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Information : Des problèmes techniques nous ont empêchés d'avoir une sortie régulière de ReSPUBLICA depuis le début d'année. Nous allons mettre à profit les deux semaines à venir pour tenter de les résoudre. Prochain numéro le 4 mars, bonne lecture,
La Rédaction
Les Etats-Unis sont une véritable « république bourgeoise »… et c’est d’ailleurs la seule du monde occidental qui peut se le permettre. Les différents lobbys économiques sont officiellement présents et interviennent directement dans les instances politiques. Ainsi, les multiples fractions du capitalisme peuvent construire une réalité politique « composite », qui tolère les contradictions et ouvre la voie à des solutions de sortie de crise. C’est possible car leur position prédominante dans le monde donne la liberté au gouvernement de mettre en concurrence différentes politiques économiques capitalistes et de parvenir à un relatif équilibre permettant de préserver les intérêts du pays.
L’élection d’Obama en novembre dernier est le résultat de ce compromis, et la liste des soutiens financiers de sa campagne électorale en dit long sur l’agrégat qui a contribué à sa victoire. Les poids lourds de Wall Street, de la nouvelle économie californienne, ou encore de l’industrie automobile de Détroit, ont été, en autres, les gros donateurs des caisses de campagne.
Or, la crise actuelle révèle bien que les intérêts de ces secteurs d’activités sont différents, voire contradictoires. Par exemple, est-il encore possible de soutenir la finance ou l’industrie automobile américaines dont les directions ont accumulé tant d’erreurs stratégiques depuis quinze ans et, au même moment, miser sur le développement de la nouvelle économie ? Bref, il n’y a pas d’argent pour tout !
En fait, sur le plan économique, la seule différence, qui est de taille, entre Obama et MacCain : elle réside dans la capacité du démocrate à représenter la quintessence d’une contradiction ouverte et évolutive, alors que le républicain continuait à représenter, comme Bush, une contradiction fermée et statique dont les bases idéologiques interdisaient toute forme de souplesse tactique. On appellera cela le pragmatisme de Barack Obama.
Ainsi, avec le nouveau président de l’Empire, toutes les politiques économiques sont possibles. Il pourra même, en cas de nécessité absolue, exiger les sacrifices nécessaires au sauvetage du système à ceux qui en profitent le plus, c’est-à-dire à la micro couche financière qui bénéficiait depuis des années de rendements « à la Madoff ».
Le fait que le nouveau président soit le point d’équilibre d’un compromis contradictoire a pour conséquence qu’il ne peut agir que de manière progressive et démonstrative.
Analysons quelques instants ce point déterminant pour le reste de l’année 2009. L’administration démocrate doit avant tout prouver de manière concrète et définitive que l’Ancien Monde ne peut être sauvé en étant reproduit à l’identique. Obama sera donc tenu d’effectuer une « figure imposée » pour tenter de ravauder l’économie financière en lambeaux, c’est-à-dire d’initier un gigantesque plan de relance keynésien « à la papa ». 1 000 ou 1 500 milliards de dollars seront donc mobilisés pour soutenir la finance, l’automobile, et d’autres secteurs aussi mal en point et aussi peu porteurs d’avenir en terme de développement économique.
Bien sûr, cette politique keynésienne n’aura pas les résultats escomptés. Face à l’économie de la dette reposant sur les contre- valeurs boursières ou immobilières en dépréciation de plus de 100 mille milliards de dollars, comment 1 ou 1, 5 % de cette somme injectée dans l’économie pourrait-elle avoir un impact, même avec une effet démultiplicateur ?
Grâce à cette perfusion, nous assisterons au mieux à une stabilisation, mais certainement pas à la reprise économique tant attendue.
La constatation de l’échec de l’interventionnisme keynésien en milieu ou en fin de cette année permettra d’ouvrir le débat sur le recours indispensable à d’autres méthodes pour relancer la croissance. Obama et son équipe auront alors les coudées plus franches pour proposer d’autres solutions, enfin en accord avec la nouvelle période historique que nous traversons.
C’est à cette étape que certaines mesures allant dans le sens d’une « Economie Globale en Réseau » pourront être prise. Elles peuvent consister par exemple en la levée de l’embargo militaire sur des brevets, comme ce fut le cas pour le développement de l’Internet au début des années 90, alors que cette invention date du début des années 70… mais était réservée à l’armée. Nous pourrons donc assister, à ce moment-là seulement, à des innovations spectaculaires permettant une libération des forces productives.
A l’image de l’ère Clinton, qui a vu se développer la téléphonie mobile et l’Internet, Obama va chercher, d’ailleurs avec la même équipe aux manettes, à faire un saut qualitatif dans la productivité du travail, dont les Etats-Unis auraient la maîtrise et assureraient la centralité au niveau mondial. Cette hausse de la productivité du travail liée à des innovations techniques ou technologiques passe par une remise en cause, certes partielle, des rentes et des monopoles en particuliers sur les plans financiers et énergétiques.
Par ailleurs, des sacrifices seront peut-être à l’ordre du jour pour le complexe militaro industriel qui devra limiter ses ambitions et renoncer dans ce cas de figure à une « guerre de cent ans contre le terrorisme ».
Face à ces lobbys extrêmement puissants, Obama ne peut se permettre de brûler les étapes et d’appliquer directement une politique volontariste d’aide à l’émergence d’une « Economie Globale en Réseau ». Il doit passer par la case keynésienne obligatoirement… pour prouver son échec et passer, enfin, aux choses sérieuses c’est-à-dire l’ouverture vers une Nouvelle Economie.
Évariste
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écrire à evariste@gaucherepublicaine.org
L'Humanité du 7 février 2009
Le gouvernement vient de décider une baisse importante des subventions aux associations s’occupant de « conseil conjugal et familial ». Est-ce que les problèmes d’information sur la sexualité, la contraception et l’IVG se posent de façon moins aiguë aujourd’hui ?
Michèle Ferrand[1]. L’augmentation de la scolarisation des filles a amélioré leurs connaissances et on a maintenant Internet. Mais les cours d’éducation sexuelle sont encore très insuffisants, et même si l’on peut souligner la nouveauté du recours à Internet, ce qu’on y trouve est très inégal et souvent favorise les rumeurs. Quant aux médecins, ils sont très peu formés à la contraception (deux ou trois heures dans tout leur cursus) et restent très prescriptifs. Pour la plupart la pilule reste la panacée et ils ne prennent que rarement le temps d’en discuter avec leurs patients. Enfin, dans certaines familles, la sexualité est encore un tabou. Les problèmes d’information continuent d’exister sous de nouveaux habits. Tout est à refaire à chaque génération.
Le Planning familial estime qu’un tiers de ses associations risquent de se trouver dans l’impossibilité de fonctionner. Quelles seront les conséquences, selon vous ?
Michèle Ferrand. On risque de voir augmenter les échecs de contraception et le nombre des avortements. Et surtout les femmes en demande d’avortement, particulièrement lorsqu’elles seront hors délai, seront confrontées à des obstacles encore plus grands. Le Planning familial, c’est quarante ans d’expérience accumulée, c’est la connaissance et le respect des populations, c’est un ancrage dans la vie quotidienne des femmes. Les femmes du Planning ont tissé des liens dans les collèges, les quartiers. Or on sait que pour les adolescentes, comme pour les femmes plus âgées en difficulté, le contact est ce qu’il y a de plus efficace.
Le fonctionnement collégial du Planning est assez exemplaire. Les conseillères discutent des cas entre elles - le film de Claire Simon, les Bureaux de Dieu, montre très bien cela - et l’organisation, à la fois régionale et nationale, permet une véritable formation des intervenants. À l’heure actuelle, le Planning est la structure la plus ouverte pour informer sur tout ce qui a trait à la sexualité, aux rapports homme-femme, à l’homosexualité. Toutes les questions peuvent y être abordées : les violences contre les femmes, les mariages forcés, la virginité, l’homophobie, etc. Et le discours n’y est, du moins en général, jamais normatif. On ne parle pas uniquement du risque : grossesse, sida. On parle aussi de plaisir, de relation. C’est la personne entière qui est prise en charge, pas seulement son problème gynécologique. Il faudrait donc, au contraire, augmenter le nombre des antennes du Planning, mieux informer les jeunes de leur existence, des horaires de fonctionnement. Les fermetures qui s’annoncent risquent aussi d’accentuer les disparités territoriales. Dans certaines régions il existe de bons centres d’IVG et de contraception à l’hôpital, mais ailleurs, c’est souvent le Planning qui supplée.
Certaines femmes risquent-elles d’être davantage affectées ?
Michèle Ferrand. Les plus touchées seront celles qui sont isolées, de la femme immigrée à la jeune fille bourgeoise à qui on ne reconnaît pas le droit à une sexualité adolescente. Cela concernera en premier lieu les jeunes parce que le Planning leur donne accès gratuitement à la contraception. De plus, ses antennes sont discrètes et, détail très important, on peut s’y rendre à deux. C’est un fonctionnement qui permet de toucher largement. Une femme qui s’est rendue au Planning et s’en est trouvée bien en parle autour d’elle. Cela fait boule de neige. C’est un cadre très efficace pour la prévention.
Les conquêtes dans le domaine du « droit à la sexualité » et de l’égalité hommes-femmes sont le résultat de grandes mobilisations, en particulier des femmes. Pensez-vous qu’il y a aujourd’hui des retours en arrière possibles ?
Michèle Ferrand. Nous avons un gouvernement qui ne raisonne qu’à court terme dans tous les domaines. Il réduit les coûts sans penser aux conséquences, y compris financières. Il est certain aussi que le côté clairement féministe du Planning exaspère quelques-unes. Et, dans ce domaine, rien n’est jamais acquis. On l’a vu, pour le droit à l’avortement, en Pologne ou aux États-Unis. Dans notre pays le principe de l’égalité entre les sexes est reconnu par la loi mais dans la réalité on en est loin. Depuis 1995, on assiste à une régression de l’activité des femmes à cause de l’APE (allocation parentale d’éducation) et du chômage. L’écart entre les salaires masculins et féminins qui, depuis les années soixante, n’avait cessé de se réduire recommence à augmenter depuis le milieu des années quatre-vingt-dix. Les femmes effectuent toujours 80 % du travail domestique sauf celles qui peuvent se faire aider par une autre femme. Par rapport aux hommes, elles ont des situations dans l’emploi toujours plus précaires, avec les pires horaires et des salaires moindres. La crise accentue ces formes subtiles de régression. Les conquêtes des femmes sont récentes, il faut veiller sur elles. Et rappeler que tous les acquis féministes sont toujours menacés.
