisienne, dans la foulée des Premières rencontres Franco-Algériennes de Solidarité pour le développement. Ces rencontres, intitulées, « Migrants et projets de Solidarité et Développement avec les villes et villages de Kabylie », se sont tenus les 6 et 7 décembre 2008 sur l’initiative de l’Association IDméditerranée. L’ambition de cette dernière est de consolider les réseaux d’acteurs associatifs en France, en mutualisant leurs savoir-faire en vue d’initier, soutenir et d’accompagner des projets de développement micros-locaux, en Kabylie.

H. A. : Avez-vous des partenaires en Kabylie ? Comment votre association est-elle perçue par les différents acteurs, notamment les autorités politiques ?
S. B. :
Nos premiers interlocuteurs en Algérie sont les citoyens dans les villages, et ensuite les élus communaux, et quelquefois régionaux. L’accueil fait à notre association est plutôt encourageant, car les gens sont réceptifs à ce qui est concret et surtout, parce que notre association n’a pas la prétention de se substituer aux acteurs locaux. Nous partons des besoins réels des gens sur place, nous écoutons leurs doléances, puis nous tentons d’y répondre, dans la mesure du possible, en essayant de trouver des financements, auprès du fonds européens et ailleurs.

Nos deux projets en cours sont la réhabilitation d’une maison traditionnelle Kabyle, dans un village de la commune d’Ighram, à Akbou, afin de préserver le patrimoine architectural de cette région d’Algérie, et en lui donnant une seconde vie, avec le projet de créer au sein même de ce maison, d’une petite médiathèque. Ainsi, ce village se verra doté d’un espace où jeunes et moins jeunes, femmes et hommes pourraient se retrouver, échanger, créer.

L’autre projet a trait à la construction d’une déchetterie à Tizi Hibel, le village du grand écrivain algérien, Mouloud Feraoun. On sait à quel point le problème des déchets et de leur traitement pose problème, même dans les pays développés, alors que dire s’agissant d’un village, en Kabylie ; c’est presque impensable. Pourtant, ce projet avance normalement.

Bien évidemment, nous ne pouvons citer, dans les limites de cet entretien, tous les projets qui sont en cours de réalisation et que nous envisageons de lancer.

H. A. : Votre association rencontre-elle des difficultés particulières, et quelles sont ses projets ?
S. B. :
Des difficultés ? Il y en a toujours. Mais pour le moment, elles ne sont pas insurmontables. Mise à part les lenteurs administratives, le montage de dossiers financiers, les allers -retours sur place en Algérie, etc. Sachant que l’association ne bénéficie pour le moment d’aucune subvention : les adhérents y travaillent bénévolement et profitent de leurs déplacements privés ou de leurs études pour accomplir leurs missions. Cela prend donc plus de temps pour l’avancement des projets.

H. A. : Un dernier mot ?
S. B. :
Merci à Respublica de nous offrir cette occasion pour faire connaître notre association, auprès de ses lectrices et lecteurs. Aussi, je profite de cette tribune pour inviter les personnes intéressées par nos activités à se joindre à nous. Aujourd’hui, il est plus qu’impératif de s’investir en direction des villes et villages porteurs de projets concrets, mais qui manquent cruellement de moyens pour les mener à bien. Tandis que nous, dans l’immigration, nous sommes en mesure de les trouver et de les leur fournir. Alors faisons-le ensemble.

Propos recueillis par Hakim Arabdiou

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