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« Sur le chemin de l’école », de Pascal Plisson

En collaboration avec l’association 0 de Conduite

« On oublie trop souvent que l’école est une chance. Dans certaines régions du monde,  le chemin de l’école est un parcours du combattant, et le savoir, une conquête. Chaque matin, parfois au péril de leur vie, des enfants héroïques s’engagent sur le chemin de la connaissance. Ces écoliers sont les héros de leur propre histoire, de vraies histoires ». Ces mots ouvrent le film, prélude aux histoires de vie de quatre adolescents vivant dans des régions décentrées, que la caméra suit. Pour se rendre à l’école et construire leur avenir, pour changer de vie, il leur faut affronter la nature, splendide mais rude, et se dépasser.
Le film entrecroise les parcours de Jackson au Kenya, Zahira dans l’Atlas marocain, Carlos de Patagonie et Samuel du Golfe du Bengale. Ils se préparent, au petit matin, et prennent le chemin de l’école, nous le prenons avec eux. Ces enfants ont une détermination hors du commun, et fournissent d’immenses efforts pour s’inventer un avenir.

Jackson : à onze ans, Jackson et Salomé sa petite sœur, parcourent quotidiennement quinze kilomètres, marchant plus de deux heures, matin et soir, au milieu de la savane kenyane où ils vivent avec leurs parents, chercheurs de charbon. A 5h 30 du matin ils sont prêts à partir, mais avant, Jackson a creusé le sable pour chercher l’eau, lavé son uniforme pour le lendemain, réparé ses sandales. Il répète l’itinéraire à emprunter avec son père, toujours inquiet, et qui prodigue les dernières recommandations : « Que mes enfants reviennent plus forts, plus vaillants et instruits ! Je vous bénis » leur dit-il. La route est longue, les enfants chantent pour se donner du courage, Salomé fatigue, son frère la presse. « Marche plus vite, c’est dangereux ici ; dépêche-toi, c’est moi qui lève le drapeau ce matin, je ne peux pas être en retard ». La caméra les accompagne et traverse avec eux l’immense savane blonde, témoignant de leurs inquiétudes, des rythmes de leur marche, du bidon d’eau qui se renverse, des barrissements d’éléphants qu’il faut à tout prix éviter en contournant les acacias, des girafes qu’ils croisent.

Zahira : une journée entière de marche dans les montagnes escarpées de l’Atlas est nécessaire à la jeune fille âgée de douze ans, pour rejoindre son internat. Vingt-deux kilomètres à faire et quatre heures de marche, tous les lundis matins. La caméra suit Zahira dans sa vie quotidienne, lavant le linge à la rivière, chantant le Coran, faisant ses exercices de calcul, filant la laine avec sa grand-mère qui l’encourage : « Tu ne seras pas comme nous, on était scolarisées à la mosquée avec les sourates pour programme, tu deviendras quelqu’un d’instruit, tu comprendras mieux la vie ». Sac au dos, elle s’élance, une poule sous le bras, provoquant les douces moqueries de Zeineb et Nora, les amies qu’elle retrouve en plein désert et qui font route avec elle. Mal aux pieds pour l’une, massage, essoufflement, découragements. Quand elles débouchent dans la plaine et tentent de faire du stop, c’est une remorque pleine de moutons qui les ramasse. A l’arrivée, Zahira troque sa poule contre des gâteaux, au marché, avant d’arriver enfin et de poser les affaires au dortoir, prenant des nouvelles des autres : Férial ne reviendra pas lui dit-on, sa mère a renoncé à la scolariser.