Entretien réalisé par Jacqueline Sellem
[1] Elle a été auditionnée le 17 octobre 2000 devant la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes sur le projet de loi nº 2605 relatif à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception.
Michèle Ferrand directrice de recherche au CNRS
La cour d’assises de Seine-Saint-Denis a condamné jeudi à vingt années de réclusion Mushtaq Amer Butt, 28 ans, pour avoir grièvement brûlé en novembre 2005 son ex-petite amie Chahrazad.
Le jeune homme d’origine pakistanaise a été reconnu coupable de « tentative d’assassinat » après trois heures de délibéré et trois jours de débats. Il n’a pas montré de réaction à l’énoncé du verdict tandis que Chahrazad Belayni éclatait en sanglots.
Ce verdict, conforme aux réquisitions, « est un bon exemple », « un gros pas pour les femmes victimes de violence », a déclaré ensuite la jeune fille, âgée de 21 ans, à la presse. Elle s’est dit « soulagée » même si « je n’ai pas eu de réponse ».
Le jeune homme a « annoncé, ruminé et préparé » son « projet de mise à mort » et d’ »anéantissement » de la jeune fille, « sa proie », a estimé l’avocat général Camille Palluel qui avait requis 20 ans de prison.
Le jeune homme, très narcissique selon les experts, l’a brûlée par « blessure d’orgueil » parce qu’elle lui « résistait ». Et d’ajouter : « Il passe à l’acte d’une façon tellement atroce qu’il ne peut accepter le reflet que le miroir lui renvoie. Mais la victime, elle, fait comment avec le reflet du miroir ? »
L’un des avocats de l’accusé, Me Houria Amari, s’est employée à tenter de convaincre la cour qu’« à aucun moment, Amer n’est venu avec l’intention d’homicide » et que son acte n’avait pas été prémédité. Il s’est enfui « sans rien », en laissant papiers et cartes de paiement dans sa voiture ou à son domicile, a-t-elle insisté.
Ce jour de novembre 2005, Shérazade n’a dû son salut qu’à l’intervention d’un riverain. Hospitalisée dans un état critique, le corps brûlé à 60 %, elle souffre toujours d’importantes séquelles physiques et psychologiques. En 2006, elle a tenté de se suicider.
Incapable de la regarder, l’accusé a imploré hier le pardon de Shérazade. « Je veux pas pardonner, c’est au-dessus de moi », a répondu en pleurs la jeune femme brisée à vie.
AFP
Depuis plusieurs années le peuple afghan subit l'emprise des troupes impérialistes de l'Otan qui ont mis en place le gouvernement à leur solde d'Hamid Karzai. Parallèlement il subit l'oppression sanglante des fondamentalistes islamiques. Et ce n'est pas le souci des puissances occupantes qui, sous couvert de " guerre contre le terrorisme ", ont installé des fondamentalistes au gouvernement et la Chari'a dans la Constitution. Sous prétexte de " défense des droits des femmes et de la démocratie ", elles justifient cette politique qui n'a rien à voir avec cela !
Nous condamnons la présence des troupes étrangères et soutenons les droits des peuples à disposer d'eux mêmes, ainsi que toutes les forces progressistes afghanes combattants les forces réactionnaires de leur pays comme l'occupation impérialiste.
RAWA (Association Révolutionnaire des Femmes Afghanes) fondée en 1977, est partie prenante de ce combat. En effet, elle s'est opposée aux interventions étrangères successives dans ce pays que ce soit celle de la Russie ou des Etats-Unis et de ses alliés dont la France. Ces derniers ont financé des forces religieuses réactionnaires dans un premier temps, puis en 2001, ont envahi l'Afghanistan pour écarter du pouvoir les Talibans qu'ils avaient contribué à installer.
Accomplissant un travail courageux de défense des droits humains RAWA a par exemple scolarisé clandestinement sous les Talibans des milliers de femmes. Aujourd'hui, ses militantes considèrent que, loin d'avoir amélioré la situation, l'occupation étrangère l'a dégradé. Les troupes de l'OTAN ont ajouté aux formes précédentes d'oppression, la barbarie et le chaos d'un conflit militaire dont aucun des protagonistes ne représente une alternative progressiste pour la population.
Nous avons donc décidé de faire venir l'une de ces militantes en France pour une tournée nationale en Février 2009 qui lui permettra de rendre compte de la situation de son pays et du combat qu'elles mènent.
Notre objectif est double : montrer qu'il existe en Afghanistan,des forces éprises de paix et d'égalité et appeler à les soutenir politiquement, moralement et financièrement ; dénoncer l'occupation de ce pays et la guerre qui s'y déroule avec la participation active de la France. Il s'agit donc d'une démarche militante qui s'oppose y compris à la politique du gouvernement français.
Leur combat est le nôtre ! Retrait des troupes françaises et étrangères d 'Afghanistan et d'ailleurs ! Soutien aux forces progressistes, féministes, démocratiques et laïques d'Afghanistan !
Premiers signataires : Fédération Syndicale Etudiante - Union Pour le Communisme - Collectif Libertaire Anti-Sexiste - Voie Prolétarienne Partisan - Organisation Communiste Libertaire Lyon - Jeunesses Communistes Marxistes Léninistes - Offensive Libertaire et Sociale Paris -Alternative Libertaire -Marche Mondiale des Femmes - Union Syndicale Solidaires -La Maison des Femmes -Africa 93 - Sud Etudiant -Femmes en noir - Collectif Féministe Ruptures -Solidarité Franco-iranienne -Comité Communiste Internationaliste Trotskyste - Mouvement Français pour le Planning Familial - PCF - Fac Verte -JC - NPA jeunes 31 - Comité France-Népal
RENDEZ-VOUS PUBLICS EN RÉGIONS
Strasbourg, Lyon, Valence, Saint-Fons, Marseille, Toulouse, Paris Ile-de-France
Strasbourg
Jeudi 5 février, 20h, a Maison des syndicats -rue Sédillot.
Lyon
Vendredi 6 Février, 19h, Université Lumière Lyon 2
Site des quais -4 bis, rue de l’Université -Amphi Lucie Aubrac (Tram T1 rue de l’Université)
Valence
Samedi 7 février, 14h, Maison des sociétés
Saint-Fons
Samedi 7 Février, 19h, Centre Social Louise Michel
5, avenue Antoine Gravallon -Salle Tranchat (Bus 93, arrêt " Grand Chassagnon ")
Marseille
Mercredi 11 février, 19h, librairie associative " Païdos " - 54, cous Julien - 6ème arrt
Toulouse
Vendredi 13 février, 20h30, Bourse du Travail - Place Saint Sernin
RENDEZ-VOUS PUBLICS Paris-Ile de France
Dimanche 8 février
Venez manger pour soutenir Rawa !
20 h : Restaurant de soutien
La Rôtisserie, 4 rue Ste-Marthe, 75020.
Métro : Goncourt
Lundi 16 février
19 h : Rencontre féministe avec une militante de Rawa.
Maison des Femmes de Paris (lieu non-mixte),
63 rue de Charenton, 75012.
Métro : Reuilly-Diderot
Mardi 17 février
18 h-21 h : Conférence-débat
Bourse du travail de Paris,
3 rue du Chateau-d’Eau, 75011.
Métro : République
Mercredi 18 février
19 h : Conférence-débat à La Courneuve
chez Africa 93,
3 Place Georges Braque.
Tramway : La Courneuve 6 routes / RER : La Courneuve Aubervilliers
Contacts presse
Mail : collectif. rawa. paris@gmail. com
Tél. : 06 65 59 56 16 ou 06 25 52 18 32.
Africa 93
En diminuant de 42 % dans la Loi de Finances 2009 le montant affecté au conseil conjugal et familial, l’Etat programme à très court terme la suppression totale des actions d’information, d’éducation et de prévention dans les domaines de la sexualité et de la vie de couple et affective.
Par cette décision, l’Etat montre sa volonté d’abandonner les missions qui sont les siennes quant à l’accueil, l’information et la prévention concernant la contraception, la fécondité, la sexualité. Il se désengage, par là, de la préparation des jeunes à la sexualité, à leur vie de couple et à la fonction parentale. Il marque son désintérêt pour les pratiques d’accueil et de conseil, qu’elles soient mises en oeuvre lors d’activités collectives ou d’entretiens individuels.
Ces missions d’utilité publique sont donc très clairement menacées par la baisse des financements, déjà largement insuffisants, alors que la Loi Neuwirth a clairement affirmé le rôle essentiel joué par les associations aux côtés de l’Etat.
Pourtant, dans une société où les relations filles-garçons sont de plus en plus marquées par la violence, où les campagnes nationales de prévention et d’information ont besoin des relais de terrain pour être efficaces, ces missions définies par la loi, plus que jamais, sont primordiales !
450.000 personnes bénéficient chaque année des actions du Planning Familial dans ses 70 associations départementales de Métropole et des DOM. La conséquence de cette brutale démission de l’Etat est la fermeture programmée d’un grand nombre de ces lieux d’accueil individuels et collectifs.
L’Etat doit assurer sa responsabilité nationale pour l’information, l’éducation à la sexualité, et la prévention pour toutes et tous conformément à l’article 1 de la Loi 73-639 du 11 juillet 73.
L’Etat ne doit pas supprimer les lieux d’écoute et de parole, mais les développer.
L’Etat ne doit pas supprimer les interventions collectives, mais les développer.
L’Etat doit donner aux associations qui assurent ces missions, les moyens aujourd’hui nécessaires, pour le développement de leurs activités et de leurs interventions.
Tous ces acquis sont récents, ces droits sont fragiles,
Nous avons lutté pour les obtenir,
luttons ensemble pour les défendre !
Vous souhaitez soutenir Le Planning Familial, signez la pétition.
Collectif
Nous vous proposons deux documents pour étayer cette thèse.
Tout d'abord, la chronique de Caroline Fourest sur France Culture qui répond à une attaque du Vatican l'accusant de complot lesbiano-maçonnique (il fallait l'inventer !), qui est à écouter à cette adresse : http://radiofrance-podcast.net/podcast/rss_10725.xml
Et pour finir, on vous propose la lecture du tract de SOS Tout-petits qui appelait à manifester le vendredi 6 février devant le siège du Grand Orient de France afin de les convertir, tout un programme !
Faut-il en rire ou en pleurer, à vous de voir.
ReSPUBLICA
Alors que le décret autorisant la construction du premier réacteur nucléaire de type EPR en France était publié au Journal Officiel onze jours avant la dernière élection présidentielle, Sarkozy vient d’annoncer la construction en 2012 d’un deuxième réacteur de ce type à Penly en Seine-Maritime.
C’est EDF, numéro 1 mondial de l’exploitation de centrales nucléaires qui se voit attribuer la part du lion du contrat, malgré l’intense lobbying de GDF-Suez pour l’emporter. Et comme il importe plus de s’assurer la bienveillance des puissants que de revoir durablement la politique énergétique de la nation, Sarkozy a laissé entendre que GDF-Suez aurait le marché en cas d’annonce d’un troisième réacteur EPR, histoire de ne pas se froisser avec le nouveau géant de l’énergie. Total (l’entreprise française qui engrange 390 € de bénéfices par seconde et ne paie quasiment pas d’impôts en France) qui avait monté un projet avec GDF-Suez, revendique maintenant une part minoritaire significative dans le réacteur de Penly. Il avait été un temps envisagé d’annoncer la construction simultanée de deux nouveaux réacteurs EPR, l’un concédé à EDF, l’autre à GDF-Suez, mais comme cela ne correspondait à aucun besoin identifiable, la pilule aurait été un peu grosse à avaler...
Ainsi, la logique qui continue à prévaloir est celle de susciter la demande par une offre abondante, de satisfaire les amis du pouvoir aux commandes des oligopoles de l’énergie, et d’offrir une vitrine pour fourguer la camelote à l’étranger.
Car l’EPR n’est pas la technologie dont la France a besoin ! Elle ne répond en rien aux enjeux d’indépendance (approvisionnement en matière première), de sécurité (risques augmentés par rapport aux centrales actuelles) et de protection des générations futures (déchets radioactifs abondants). Exclue du Grenelle de l’environnement, la réflexion sur l’avenir du nucléaire en France n’a pas eu lieu.
Ce qu’il faut aujourd’hui pour notre nation, c’est :
Christian GAUDRAY
Co-responsable du secteur développement durable de l'UFAL
www.ufal.org
Ce samedi 24 janvier se tenait à Paris une grande première pour le Parti de Gauche (PG), le front de gauche et indirectement pour la gauche du XXIème siècle : le forum du PG sur l’écologie et le développement durable. D’abord, il ne s’agit pas de dire qu’en une journée le programme du PG concernant le développement durable a été fixé, et concrètement c’est même tout le contraire qui s’est produit !
La critique du texte mis en débat a été portée aussi bien par des intervenants internes au PG (entre autres Franck Pupunat, Corinne Morel-Darleux, Jacques Généreux ou Jacques Rigaudiat), que par des invités qui ont répondu chaleureusement à l’invitation (Martine Billard, député des Verts, et Hervé Kempf, journaliste auteur de « Pour sauver la planète, sortez du capitalisme »). Dès les premières interventions, le texte initial a très justement porté sa désignation de « texte martyr » (et un grand merci a été adressé à la susceptibilité de ceux qui ont rédigé ce texte qui servi de base aux débats). La base qu’il proposait a été largement débordée, répondant en cela aux vœux des organisateurs de ce forum. Très rapidement, l’analyse initialement proposée (très économiste et macroscopique, rendant le capitalisme seul responsable de la dégradation de l’écosystème) est remise en cause : comment comprendre l’échec écologique des ex pays soviétiques ? Agir au niveau macroscopique suffit-il lorsque les modes de vie sont au cœur d’un système ? Quelle planification mettre en place ? La planification agit au niveau macroscopique (la société), or l’expérience des pays de l’Est montre qu’agir et penser l’action sur ce seul plan ne suffit pas.
Sur le plan macroscopique, la planification est discutée, complétée, enrichie et assise. Les grands changements de société ne peuvent être confiée à des intérêts privés pour lesquels priment « le temps court » alors que certains sujets (comme l’écosystème) demande des actions sur le « temps long ». Mais cette planification a été également discutée de manière culturelle : compte tenu de l’impact même du mot (lié aux expériences soviétiques des « gosplans »), un tel terme est-il encore souhaitable ? La réponse vient de notre propre fond culturel et de notre propre tradition politique, car la France et le Pacte Républicain sont liés aux planifications, et notre pays se dota du Commissariat au Plan (créé en 1946 sous De Gaulle et dissout par la droite après les manifestations du CPE) précisément pour relever les défis d’une communauté de destin voulant la paix, tant collective qu’individuelle. Des exposés de grande qualité ont montré l’imbrication de l’économie, de l’agriculture, de la société et de l’écologie. Une grande partie des échanges s’est faite sur les indicateurs, sur la critique du PIB comme boussole des politiques publiques, mais aussi sur la nécessité de se doter de plusieurs indicateurs (et non un seul !) et le contenu de ces indicateurs non exclusivement centrés sur le niveau macroscopique, mais tenant compte du niveau microscopique, c’est à dire la vie de l’individu-citoyen.
De manière moins attendue, le texte servi également de base pour une critique profonde de l’approche de la politique Nombre de termes firent très rapidement leur apparition dans les interventions : « culture », « mode de vie », « mœurs », « référents culturels », « temps court – temps longs », « société de consommateurs », « valeurs culturelles », « l’avoir sur l’être », « du beau réservé aux riches et du sale réservé aux pauvres », etc. Autant de termes et d’expressions qui montrent que la question de l’écologie politique est l’occasion d’un débat plus profond que la seule critique d’un système économique. La conclusion majeure du forum est que la gauche du XXIeme siècle ne peut plus se contenter de rester sur ce plan macroscopique (économique et société), tout la pousse à aller affronter le capitalisme sur le terrain de l’éthique de vie, terrain sur lequel celui-ci règne en maître depuis que la gauche s’est enfermée dans l’analyse purement macroscopique. L’écologique politique amène à constater que le capitalisme a dressé des individus pour que chacun d’eux désire et se réfère à des valeurs de vie qui rendent indispensable un système axé sur la production de toujours plus de biens matériels. Il n’a pas fallu attendre 1 heure de débat pour que des propos portent sur les valeurs de vie, sur la culture, sur le fait que c’est par cette main mise sur les consciences que le capitalisme se rend indispensable et fait accepter les énormes destructions dont il est la source. Mieux, les propos mirent en évidence que les pays soviétiques, négligeant les analyses en terme de culture et d’éthique, se sont construits eux aussi sur une vision productiviste et industrieuse de l’existence. Sur ce plan là, le choix du PIB (ou de son équivalent dans les pays soviétiques) pour guider les politiques publiques est révélateur : il n’est pas un choix économique, il est un choix relevant d’une vision du monde, de la société, et de la vie individuelle exclusivement tourné vers la production, l’exploitation du monde, le bien matériel. Seul ce niveau d’analyse permet de montrer pourquoi, aussi bien à l’Est qu’à l’Ouest du mur de Berlin, les politiques conduisirent à la destruction de l’écosystème. L’analyse économique vient après, car elle ne décide que de comment fût mené ce choix éthique et culturel (par un centralisme d’état ou par la propriété individuelle).
Il faut remercier le PG qui depuis le début propose une rupture profonde avec la tradition de la gauche du XXieme siècle.
D’abord une rupture avec les mentalités à gauche : qu’il s’agisse d’Eric Coquerel, de Jean-Luc Mélenchon ou de François Delapierre, tous ces intervenants ont eu a cœur de rappeller que le PG est désireux des expériences, des mentalités, et que la gauche doit nourrir des familles politiques, non pour s’étriper, se morceler, mais pour discuter, se concerter, échanger et s’enrichir.
Rupture sur les pratiques : le texte proposé pour initier la discussion fût un « texte martyr ». Il n’avait pas vocation à être l’introduction et au final... la conclusion du forum ! Il n’était là que pour faire réagir, lancer les débats, servir de point de départ et non être le point d’arrivée. La gauche du XXieme siècle est mourante de n’avoir pas su remettre en cause sa production idéologique.
Rupture également sur la vision élitiste : la gauche du XXIème doit repolitiser des individus-isolés par les valeurs inculquée par le libéralisme anglo-saxon. Et il n’y a d’autres solutions que le vote, le débat et les référendum pour ancrer les grandes décisions d’une communauté de destin, comme notamment le choix des indicateurs qui doivent guider les politiques publiques. La tradition du XXIème siècle doit s’ancrer sur des individus-citoyens, acteur du Pacte Républicain (et non « consommateurs »...)
Enfin, une rupture est à venir avec l’arrivée en force de l’écologie politique. Car de manière très naturelle, tous les propos ont repris, notamment, les travaux d’André Gorz qui expliquait que l’analyse économique et sociale est une impasse, que la contradiction ultime du capitalisme n’est pas économique et sociale : elle est écologique. Car sans écologie : plus de vie humaine possible sur la planète. Or, ce niveau d’analyse de l’écologie politique englobe à la fois l’analyse macroscopique (économie, société), mais aussi le niveau d’analyse microscopique (l’individu). Et si la gauche a une grande tradition politique sur l’analyse macroscopique, elle est un « nain » sur le plan microscopique... et c’est précisément parce que la gauche a laissé ce terrain aux seuls libéraux qu’elle est toujours en retard. C’est pour cette raison que le terme « individualisme » renvoie souvent à un vulgaire« égoïsme », alors que des intellectuels de gauche ont toujours entretenu et défendu un « individualisme-républicain » porteur de nos valeurs.
Au final, mettre en place une planification écologique heurtera de plein fouet nos modes de vie, nos référents individuels, nos intimités, notre conception de ce que « doit être une vie heureuse ». Ces référents sont pour l’heure définis par les seuls libéraux : eux seuls imposent à l’individu les valeurs pour le guider dans ses rapports au monde, à lui même et aux autres (définition de ce qu’est une philosophie de l’individu). Si la gauche du XXIème siècle veut l’emporter, elle doit impérativement entrer et se battre sur ce terrain ; non pour diriger ou imposer « comment vivre », mais pour expliquer que des référents de vie, des valeurs de vie personnelles, il en existe plein et qu’il y a milles autres façon d’être heureux et de mener une vie sereine autrement qu’en possédant, achetant et travaillant des heures de vie durant pour rembourser ce que le libéralisme a imposé dans les valeurs comme étant « indispensable pour se sentir heureux ». Voila la rupture à venir : penser l’éthique et la culture, rompre avec l’émancipation individuelle comme conséquence évidente de l’émancipation collective et se doter d’une idéologie traitant du macroscopique aussi bien que du microscopique. Cette rupture à venir est certainement le plus grand défi que la gauche du XXIème siècle ait à relever car elle remet en cause 150 ans de culture politique. Mais les périodes de crise sont des occasions de révolution idéologique, ne doutant pas que celle-ci nous donnera de quoi construire un autre monde.