Carlos : il a douze ans et vient retrouver son père, gardien d’un grand troupeau de chèvres, qui lui remet un ruban talisman, pour le protéger ; ensemble, entre hommes, ils boivent le maté. Pour rejoindre l’école, Carlos est accompagné de sa jeune sœur, Mikaëla, placée sous sa responsabilité ; tous deux ont à parcourir, deux fois par jour et quel que soit le temps, dix-huit kilomètres à cheval dans les plaines de Patagonie. Une heure trente de chemin caillouteux sur lequel le cheval glisse et s’épuise. Pour celui qui ne fait pas la route, la beauté des paysages est à couper le souffle. Carlos et sa sœur, cramponnée à l’arrière, font une pause au même endroit, tous les jours, là où ils ont construit un petit autel de pierre et où Mikaëla fait sa prière pendant que le cheval se désaltère. « Carlito, laisse-moi conduire, sois gentil » négocie la petite sœur ; « surtout ne dis rien à maman !» répond Carlos ; et Mikaëla est fière de tenir les rênes à son tour. A leur arrivée à l’école, ils filent vite dans leurs classes où le maître a déjà commencé la leçon.

Samuel : âgé de treize ans, c’est le dernier enfant qu’il nous est donné de suivre. En fauteuil roulant, il cumule les difficultés. Sa mère termine une séance de kiné, éprouvante pour le garçon. Né dans le Golfe du Bengale, il doit faire quatre kilomètres pour rejoindre sa classe de 6ème, tiré et poussé par ses deux petits frères Gabriel et Emmanuel, pendant plus d’une heure et quart, dans un fauteuil brinquebalant. La route est chaotique et les deux enfants ont du mal à piloter le vieux fauteuil, ils s’embourbent, s’attrapent, paniquent et réparent la roue qui a crevé, tout en riant et se racontant des histoires. L’arrivée en ville s’inscrit en contraste avec le silence des cailloux : bruits de circulation, motos pétaradantes, couleurs. Samuel est attendu, comme un prince, dans son école où tous le prennent en charge, et la leçon de mathématique peut débuter.

La route est longue pour ces enfants qui arrivent à destination dans leurs écoles et dans leurs classes respectives, sans se départir de leur sourire ni de leur envie d’apprendre. « Dieu merci, il n’y a pas eu d’accident aujourd’hui » dit l’instituteur. L’immensité d’une nature, belle et sauvage tout autant qu’agressive, la rudesse de la vie et la mise en danger des enfants, contraste avec leur joie de vivre. Jackson est arrivé à temps pour le lever au drapeau dont il est ce jour-là, maître de cérémonie. Tous ont une motivation d’acier et déplacent chaque jour, des montagnes : « Qui a dit que c’était facile d’étudier ? » réplique l’un d’entre eux. Ils nourrissent les mêmes rêves d’avenir que tous les enfants du monde : « Quand j’aurai fini mes longues études, j’aurai un bon travail » dit Jackson. Je me vois pilote, je veux voler, visiter d’autres pays ». Zahira veut être médecin et aider les autres : « que les filles ne renoncent jamais à étudier » dit-elle. Carlos doit entrer à l’internat, et veut vivre sur les terres où il est né, Mikaëla sera maîtresse d’école. Samuel qui, dans son malheur exprime sa chance : « d’habitude, on n’envoie pas les enfants comme moi à l’école » poursuit ses études avec brio, pour devenir docteur : « Je veux être quelqu’un de bien » affirme-t-il, donnant ainsi le change.

Petit regret du film, la langue française exclusive qui en fait perdre la saveur originale, heureusement rattrapée par les images. Mais ne boudons pas le plaisir de l’émotion ni de la tendresse, d’autant que le film de Pascal Plisson, – auteur d’un documentaire remarqué, Massaï, les guerriers de la pluie – a pour but de soutenir financièrement ces enfants et leurs proches, par l’attribution de bourses qui leur permettent de poursuivre leurs études et de réaliser leurs projets professionnels.

Sur le chemin de l’école
Réalisateur : Pascal Plisson
France. 2013
Durée : 1h 14
Distributeur : The Walt Disney Company (France)

Acheter le DVD permet de contribuer à la scolarisation des enfants. Et aussi Sur le chemin de l’école, livre de Marie-Claire Javoy, publié chez L’Editeur. Site de l’association : http://www.surlechemindelecole.org/

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