Guillaume Desguerriers
D’abord il me faut vous dire quelques mots de la CAMIF. Lancée en 1947 par la MAIF, la mutuelle d’assurance des enseignants, elle s’est ensuite émancipée jusqu’à devenir une grande entreprise coopérative de vente par correspondance aux enseignants, plus petite certes que La Redoute ou les Trois Suisses, mais d’une taille respectable.
Elle comportait plusieurs filiales : une filiale Particuliers, une filiale Habitat, une filiale Collectivités, et deux autres petites filiales. Mais le gros du chiffre d’affaires (70 %) était fourni par la filiale Particuliers. Et tout alla bien jusqu’en 1999-2000, où elle a connu ses deux premiers exercices déficitaires. On a voulu alors renforcer son sociétariat en acceptant les adhérents de la MGEN, mutuelle de santé des enseignants, puis de tout acheteur. Et les mutuelles cousines, la MAIF, la MGEN, la CASDEN, ainsi que les Banques populaires sont venues à la rescousse. Je passe sur quelques péripéties. En 2007 le groupe fait appel à des capitaux privés pour recapitaliser la filiale Particuliers : celle-ci passe alors sous le contrôle de OSIRIS Partners, une société de gestion d’un fonds d’investissement. En octobre 2008 la CAMIF est mise en redressement judiciaire : elle n’est pas tout à fait morte, mais Camif Particuliers est liquidée, sans autorisation de poursuivre ses activités, et le gros du personnel est en voie de licenciement.
Voilà pour les faits. A présent je vais vous raconter ma petite histoire, et je pense qu’elle n’est pas sans rapport avec cette faillite.
J’ai été sociétaire-client de la CAMIF pendant des décennies. J’y ai commandé régulièrement, sur un catalogue de près de 400 pages, des meubles, des rideaux, de l’électroménager, des vêtements et plein d’autres choses. Et j’étais très satisfait des services qu’elle m’offrait.
Ses produits étaient en général un peu plus chers que chez ses concurrents. Mais la qualité était presque toujours au rendez-vous : les laboratoires de l’entreprise les testaient et les sélectionnaient avec soin. Les produits étaient généralement livrés à temps, plus rarement avec des délais accrus, mais sans rupture de stock. Le catalogue contenait de petites notices d’information, qui me fournissaient les détails techniques essentiels, assortis de quelques conseils selon l’usage que j’envisageais. A tout moment je pouvais obtenir quelqu’un au téléphone, qui me dirigeait vers un technicien, lequel prenait tout le temps voulu pour répondre à mes questions (on n’était pas à l’époque où l’on vous dis « faites le 1 », puis « appuyez sur la touche étoile », attendez huit minutes, etc.), et je tombais toujours sur quelqu’un de compétent. Bref j’étais un client fidèle, mais comme j’étais en même temps automatiquement sociétaire, je recevais certaines années une « ristourne » quand le résultat de l’entreprise avait été suffisamment bénéficiaire.
Puis a débarqué (je ne sais comment, je ne fais que livrer un témoignage) un nouveau management, « moderne », rompu aux techniques de l’optimisation des ressources, humaines en particulier, et très féru dans les dernières innovations du marketing, sans doute après être passé dans les écoles de commerce adéquates. Et, dès ce moment-là tout a changé. Auparavant je recevais le gros catalogue une fois par an, les prix ne bougeaient pas, et c’est tout juste s’il y avait des soldes sur quelques produits une fois l’exercice écoulé. Après j’ai été inondé de courriers (je crois bien un par semaine) me proposant des rabais, des rabais exceptionnels, des chèques cadeaux, des promotions, et j’en passe. Il fallait alors être un imbécile pour acheter au prix catalogue, le mieux étant de guetter en permanence la bonne affaire et de se précipiter dessus. Le flot de prospectus est allé croissant jusqu’à ce que je sois saisi par la nausée. Alors j’ai cessé définitivement d’acheter quoique ce soit à la CAMIF.
Je me souviens aussi que, toujours en tant que sociétaire, je recevais les documents pour voter aux assemblées générales de la CAMIF sur les résolutions présentées par la direction. Quand la CAMIF a commencé à éprouver de sérieuses difficultés, une certaine année (j’ai oublié laquelle) le comité d’entreprise a présenté, après une brève mais éloquente analyse de la situation, des contre-résolutions. La direction les a mises en dernière page, après les avoir commentées pour dire tout le mal qu’elle en pensait. Comme il n’y a probablement eu que peu de votants, la direction s’est arrangée pour l’emporter haut la main.
Si la CAMIF est allée de mal en pis, je pense que c’est parce que nombre de ses clients particuliers (ils étaient encore 1, 2 millions en 2007) ont fait comme moi, ou ont simplement raréfié leurs achats. Passée sous contrôle extérieur, la filiale Particuliers vient donc de fermer ses portes, liquidant ce qu’il reste des stocks et ayant même le plus grand mal à assurer la livraison des articles déjà commandés et payés. Si les clients sont choqués, le traumatisme est terrible pour les employés licenciés.
Je trouve cette histoire est édifiante à double titre. Cette coopérative réputée vieillotte faisait cas de ses clients, comme de ses fournisseurs. Nous l’aimions parce que nous pouvions lui faire confiance, sachant qu’elle ne cherchait pas à nous vendre à tout prix, voire à nous arnaquer sur la qualité ; nous savions que ses employés faisaient bien leur métier, parce qu’ils étaient responsabilisés et par ailleurs correctement payés. Et sa crise, j’en suis persuadé (mais il faudrait interroger ses employés, qui en savent long sur la question) ne vient pas de la dite crise générale des entreprises de vente à distance, ni de son manque de spécialisation ou d’agressivité sur le marché, mais d’un management stupide, qui n’avait rien compris, malgré ses déclarations de principe, à sa spécificité ni à ses rapports de proximité avec la clientèle. Deuxième leçon : si la coopérative avait été une coopérative de production, dirigée par des élus, elle n’aurait sans doute pas connu tous ces déboires, car elle avait une assise solide, une longue expérience accumulée, et un chiffre d’affaires important. Mais ce n’était qu’une coopérative de distribution, possédée en théorie pas ses sociétaires-clients, détenteurs de parts sociales, mais en réalité peu et mal informés, et généralement abstentionnistes lors des votes, car ils avaient d’autres chats à fouetter. Peut-être se seraient-ils encore mobilisés si la filiale avait été encore la leur et si leur avis avait été sérieusement sollicité, mais de toute façon OSIRIS n’en voulait pas : détentrice de 66 % du capital, elle a préféré la mise en faillite, pour aller placer ses billes ailleurs.
Il faudrait revenir sur toute cette histoire, mais je m’en tiendrai à cet épilogue, et je demanderai à mon lecteur de trouver l’épitaphe qui convient.
Tony Andréani Professeur émérite de sciences politiques à l'Université de Paris 8
Texte en complément du texte de Tony Andréani dans ce même numéro.
La Rédaction
Ce texte est très intéressant !
Maintenant, il faudrait savoir précisément pourquoi en 1999 - 2000, les résultats ont été déficitaires.
L’arrivée des managers issues des écoles de commerce a t-elle été la conséquence des ces mauvais résultats ou bien en était-ce la cause ?
Le mouvement coopératif comme le mutualisme ont depuis toujours pour origine, les défaillances de l’offre commerciale sur un marché.
Les consommateurs s’organisent entre eux pour pallier ces défaillances en développant un mode de gestion de la production et d’échange guidé par la raison, cadré par des principes démocratiques et pratiquant la réciprocité.
Ce modèle d’entreprise ressurgi régulièrement à certaines période de l’histoire pendant les phases de crises du capitalisme puis disparait lorsque le capital relance la production sur son modèle.
En 1945, alors que l’appareil productif capitaliste était détruit et que ses cadres étaient politiquement discrédités pour avoir en majorité collaboré avec l’occupant, les coopératives de consommation ainsi que les mutuelles de développement d’œuvres sanitaires fleurirent dans tous les bassins ouvriers. Les coopératives ne survirèrent pas au paroxysme de la société de consommation des années 70. La CAMIF était une exception !
Les mutuelles ouvrières étant restées sur le modèle de 45 se comptent sur les doigts des mains. De même, les banques coopératives, hormis l’exception notable du Crédit Coopératif se sont transformées en banques financières ayant des pratiques souvent bien pires que les banques d’affaires. Il en est de même pour la quasi totalité des mutuelles assurances.
Bien sur cette forme d’économie sociale que sont les coopératives, les mutuelles et les banques coopératives sont bien mis à mal par les directives européennes organisant le marché. Les mutuelles comme les banques coopératives doivent respecter des référentiels (Solvency 1 et 2 pour les mutuelles et Bale 1, 2 et 3 pour les banques) qui les poussent à se coltiner avec le capital actionnarial.
Mais cette mise en concurrence ne saurait expliquer à lui seul le désintéressement des citoyens consommateurs pour ces modes de gestion qui pourraient être alternatif au capitalisme.
Cette question est vieille comme le mouvement ouvrier.
En 1901, Jules Guesde indiquait que : "... Actuellement, presque toutes nos coopératives sont obligées, par le milieu capitaliste, à faire du capitalisme, car, au lieu de distribuer à leurs membres, au prix coûtant, elles vendent, et sont de plus en plus contraintes de vendre à des tiers, en vue d’un profit. L’antagonisme, que la coopération devait faire disparaître entre vendeurs et acheteurs, continue à subsister. Qu’il y ait des exceptions, soit. Mais, en général, vous êtes de plus en plus condamnés, par un milieu basé sur la concurrence, à chercher des moyens d’existence et de développement en dehors de la distribution des produits ; vous êtes amenés à vendre au public, à réaliser des bénéfices, à ‘ faire du commerce, en un mot, n’étant plus ainsi que de nouveaux grands magasins, constitués par de petits actionnaires ouvriers, au lieu de grands magasins constitués par de gros actionnaires bourgeois.
Telle est la réalité. Il ne s’agit pas de s’illusionner et de s’emballer; voilà ce qu’est et ce que sera de plus en plus la coopération... "
Pourtant Karl Marx dans le "Capital" Livre III analysait la coopération comme une étape vers la socialisation des moyens de production et d’échanges : "... Même les fabriques coopératives créées par les ouvriers sont destructives de l’ancienne forme, bien que leur organisation doive nécessairement reproduire partout tous les défauts du système existant. Elles suppriment cependant l’antagonisme entre le capital et le travail, étant donné que les ouvriers y sont eux-mêmes capitalistes et y appliquent les moyens de production à la mise en valeur de leur propre capital. Elles montrent comment, à un stade déterminé du développement des forces productives et des formes de production que la société y fait correspondre, un mode de production doit naturellement donner naissance à un autre. Sans la fabrique capitaliste la fabrique coopérative n’aurait pas pu se développer. Et de même le système capitaliste du crédit lui a été nécessaire, car celui-ci n’est pas seulement la base principale de la transformation de l’entreprise capitaliste privée en société capitaliste par actions, mais également un moyen de développement des entreprises coopératives. Les sociétés capitalistes par actions sont, comme les fabriques coopératives, des formes intermédiaires de la transformation de la production capitaliste en production associée, seulement les unes résolvent l’antagonisme entre le capital et le travail négativement et les autres positivement... "
Il serait donc du rôle d’un véritable "Parti de Gauche" d’analyser ces formes de dépassements du capitalisme et de faire des propositions pour leur redonner vie et les favoriser
Et nous pourrions ainsi nous mettre dans les pas de Kausty qui déclarait : "
« Quelle image se faire de la République sociale à venir si ce n’est celle d’une immense Coopérative de consommation, mais qui serait en même temps une Coopérative de production, où tous les ateliers travaillent pour la consommation de ses membres. »
« … Si la production coopérative ne doit pas rester un leurre et un piège ; si elle doit remplacer le système capitaliste ; si des sociétés coopératives doivent régler la production nationale sur un plan commun, en la plaçant sous leur propre contrôle, et en mettant fin à l’anarchie constante et aux convulsions périodiques qui sont les conséquences inévitables de la production capitaliste, que sera-ce donc, si ce n’est le communisme, le communisme possible ? »
Au travail donc !
Nicolas Pomiès Directeur de L'Avenir Mutualiste (www.avenirmutualiste.fr), de l'Union de Gestion des Oeuvres Sociales et Sanitaires (UGOSS - www.ugoss.fr) et de la Mutuelle Solidaire d'Aide à la Personne (MSAP - www.msap.fr)
Éd. L’Harmattan, Paris, 2009.
Évelyne Perrin tente dans cet ouvrage de mettre au jour les causes de la persistance en France des discriminations et du racisme envers les jeunes d'origine maghrébine.
L’auteure fait ainsi état de la ségrégation scolaire des enfants d’immigrés. Cette ségrégation s’exprime à travers leur concentration dans des « école-ghettos », leur orientation scolaire précoce, souvent forcée et peu qualifiante, ainsi qu’une déperdition scolaire importante. Leur situation n’est pas meilleure pour ce qui est de l’accès et des études à l’université. Ces jeunes, y compris les plus diplômés parmi eux, sont ensuite confrontés à un chômage massif, ainsi qu’à la discrimination à l’embauche et à leur maintien au bas de l’organigramme de l’entreprise.
Ils sont également, comme leurs familles, en butte à la discrimination au logement. Classés comme « populations à risque », ils sont parqués dans les banlieues et dans certains quartiers des villes.
L’ « islamophobie » qui règne en Europe et en France s’explique selon elle par la coïncidence entre la montée de la religiosité-refuge de jeunes maghrébins, précarisés et stigmatisés, avec l’avènement de l’islamoterrorisme. Le point culminant de cette « islamophobie » aurait été atteint par la loi laïque contre les signes religieux à l’école, du 15 mars 2004, et la bataille qui l’avait précédée. Cette loi a pourtant été accueillie avec beaucoup de soulagement par une grande partie des familles musulmanes, surtout des jeunes filles et des jeunes femmes de cette confession, qui estiment que cette loi les protège et protège leur religion de la manipulation politique.
Quant à la bataille à laquelle elle fait allusion, elle avait opposé, au sujet du hidjab islamiste, la gauche républicaine et laïque aux islamistes, appuyés par les fondamentalistes juifs et chrétiens, auxquels s’est ralliée une partie de l’extrême gauche. Il est à peine utile de rappeler que pour les peuples musulmans, seuls les islamistes dans leur diversité (droite conservatrice, extrême droite et islamofascistes, à l’instar des salafistes radicaux) s’acharnent, depuis leur création à Ismaïlya en Egypte, à la fin des années vingt, à vouloir faire porter leur uniforme politique et musulmanophobe aux femmes musulmanes. Cependant, l’immense majorité d’entre elles ce rejette uniforme. Car elles considèrent que leurs corps, n’est pas, comme le pense les islamistes, une awra (= une honte), qu’il faut cacher. Elles considèrent également que cet uniforme porte atteinte à leur féminité et à leur dignité d’être humain, et les stigmatise.
On s’étonne aussi dans ce livre « qu’un bout de foulard provoque un emballement hystérique des tenants du modèle républicain » et de ses « féroces thuriféraires ». L’étoile jaune et la croix gammée ne sont pas qu’un bout tissu répliquaient les féministes et les laïques de gauche. L’auteure confond effectivement le support du symbole, qui peut être neutre, avec le symbole lui-même.
Par ailleurs, le racisme et la xénophobie ont tué un grand nombre de jeunes, majoritairement d’origine maghrébine. Évelyne Perrin cite une liste non exhaustive d’"assassinats" de ces jeunes, et dont les auteurs demeurent souvent et scandaleusemennt impunis. C’est ainsi que pas moins de 150 meurtres racistes de jeunes ont été commis, rien que de 1980 à 1985.
Pour ce qui est des émeutes de banlieues, de novembre 2005, l’auteure les explique par les mauvaises conditions socio-économiques et la stigmatisation des jeunes d’origine maghrébine. Elle déplore également en quelques mots, les 8 000 à 10 000 véhicules incendiés, ainsi que les destructions considérables des infrastructures privées et publiques commis par les émeutiers. Elle juge néanmoins qu’il ne fallait pas condamner à des peines de prison les 6 00 incendiaires sur les 5 200 jeunes qui avaient été arrêtés puis relâchés, peines qu’elle trouve disproportionnées.
Les couches populaires des banlieues, très majoritairement immigrées, n’ont pas manqué de voir dans cette dernière position un encouragement au nihilisme autodestructeur de ces jeunes, une prime à l’impunité et un déni de justice à leur égard.
L’auteure pointe aussi du doigt la répression administrative et policière, ainsi que l’exploitation patronale de centaines de milliers de « sans-papiers », dont l’utilité économique est pourtant reconnue dans nombre de secteurs.
Évelyne Perrin, à l’instar des chercheurs communautariens anglo-saxons et des tenants d’une société multiculturelle en France, rejette la question de l’intégration, pourtant centrale en sociologie, qu’elle qualifie de « marché de dupe ». L’auteure confond, là aussi, entre intégration et déculturation, voire dépersonnalisation. Elle dénonce en revanche, et avec raison, l’hypocrisie consistant à exhorter les jeunes d’origine maghrébine à s’« intégrer », tout en dressant devant eux des obstacles socio-économiques, etc. pour les en empêcher.
Elle estime aussi que la notion de « communautarisme » est instrumentalisée pour disqualifier les activités sociale, culturelle, politique « autonomes » des immigrés maghrébins ou de cette origine. Sinon, pourquoi n’applique-t-on pas selon elle cette notion à l’encontre des Bretons, des Juifs, des Italiens, le réseau des grandes Écoles… ? Les exemples qu’elle cite trahissent toutefois sa méconnaissance de la différence existant entre activité communautaire et activité communautariste.
De même que sa lecture à contresens de l’Ecole sociologique de Chicago sur la fonction protectrice des ghettos afro-américains aux États-Unis d’Amérique lui fait jusqu’à regretter la destruction dans les années 1960 et 1970, par les pouvoirs publics, des bidonvilles où végétaient en grand nombre les immigrés. Ceci est d’autant plus surprenant que cette affirmation et la suivante de même type, relative à la destruction de certaines barres HLM, dans les années 1990 et 2000, contredisent sa critique pertinente de la concentration géographique des populations immigrées et de leurs mauvaises conditions d’habitation.
L’affirmation identitaire des jeunes français d’origine maghrébine exprime selon elle leur refus de la conception française et républicaine de l’intégration ; une intégration qui les dépouillerait de leur identité. L’auteure reconnaît cependant que ce n’est nullement le cas d’un grand nombre d’entre eux, qui vivent plus ou moins bien leur double culture.
Selon l’auteure, le passé colonial de la France est, comme le proclame l’Appel des Indigènes de la République, une donnée clef pour comprendre le racisme anti-Maghrébins en France.
C’est pourquoi, elle réfute la critique faite par la gauche à cet Appel d’ « ethnitiser la question sociale ». Evelyne Perrin a bien raison de rappeler que la discrimination ethnique, subie par les immigrés et leurs enfants, s’ajoute à la discrimination sociale. Seulement, le reproche qui est porté à cet Appel est lié à la place surdéterminante que ce dernier accorde au facteur ethnique.
Autre reproche important adressé à cet Appel : son racisme à rebours à l’encontre du peuple français. Pour beaucoup, cet Appel est lui-même le reflet le complexe du néocolonisé, complexe qui ne s’exprime pas seulement pas le mimétisme du colonisateur par le colonisé, mais aussi par la confusion dans une même haine du système colonial français, de la France et des Français.
Hakim Arabdiou
Le 13 février 1960, la France a accédé au statut de puissance nucléaire, après l’explosion, à Reggane, dans l’extrême sud algérien, d’une bombe atomique expérimentale, d’une puissance quatre fois supérieure à celle d’Hiroshima, au Japon. Cette explosion sera suivie de trois autres dans l’atmosphère, et de treize autres sous terre à Aïn-Ikker, dans le Hoggar, suite aux protestations des États subsahariens limitrophes concernant les risques de radioactivité sur leurs populations.
Gerboise Bleue est le nom de code du premier essai. Il est également le titre du documentaire de 90 minutes que le jeune réalisateur, Djamel Ouahab, vient de consacrer aux conséquences dramatiques sur la santé de milliers de militaires français et de civils parmi la population locale algérienne. Il sera diffusé à partir du 11 février prochain dans les salles de cinéma en France.
Une clause secrète des Accords d’Evian, signée par la France et l’Algérie, le 18 mars 1962, autorisait la France à poursuivre ses expériences en Algérie, jusqu’en 1967. Cette clause concernait aussi l’utilisation, jusqu’en 1978, de la base ultra-secrète B2-Namous, à Hammadir, dans la région saharienne de Béchar, pour les essaies d’armes chimiques et bactériologiques.
Les victimes françaises, dont beaucoup d’entre elles sont décédées, s’estiment trahies par leur propre État : ses responsables les avaient non seulement exposées en connaissance de cause, mais ils refusent aussi de reconnaître leur atteinte par les multiples maladies causées par ces essais pour ne pas avoir, selon eux, à les indemniser.
C’est ainsi que tous les procès qu’elles ont intentés à l’armée française ont été rejetés au motif qu’une plainte n’est recevable que si elle est déposée dans les 30 jours suivants le départ définitif de l’armée. Mais comment les plaignants pouvaient-ils le savoir, alors qu’ils avaient été sciemment tenus dans l’ignorance de la nature des risques encourus, à court ou moyen terme ? « On ne nous a rien dit » explique l’une des victimes. « On nous a juste demandés de nous rendre au point zéro du lieu de l’explosion, de lui tourner le dos et de fermer les yeux au moment de l’explosion » ajoute-il. L’explosion avait fait un bruit énorme et dégagé une lumière très vive qu’ils ont perçue à travers les paupières. Des habitants de Reggane et d’Aïn-Ikker se souviennent eux aussi tôt le matin d’un bruit énorme et d’un « éclair ». Ils en ignoraient cependant l’origine. Depuis, plusieurs parmi eux sont devenus aveugles.
Le gouvernement français refuse aussi d’adopter le « principe de présomption d’origine » contrairement aux États-Unis d’Amérique, au Canada… Un médecin interviewé dans le film et très investi dans cette affaire s’est insurgé : c’est rien moins qu’une « monstruosité scientifique » que d’exiger des victimes qu’elles apportent les preuves de ce lien de cause à effet, en l’état actuel de la science.
Le même témoin français cite le traitement très lourd auquel ils est astreint depuis fort longtemps. Sa campagne est partie car elle trouvait qu’il « était souvent malade ». Une autre victime française défigurée par les affections dues, selon lui, à sa contamination par ces explosions, en est à la vingtième ou trentième opération chirurgicale de différentes sortes.
Les victimes parmi les Touaregs algériens, totalement ignorées par l’État français, réclament justice eux aussi : que la France répare les dégâts qu’elle a occasionnés en Algérie, tant aux Hommes qu’à l’environnement. On enregistre ainsi une fréquence élevées de maladies congénitales très handicapantes. Les médecins des hôpitaux publics de la région disent en parler entre eux des liens possibles de ces maladies avec les essais atomiques qui ont eu lieu, ici, durant la première moitié des années 1960. Mais sans en avoir la certitude, précisent-ils, car ils ne disposent pas de moyens scientifiques et techniques adéquats pour étayer leurs présomptions. Ce serait bien affirme une victime algérienne, si la France construisait un hôpital « pour les soigner. » Des vergers de palmiers sont également devenus improductifs et leurs feuilles asséchées, certainement pour les mêmes raisons, selon les habitants.
Un habitant de Hammadir exige de la France fasse disparaître la sorte de petite pyramide bétonnée qu’elle a construite en pleine nature, et contenant très probablement des déchets d’armes chimiques et bactériologiques. Elle a abandonné également du matériel rouillé et contaminé, ainsi que des déchets radioactifs sur le sol à la portée de tous.
Selon Mohamed Bedjaoui, ministre algérien des Affaires étrangères, les autorités françaises ne se sont jamais souciées de prendre contact avec le gouvernement algérien pour régler ce problème. Mais à croire le porte-parole du ministère français de la Défense, ce sont plutôt les responsables algériens qui ne se sont pas manifestés auprès d’eux à ce propos. Il s’est toutefois empressé de déclarer que la France est tout à fait disposée à entamer des négociations avec l’Algérie autour de cette question.
Ajoutons que la clause en question des Accords d’Evian ne prévoyaient ni le démantèlement des installations contaminées par la radioactivité ni la décontamination des lieux, auxquels d’ailleurs les pouvoirs publics algériens interdisent l’accès pour cette raison.
C’est en 1999 que le scénariste et réalisateur franco-algérien, Djamel Ouhab, a réalisé son premier long-métrage, Cour interdite (drame d’un jeune s’adonnant au trafic de drogue pour faire vivre sa famille). Il prépare actuellement une fiction : Fellouze. Il a été, pendant plusieurs années, membre dirigeant de l’Agence du cinéma indépendant pour sa diffusion, et intervient aussi dans les ateliers de la FEMIS ainsi qu’aux Cours Florent à Paris pour la formation des comédiens.
Hakim Arabdiou
Pour une fois, des informations « explosives » n’émanent pas d’un rapport de Shalom Arshav, mais du ministère israélien de la défense lui-même. L’étendue des infractions à la loi et du caractère far-westien de l’Etat de droit en Cisjordanie y est pour la première fois révélée de source officielle. Ces informations confirment celles recueillies par l’Observatoire de la colonisation de Shalom Arshav depuis des années
Ha’aretz, 30 janvier 2009
http://www.haaretz.com/hasen/spages...
Traduction : Gérard Eizenberg, pour La Paix Maintenant
Il y a tout juste quatre ans, le ministère de la défense décidait d’entreprendre ce qui paraissait une tâche élémentaire : établir une base de données exhaustive sur les colonies. Le général (réserve) Baroukh Spiegel, collaborateur de Shaul Mofaz, alors ministre de la défense, fut chargé du projet. Pendant plus de deux ans, Spiegel et son équipe, qui avaient tous signé un accord de confidentialité, récoltèrent systématiquement les chiffres, essentiellement auprès de l’Administration civile.
L’un des principaux moteurs qui expliquaient cet effort était la nécessité de disposer d’informations crédibles et accessibles pour contrer les procédures juridiques entamées par des habitants palestiniens, des organisations pour les droits de l’homme et des mouvements de gauche qui contestaient la légalité de la construction dans les colonies et l’utilisation de terres privées sur lesquelles elles étaient bâties ou s’étendaient. Ces chiffres, réunis à grand peine, furent considérés comme de la dynamite politique.
L’establishment de la défense, avec à sa tête Ehoud Barak, ministre de la défense, refusa obstinément de publier les chiffres, arguant en premier lieu que leur publication pouvait nuire à la sécurité de l’Etat ou à sa politique étrangère. Celui qui sera probablement intéressé par ces chiffres est George Mitchell, émissaire spécial du président Barack Obama au Moyen-Orient, qui est venu cette semaine en Israël pour une première visite depuis sa nomination. C’est Mitchell qui est l’auteur du rapport de 2001 qui avait conduit à la formulation de la Feuille de route, laquelle établissait un parallèle entre l’arrêt du terrorisme et l’arrêt de la construction dans les colonies.
Récemment, Ha’aretz s’est procuré cette base de données officielle, la première du genre compilée en Israël sur les territoires occupés. Ici, pour la première fois, des informations que l’Etat cachait depuis des années sont révélées. Une première analyse des données montre que, pour l’immense majorité des colonies (environ 75 %), la construction a été effectuée, parfois sur une grande échelle, sans les permis requis ou en contravention avec les permis obtenus. La base de données révèle également que, dans plus de 30 colonies, d’importantes constructions d’immeubles publics et infrastructures (routes, écoles, synagogues, écoles rabbiniques et même commissariats de police) ont été effectuées en Cisjordanie sur des terres qui appartenaient à des propriétaires palestiniens privés.
Il faut souligner que ces chiffres ne concernent pas seulement les « colonies sauvages », car ces informations apparaissaient déjà dans le rapport bien connu de la procureure Talia Sasson, publié en mars 2005[1], mais le cœur même de l’entreprise de colonisation. Parmi les colonies concernées apparaissent d’anciennes colonies idéologiques comme Alon Shvout (1970, actuellement 3 291 habitants, dont le rabbin Yœl Bin Nun), Ofra (1975, 2 708 habitants dont Yehoshua Mor Yosef, ancien porte-parole de « Yesha », le conseil représentatif des colons, et des personnalités médiatiques comme Uri Elitzur et Hagaï Segal), ainsi que Beit El (1977, population 5 308 dont Hagai Ben-Artzi, frère de Sara Netanyahou). Sont également concernées d’importantes colonies fondées principalement pour des raisons économiques, comme la ville de Modi’in Illit (1990, 36 282 hab.) ou Givat Ze’ev, proche de Jérusalem (1983, 11 139 hab.) et des colonies plus petites comme Nokdim, près de Herodion (1982, 861 habitants dont le député Avigdor Lieberman).
Les informations que contient la base de données ne sont pas conformes à la position officielle de l’Etat telle qu’elle est présentée, par exemple, sur le site web du ministère des affaires étrangères, selon lequel "les actions d’Israël relatives à l’usage ou à l’attribution de terres qu’il administre sont toutes prises en respectant totalement les règles et les normes du droit international - Israël ne réquisitionne pas de terres privées pour construire des colonies". Du fait que, dans de nombreuses colonies, c’est le gouvernement lui-même, et en premier lieu le ministère de la construction et du logement, qui a été responsable de la construction, et que les nombreuses infractions concernent des infrastructures, des routes, des bâtiments publics, etc., les données officielles démontrent également la responsabilité du gouvernement dans la planification sans aucune retenue et le non-respect de l’Etat de droit dans les territoires occupés. Par ailleurs, l’ampleur de ces infractions atteste le dysfonctionnement de l’Administration civile, organisme chargé de délivrer les permis de construire et de leur supervision dans les territoires occupés.
Selon les chiffres du Bureau central de statistiques de 2008, environ 290 000 Juifs habitent les 120 colonies « officielles » et les plusieurs dizaines de « colonies sauvages » érigées en Cisjordanie depuis 41 ans.
"Rien n’a été fait en cachette", dit Pinhas Wallerstein, directeur général du Conseil des colons (Yesha) et personnalité qui compte dans l’entreprise de colonisation. "Je ne connais pas un plan de construction qui n’ait été initié par le gouvernement. " Selon lui, si les propriétaires des terres sur lesquelles ont été érigées les colonies se plaignent et que le tribunal reçoit leur plainte, les bâtiments de la colonie seront déplacés ailleurs : "Cela a toujours été la position de Yesha depuis des années. "
On ne le dirait pas à faire un tour dans plusieurs des colonies où des constructions massives ont été effectuées sur des terres privées palestiniennes. Des quartiers entiers bâtis sans permis ou sur des terres privées font partie intégrante des colonies. Cette impression de dissonance ne fait que grandir quand on découvre que des bureaux municipaux, des commissariats de police et des casernes de pompiers sont également bâtis, et fonctionnent actuellement, sur des terres qui appartiennent à des Palestiniens.
Dans une rue de la colonie de Kokhav Ya’akov, une jeune mère conduit ses deux jeunes enfants à la maison. "J’habite ici depuis six ans", dit-elle, l’air surpris quand elle entend que le quartier tout entier est construit sur des terres privées palestinienne. "Je savais qu’il existait une petite zone controversée dans le village, mais je n’avais jamais entendu dire qu’il s’agissait de terre privée. " Aurait-elle bâti sa maison ailleurs si elle l’avait su dès le début ? "Je n’aurais jamais jeté personne hors de chez lui. "
Non loin de là, dans la même colonie, sur un site pour caravanes à la fois étendu et à l’abandon, situé lui aussi sur des terres privées, un couple de jeunes mariés se dirige vers l’arrêt de bus : Aharon, 21 ans, et sa femme Elisheva, 19 ans. Bien qu’ayant grandi aux Etats-Unis et établis depuis quelques mois seulement en Israël, après qu’Aharon eut accompli son service militaire dans une unité ultra-orthodoxe du Nahal, ils parlent un hébreu presque parfait. Il étudie l’informatique à Jérusalem. A la question de savoir pourquoi ils ont choisi d’habiter cet endroit plutôt qu’un autre, ils donnent trois raisons : c’est proche de Jérusalem, bon marché et dans les territoires. Dans cet ordre.
Le couple paie son loyer, 550 shekels mensuels, au secrétariat de la colonie. En tant que nouveaux immigrants, ils sont encore exemptés de la taxe municipale (« arnona »). Aharon ne paraît pas bouleversé à l’idée que sa caravane est située sur une terre privée, et ne semble pas particulièrement intéressé : "Je me fiche de ce que dit l’Etat, la Torah dit que toute la Terre d’Israël nous appartient. " Et qu’arrivera-t-il si on leur demande de déménager sur une terre non privée ? "Nous déménagerons", dit-il sans hésiter.
Aujourd’hui encore, plus de deux ans après en avoir terminé avec son rôle officiel, Baroukh Spiegel demeure loyal à l’establishment militaire. Au cours d’un entretien, il rappelle plusieurs fois qu’il a signé un accord de confidentialité, de sorte qu’il ne souhaite pas entrer dans les détails de son travail. Il a été chargé par Shaul Mofaz de traiter des questions sur lesquelles Israël s’était engagé auprès des Etats-Unis, dont l’amélioration des conditions de vie des Palestiniens affectées par le mur de séparation, et de la supervision des soldats israéliens aux check points.
Il y a deux ans, le journaliste d’Ha’aretz Amos Harel avait révélé que la tâche essentielle confiée à Spiegel était d’établir et de maintenir à jour une base de données sur l’entreprise de colonisation[2] Cela s’était produit devant l’évidence que les Etats-Unis, ainsi que l’Observatoire de la colonisation de Shalom Arshav [3], étaient en possession d’informations beaucoup plus précises sur la construction dans les colonies que celles dont disposait l’establishment de la défense, qui jusqu’alors s’en était remis essentiellement aux informations transmises par les inspecteurs de l’Administration civile. L’ancienne base de données avait de nombreuses failles qui découlaient en grande partie du fait que l’establishment préférait ne pas savoir précisément ce qui se passait dans cette zone.
La base de donnée de Spiegel contient des informations écrites étayées par des photos aériennes et des données obtenues par GIS (Geographic Information Systems), qui concernent le statut des terres et les limites officielles de chacune des colonies. Spiegel : "Le travail a pris deux ans et demi. Il a été effectué afin de vérifier le statut des colonies et des avant-postes [4], et de parvenir à la plus grande exactitude possible : statut de la terre, statut juridique, limites, plan de construction, décisions gouvernementales, terres dont la propriété est douteuse. Il s’agit d’un travail professionnel à plein temps, qui a requis des juristes et des experts en planification et en GIS. J’espère que ce travail se poursuivra, parce que c’est absolument vital. Il faut savoir ce qui se passe là-bas pour prendre des décisions en conséquence. "
Dror Etkes, ancien coordinateur de l’Observatoire de la colonisation de Shalom Arshav, et qui dirige actuellement le projet pour la défense des terres au sein de l’organisation Yesh Din : "Le refus persistant du gouvernement de révéler ces données sous prétexte de raisons de sécurité constitue un exemple supplémentaire de la manière dont l’Etat abuse de son autorité pour réduire l’information dont disposent ses citoyens. Ils veulent formuler des positions intelligentes fondées sur des faits et non sur des mensonges et des semi-vérités. "
A la suite de ces premières révélations, le Mouvement pour la liberté de l’information et Shalom Arshav ont exigé du ministère de la défense qu’il publie cette base de données, en conformité avec la loi pour la liberté de l’information. Le ministère a refusé. "Il s’agit d’une base de données informatisée qui contient des informations détaillées et croisées sur les colonies juives en Judée et Samarie (Cisjordanie) ", a répondu le ministère. "Les données ont été réunies par le ministère pour ses besoins propres et contiennent des informations sensibles. Il a été demandé au ministère de permettre d’accéder à ces données, en conformité avec la loi pour la liberté de l’information. Après avoir étudié cette demande, il a décidé de ne pas remettre ces informations. L’affaire est en cours et fait l’objet d’une procédure auprès du tribunal civil de Tel Aviv. "
La base de données passe en revue chaque colonie par ordre alphabétique. Chaque entrée précise l’origine du nom de la colonie, sa forme (urbaine, village, conseil local, mochav, kibboutz), son affiliation à une organisation (Herout, Amana, Takam, etc.), le nombre d’habitants, les décisions gouvernementales qui l’ont concernée, l’organisme officiel auqueli la terre a été remise, le statut juridique de la terre sur laquelle la colonie a été construite (terre d’Etat, terre privée palestinienne ou juive, etc.[5], une revue des avant-postes illégaux situés à proximité, et dans quelle mesure les plans de construction validés ont été exécutés. Sous chaque entrée, soulignée en rouge, on trouve une information sur l’étendue de la construction effectuée sans autorisation et sa localisation exacte dans la colonie.
Parmi les révélations que contient cette base de données officielle, il est particulièrement fascinant de voir ce qui est écrit sur Ofra, une colonie de la première heure de Goush Emounim. D’après un récent rapport de B’Tselem, la plupart des zones développées des colonies sont situées sur des terres palestiniennes privées, et font ainsi partie de la catégorie des avant-postes illégaux destinés à être évacués. Le Conseil Yesha a réagi au rapport de B’Tselem en affirmant que les « faits » contenus dans le rapport étaient "totalement infondés et destinés à présenter une image biaisée. Les habitants d’Ofra font attention aux droits des propriétaires arabes, avec lesquels ils sont parvenus à un accord concernant la construction des quartiers ainsi qu’à un accord qui permet aux propriétaires privés de continuer à cultiver leurs terres. "
Mais les informations sur Ofra contenues dans la base de données ne laissent planer aucun doute : "La colonie n’est pas conforme aux plans de construction validés. La plupart des bâtiments de la communauté se trouvent sur des terres privées enregistrées comme telles, sans aucune base juridique, et sans possibilité de les convertir en terres à usage non-privé. " La base de données donne également une description détaillée des endroits où des constructions ont été effectuées sans permis : "La partie d’origine de la colonie comprend plus de 200 bâtiments résidentiels en dur, des bâtiments agricoles, publics, des lots, des routes et des serres, tous soumis à un plan maître mais non avancés pour cause de propriété douteuse. " Après avoir mentionné la présence de 75 caravanes et d’abris provisoires situés dans cette colonie, la base de données mentionne le quartier de Ramat Tzvi, au sud de la colonie d’origine : "Il y a environ 200 bâtiments en dur ainsi que des lots en train d’être viabilisés en vue d’une future construction, le tout sur des terres privées. " Danny Dayan, président de Yesha, réagit en disant : "Je ne suis pas au courant de ces informations. "
Autre endroit où la base de données révèle des constructions illégales ; Elon Moreh, l’une des colonies les célèbres de Cisjordanie. En juin 1979, plusieurs habitants du village de Rujib, au sud-est de Naplouse, avaient saisi la Haute cour, lui demandant d’annuler le décret d’affectation de
5 000 dounam de terres qui leur appartenaient, destinés à bâtir dans la colonie. Devant la cour, le gouvernement argua du fait, comme il le faisait régulièrement à cette époque, que la construction de la colonie était nécessaire pour des raisons de sécurité. Mais dans une déclaration en faveur des requérants palestiniens, l’ancien chef d’état-major Haïm Bar-Lev affirma : "En tant que professionnel, mon analyse est qu’Elon Moreh ne contribue pas à la sécurité de l’Etat d’Israël. "[6]
La Haute cour, se fondant sur ce témoignage ainsi que sur ceux des premiers colons, qui affirmaient eux aussi qu’il ne s’agissait pas d’une colonie provisoire établie pour raisons de sécurité mais bien d’une colonie permanente, ordonna à l’armée d’évacuer la colonie et de rendre les terres à leurs propriétaires. La conséquence immédiate de cette décision fut de trouver un autre site pour la construction de la colonie, sur des terres préalablement définies comme « terres d’Etat ». A la suite de cette décision, Israël arrêta officiellement d’invoquer des raisons de sécurité pour établir de nouvelles colonies dans les territoires occupés.
Les terres qui avaient été confisquées pour y construire Elon Moreh furent rendues à leurs propriétaires palestiniens, mais selon la base de données, sur le nouveau site aussi, où la colonie fut construite, site nommé Har Kabir, "la plus grande partie de la construction a été effectuée sans permis ni plan détaillé, et certaines des constructions mordaient sur des terres privées. Quant aux terres d’Etat dans la colonie, un plan détaillé fut préparé et publié le 16 juillet 1999. Il n’est jamais entré en application. "
Le conseil régional de Samarie, où se trouve Elon Moreh, a réagi en disant : "Tous les quartiers de la colonie ont été planifiés, et quelques-uns construits, par l’Etat d’Israël par l’intermédiaire du ministère du logement. Les habitants d’Elon Moreh n’ont commis aucune infraction, et toute allégation de ce type est totalement fausse. L’Etat d’Israël est responsable de la promotion et de l’approbation des plans de construction, dans la colonie comme partout ailleurs dans le pays. Quant aux plans qui n’auraient pas encore été validés, ce qui est le cas dans de nombreux villages partout en Israël où le processus peut durer des dizaines d’années, cela ne retarde pas l’exécution des plans, même s’ils ne sont pas finalisés. "
Selon la base de données, Beit El, autre colonie ancienne, a été elle aussi établie sur des "terres privées saisies pour raisons militaires" (...) D’après des données officielles, la construction effectuée à Beit El en l’absence de plans comprend les bâtiments qui abritent les bureaux du conseil municipal et le "quartier nord (Beit El 2) qui a été bâti pour sa plus grande part sur des terres privées. Ce quartier comprend de très nombreux bâtiments publics et de nouvelles routes circulaires. Le quartier nord (entre Jabal Artis et l’ancienne partie de la colonie), comprend environ 20 immeubles résidentiels, des bâtiments publics (dont une école), 40 caravanes et une zone industrielle. La totalité de l’ensemble se situe sur des terres privées, et ne dispose d’aucun plan qui lui soit affecté. "
Moshe Rosenbaum, qui préside le conseil local, réagit : "Malheureusement, vous coopérez avec les pires ennemis d’Israël et causez d’immenses dommages au pays tout entier. "
Ron Nahman, maire d’Ariel, a été réélu pour un sixième mandat aux dernières élections. Nahman habite depuis longtemps les territoires occupés et dirige une ville d’une hétérogénéité étonnante. Entre une visite à un site de caravanes qui abrite des évacués de Netzarim et un arrêt à un magasin qui vend du porc et d’autres produits non kasher, essentiellement à l’importante population russophone de la ville, Nahman se plaint de l’arrêt de la construction dans sa ville et des combats avec l’Administration civile pour chaque permis de construire.
Le Collège d’Ariel, orgueil de Nahman, figure lui aussi dans la base de données : "La zone sur laquelle le Collège d’Ariel a été construit ne suit aucune règle en termes de planification. " Il y est expliqué plus bas que l’institution est située sur deux plots distincts, et que le nouveau plan n’a pas encore été débattu. Nahman confirme, mais affirme que le problème du plan vient d’être résolu.
Quand on lui dit que plusieurs dizaines de colonies comprennent des constructions sur des terres privées, il n’est pas surpris : "C’est possible", dit-il. Le fait que dans les trois quarts des colonies, il y a eu des constructions qui ont dévié des plans autorisés ne le surprend pas davantage : "Toutes les plaintes doivent être adressées au gouvernement, pas à nous. Les petites colonies ont été planifiées par l’administration de la construction rurale du ministère du logement. Les plus grandes sont planifiées par des bureaux du ministère. C’est le gouvernement tout entier. Parfois, c’est le ministère du logement qui prend en charge le budget, quand la construction est hors budget. Dans d’autres cas, l’Etat paie une partie des coûts de développement et le reste est à la charge des individus. Tout ça, c’est un énorme bluff. C’est moi qui ai planifié les colonies ? Non, c’est Sharon, Rabin, Golda, Dayan. "
La base de données fournit des informations qui attestent une planification chaotique. Par exemple, une tentative de déterminer le statut de la terre de la colonie Argaman, dans la Vallée du Jourdain, a révélé que "la communauté était apparemment établie sur la base d’un décret de confiscation dont la localisation n’était pas précisée. " Sur Mavo Horon, la base de données dit : "La colonie a été construite sans décision gouvernementale sur des terres pour la plupart privées, à l’intérieur d’une zone fermée dans l’enclave de Latroun. La zone a été affectée à la WZO (Organisation sioniste mondiale) à partir de 1995, cette affectation constituant un abus d’autorité, apparemment sur directive politique. " Dans la colonie de Tekoa, des caravanes ont été louées à l’armée et installées en contradiction avec la désignation d’origine de la zone, et parfois en-dehors des limites géographiques du plan.
La plus grande partie de la Cisjordanie n’a pas été annexée à Israël. En conséquence, les règlements qui gouvernent l’établissement et la construction de villages diffèrent de ceux qui s’appliquent en Israël per se. Le rapport Sasson, qui traitait des avant-postes illégaux, se fondait en partie sur les données réunies par Spiegel, et listait les critères nécessaires à la création d’une nouvelle colonie en territoire occupé : 1. Le gouvernement israélien publie une décision de créer la colonie. 2. La colonie a une zone juridictionnelle définie. 3. La colonie a un plan détaillé et approuvé. 4. La colonie se situe sur une terre d’Etat ou sur une terre achetée par des Israéliens et enregistrée sous leur nom au cadastre.
Selon la base de données, l’Etat a donné à la WZO et/ou au ministère de la construction et du logement l’autorisation de planifier et de bâtir sur la plupart des territoires sur lesquels les colonies sont construites. Ces organismes ont alloué la terre à ceux qui ont fini par effectuer la construction dans la colonie. Parfois, il s’est agi du département colonisation de la WZO, d’autres fois du ministère de la construction et du logement. Dans plusieurs cas, des colonies ont été construites par Amana, le bras armé de la colonisation de Goush Emounim. Un autre organisme est cité pour avoir bénéficié de lots et de la responsabilité de la construction de colonies : le Fonds national des colons de Goush Emounim.
Des écoles, laïques ou religieuses (Talmudei Torah) ont été elles aussi construites sur des terres palestiniennes. D’après la base de données, dans la partie sud de la colonie d’Ateret, "15 bâtiments ont été construits en dehors des terres d’Etat, utilisés par la yeshiva Kinor David (« violon de David »). Il y a également de nouvelles routes de contournement et une zone spéciale de sécurité, illégale. " Kinor David est le nom d’une yeshiva à filière musicale. Le signe à l’entrée indique que la yeshiva a été construite par Amana, le conseil régional et le département colonisation de la WZO.
Dans le cas de Michmash, il est également très clair qu’une partie de la colonie a été construite sur "des terres privées par le moyen de la fraude". Par exemple, "au centre de la colonie (près du portail d’entrée principal) se trouvent un quartier de caravanes qui sert de Talmud Torah et d’autres bâtiments (dont 30 caravanes) sur des terres privées. "
Un après-midi d’hiver, une bande de gosses jouaient là, l’un d’entre eux portant un T-shirt où était écrit : « Nous ne pardonnerons pas et nous nous n’oublierons pas ». Pas d’enseignant alentour. Une jeune femme en pantalons conduisait son bébé chez le médecin et prit un moment pour bavarder. Elle avait déménagé là d’Ashkelon parce que les parents de son mari sont parmi les fondateurs de la colonie. Quand son fils aura suffisamment grandi pour entrer à la maternelle, elle ne l’enverra pas au Talmud Torah. Non pas parce que l’institution se trouve sur une terre privée, mais seulement parce que ce n’est pas le type d’éducation qu’elle souhaite pour lui : ["Je ne pense pas qu’il y ait eu des constructions sur des terres privées par ici, mais je ne pense pas non plus qu’il devrait y en avoir. "
Dans la colonie de Psagot, où il y a eu bon nombre de constructions sur des terres privées, il est facile de reconnaître le style en terrasses typique de l’agriculture palestinienne dans la région. Selon la base de données, il y a à Psagot "des bâtiments agricoles (un établissement vinicole et des entrepôts) à l’est de la colonie, proches des vignobles cultivés par les colons en fraude. ". Lors d’une visite, l’établissement vinicole était à l’abandon. Son propriétaire, Yaakov Berg a acquis la terre auprès de l’Administration israélienne des terres près de l’avant-poste de Migron, où un nouvel établissement vinicole et un centre touristique sont actuellement en construction.
"Les vignes sont situées à Psagot"°, dit Berg, occupé aux préparatifs du nouveau site. Depuis le point d’observation, on aperçoit une énorme carrière à flanc de montagne. "Si je construisais ici une salle de bain sans permis, j’aurais dans le quart d’heure un hélicoptère de l’Administration civile me disant que c’est interdit", se plaint-il. "Et ici même, il y a une carrière palestinienne légale qui continue à fonctionner. "
Kobi Bleich, porte-parole du ministère de la construction et du logement : "Le ministère participe au financement des coûts de développement des colonies dans la zone A, en conformité avec les décisions du gouvernement israélien. Les travaux de développement sont effectués par les conseils régionaux, et seulement après que le ministère s’est assuré que le nouveau quartier est bien inclus dans un plan d’urbanisation autorisé. Cela s’applique partout en Israël aussi bien qu’au-delà de la ligne Verte. Je souligne que les fonctionnaires du ministère sont chargés de faire appliquer la politique du gouvernement. Toutes les actions passées ont été faites en conformité avec les décisions du pouvoir politique. "
Danny Poleg, porte-parole du district Judée-Samarie (Cisjordanie) de la police : "La question de la construction des bâtiments de police est de la responsabilité du ministère de la sécurité intérieure, toutes vos questions doivent lui être adressées. "
Réaction du porte-parole du ministère de la sécurité intérieure : "La construction de commissariats de police est décidée par l’Administration des terres en coordination avec le ministère de la sécurité intérieure. Il n’y a pas de commissariat à Modi’n Illit, mais seulement un poste de réaction rapide pour les habitants, sur une terre allouée par l’autorité locale. La terre à Giv’at Ze’ev a été allouée par le conseil local et le commissariat se situe à l’intérieur de la municipalité. La route qui mène au QG de la police a été construite par le ministère de la construction et du logement. Sa maintenance est effectuée par le conseil local. "
Avi Rœh, président du conseil régional de Mateh Binyamin (qui a sous sa juridiction les colonies d’Ofra, Kokhav Yaakov, Ateret, Ma’aleh Michmash et Psagot) : "Le conseil régional de Mateh Binyamin, comme les conseils voisins en Judée et Samarie (Cisjordanie), traite de décisions politiques concernant l’expansion des colonies. Néanmoins, cela n’exclut pas la nécessité de procédures de planification adéquates, de manière à développer les colonies de façon organisée et en accord avec la loi. "
Pour toute réponse, la WZO a envoyé un épais livret, dont une copie avait déjà été envoyée à la procureure Talia Sasson à la suite de son rapport. (...)
L’Administration civile, la première dont la réaction a été demandée concernant la base de données, il y a plus d’un mois, n’a pas encore répondu.
[1] Nous avons publié de nombreux articles sur le rapport Sasson. Voir par exemple "Comment les colons se moquent de la loi dans l’avant-poste de la démocratie au Moyen-Orient", par Dror Etkes [charger le lien]
[2] Voir "Croissance des colonies sur des terres arabes malgré les promesses aux Etats-Unis" [charger le lien]
[3] (Voir "Les terres volées aux Palestiniens : Rapport de Shalom Arshav sur la construction des colonies sur des terres privées palestiniennes" [charger le lien]
[4] Sur la distinction entre « avant-postes » (ou colonies sauvages) et les autres colonies, voir Dror Etkes : "Avant-postes ou nouvelles colonies ? " [charger le lien]
[5] Ces différents statuts juridiques sont étudiés dans l’article de Dror Etkes cité précédemment : [charger le lien]
[6] Le cas d’Elon Moreh est analysé également dans l’article cité plus haut [charger le lien]
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